Dans une vidéo, un Sénégalo-suisse informe que certains fonctionnaires de la Daf lui ont demandé de l’argent pour lui confectionner une carte d’identité nationale. En écho à ces accusations, le ministre de l’Intérieur a annoncé l’ouverture d’une enquête.
C’est une vidéo qui est devenue virale sur le net. Sans se cacher, un Sénégalo-suisse prénommé Aiman Steiner accuse des fonctionnaires de la Direction de l’automatisation des fichiers (Daf) d’être corrompus. Il dit : «Des fonctionnaires de la Daf m’ont demandé un million de francs Cfa pour confectionner les cartes nationales d’identité de ma sœur et moi.» Ces accusations gravissimes interpellent les autorités étatiques qui ont décidé d’ouvrir une enquête pour en connaître les tenants et les aboutissants. Joint par téléphone, Fiacre Badiane, fraîchement nommé à la tête de la Daf, avance que c’est une affaire prise très «au sérieux» par le ministre de l’Intérieur : «C’est un dossier qui sera traité avec diligence parce que c’est le ministre (Aly Ngouille Ndiaye) qui a demandé l’ouverture de cette enquête. La police judiciaire a été saisie par la direction.» Il rappelle que les faits datent d’avril 2019, même s’ils viennent de connaître leur déchaînement public. Un dossier dont il aurait pu se passer en accédant à ce poste très névralgique au ministère de l’Intérieur.
En tout cas, il promet une investigation impartiale pour tirer cette affaire au clair. Car les accusations du Suisse sont extrêmement détaillées même s’il ne s’agit évidemment que de simples présomptions. Interrogé par Seneweb, M. Steiner a maintenu l’accusation en donnant les détails de l’affaire. «Le 14 juin 2018, ma sœur et moi avions déposé une demande pour obtenir des cartes nationales d’identité sénégalaises auprès du consulat sénégalais de Madrid. Neuf mois après, nous ne les avions toujours pas reçues. C’est là que le consulat nous a demandé de contacter la Daf via l’hôtel de police de Dakar», dit-il. Il explique qu’il a suivi les conseils donnés par le consulat de Madrid. «Quand nous avons appelé à l’hôtel de police de Dakar, un monsieur a pris l’appel. Je lui ai expliqué ce que je voulais et lui ai communiqué nos données personnelles. Ainsi, il nous a mis en rapport avec un de ses collègues qui travaille à la Daf. Ce dernier nous apprend que nos cartes n’ont pas encore été validées et pour que cela soit fait, il fallait contacter Monsieur T… Ce dernier m’a alors demandé 1 million de francs Cfa pour avoir les cartes. Sinon, nous dit-il, les dossiers de ma sœur et moi seraient rejetés. J’ai refusé cette forme de corruption», raconte-t-il. M. Steiner annonce qu’il a contacté le ministère de l’Intérieur. Là aussi, dit-il, les choses ne sont pas déroulées comme il le souhaitait : «Quand j’ai appelé pour me plaindre, un standardiste m’a demandé la somme de 200 mille francs Cfa pour valider nos cartes d’identité. La dernière personne que j’ai eu à contacter est M. T. qui travaille au ministère des Affaires étrangères. Il m’a clairement fait savoir que nos cartes d’identité n’ont même pas encore été saisies, donc elles ne sont même pas dans les machines.»
De mère sénégalaise, Aiman Steiner, issu de la famille Steiner, propriétaire du Groupe Steiner, spécialisé dans le secteur du génie civil et du bâtiment, voulait obtenir une carte d’identité nationale pour pouvoir «investir au Sénégal». «Malheureusement, la corruption et les escrocs freinent l’élan de beaucoup de personnes qui veulent développer et créer des emplois au Sénégal», regrette-t-il. Et l’enquête pourra éclairer tout ça, surtout que l’accusateur cite des noms, joint des conversations écrites, vocales entre lui et les supposés agents suspects de la Daf et divulgue des photos de leurs prétendus profils WhatsApp.