La République autoproclamée du Somaliland, dans le nord de la Somalie, élit lundi un nouveau président, le sortant ne se représentant pas, et espère poursuivre une transition démocratique qui tranche avec l’instabilité de l’Etat somalien voisin.
Le sortant Ahmed Mohamud Silaanyo a décidé de ne pas se représenter à la fin de son unique mandat.
Trois hommes sont en lice dans cette petite “République” semi-désertique de près de 4 millions d’habitants: Muse Bihi, du parti au pouvoir Kulmiye et les candidats d’opposition Abdirahman Iro et Feysal Ali Warabe, candidat malheureux à la précédente présidentielle de 2010.
Le Somaliland est plus homogène sur le plan clanique et plus stable que le reste de la Somalie. Ancienne Somalie britannique, il a fusionné avec l’ancienne Somalie italienne à l’indépendance du pays en 1960. Puis il a fait sécession de la Somalie et s’est autoproclamé indépendant en 1991, après la chute de l’autocrate Siad Barre qui allait plonger la Somalie dans la guerre clanique et précipiter l’effondrement de l’Etat somalien.
Le Somaliland n’est officiellement reconnu par aucun pays et est toujours considéré par la communauté internationale comme partie intégrante de la Somalie. Il ne reconnaît pas le gouvernement central somalien.
La présidentielle a lieu tous les cinq ans mais celle-ci a été retardée depuis deux ans à cause de la sécheresse – qui frappe régulièrement cette région de la Corne de l’Afrique – et de problèmes d’organisation.
La campagne électorale s’est achevée vendredi et quelque 700.000 votants sont appelés aux urnes. Un système de vote biométrique avec reconnaissance de l’oeil des votants sera utilisé pour la première fois, a fait savoir la Commission électorale nationale.
Les deux dernières présidentielles dans ce pays à peine plus grand que la Grèce avaient été jugées démocratiques.
– Réseaux sociaux bloqués –
Mais la Commission électorale a prévenu que l’accès aux réseaux sociaux (notamment Twitter, Facebook, Whatsapp) serait bloqué à partir de la fermeture des bureaux de vote lundi à 18h00 (15h00 GMT) et jusqu’à une période non précisée, en raison selon elle de craintes d’interférences en provenance des régions voisines et pour éviter les spéculations sur les résultats.
“C’est très difficile de contrôler les réseaux sociaux et les médias en général, mais nous avons demandé aux sociétés de communication de suspendre temporairement plusieurs plates-formes de réseaux sociaux”, a annoncé Said Ali Muse, porte-parole de la Commission.
Human Rights Watch (HRW) a déploré cette décision dans un communiqué vendredi, estimant que si les autorités s’inquiétaient de la possible diffusion de fausses informations ou d’agitation sur les réseaux sociaux, elles devraient plutôt “propager des informations précises et des messages de prévention des violences”.
Le Somaliland a su administrer et protéger son territoire avec plus d’efficacité que la Somalie, avec une aide internationale et un soutien sécuritaire largement inférieurs. Les autorités expriment régulièrement leur amertume face à la non reconnaissance internationale qui freine selon elles le développement du pays. Le Somaliland ne peut accéder aux prêts de la Banque mondiale ou du FMI, indispensables pour développer des infrastructures.
Pour l’écrivain et militant Barkad Dahir, ce scrutin de lundi est crucial pour prouver les acquis démocratiques.
“La question n’est pas seulement l’élection et le (futur) président, mais aussi le processus et son caractère juste; la communauté internationale nous regarde et si nous sommes assez intelligents, nous voterons dans le calme pour montrer que nous sommes une démocratie”, a-t-il déclaré à l’AFP.
Le processus électoral pour cette présidentielle contraste fortement avec celui de la Somalie, qui a élu son président en février 2017, et où le processus est construit autour du système clanique régissant la société et la politique du pays et non sur le suffrage universel.
AFP