Après les domiciles des guides religieux, les opposants ont décidé d’investir les chancelleries occidentales. Il s’agit de mieux sensibiliser les diplomates étrangers sur les «manipulations constitutionnelles» et l’accaparement des ressources naturelles par la famille du Président.
L’opposition radicale regroupée autour du Front démocratique et social de résistance nationale (Frn) a lancé sa grande offensive diplomatique contre le président de la République. Les leaders du Frn ont été reçus, hier, à leur demande, en audience par l’ambassadeur de l’Union européenne sur le processus électoral dans les locaux de la Délégation de l’Union européenne. Après demain, jeudi, Oumar Sarr, Abdoul Mbaye, Mamadou Diop Decroix, Mamadou Lamine Diallo, Pape Diop, etc, seront aussi reçus en audience par l’ambassadeur des Etats-Unis dans les locaux de l’ambassade. Avant ces rencontres avec les diplomates étrangers, les leaders de l’opposition ont rencontré au mois de juillet dernier les leaders religieux: le 22 juillet, le Khalife général des Mourides a reçu une délégation du Frn. Deux jours après cette même délégation a été reçue par Monseigneur Benjamin Ndiaye, l’archevêque de Dakar.
Ainsi, à huit mois de l’élection présidentielle dont le premier tour est fixé au 24 février 2019, l’opposition est en tournée d’explication auprès des leaders d’opinion aussi bien au niveau nationale qu’international. Le Front accuse le président Macky Sall de vouloir truquer le scrutin et surtout de chercher à exclure certains candidats.
En effet, ces audiences s’inscrivent dans une démarche de sensibilisation et de dénonciation des «manipulations constitutionnelles» et de l’accaparement des ressources naturelles par la famille du président Macky Sall. Le Pds, Rewmi, Aj, le Grand parti, etc réclament également l’organisation d’élections transparentes avec un fichier fiable permettant la libre expression du suffrage des Sénégalais,
En outre, l’opposition radicale réclame les départs des ministres de l’Intérieur, Aly Ngouille Ndiaye «qui s’est engagé, publiquement, en sa qualité de ministre en charge des élections, à faire élire le candidat Macky Sall dès le premier tour» et son collègue de la Justice Ismaël Madior Fall. «Le ministre chargé de la Justice est un homme dangereux comme le parrainage. Il doit démissionner», avait déclaré le député Mamadou Lamine Diallo dans sa question économique hebdomadaire.
D’après lui, Ismaël Madior Fall a introduit la deuxième réforme qui consiste à l’élimination des dispositions transitoires de la constitution votée en 2016 permettant au Président Macky Sall de briguer plus de deux mandats à la tête de la République. «L’introduction du parrainage dont l’objectif est la liquidation des partis politiques et l’instauration de la «république» des faux indépendants pour asseoir l’hégémonie de l’Alliance des Prédateurs de la République: Macky Sall choisit désormais les candidats à la présidentielle. Or, en toute rigueur, la modification du régime électoral de l’institution «Président de la République» est du ressort du référendum (article 67 de la constitution) », dénonce leader de Tekki, avant de conclure : «Insidieusement comme de si de rien n’était, le Professeur réputé de droit devenu tailleur constitutionnel, est en train d’installer un régime d’exception où le président, son Conseil constitutionnel et ses députés vont décider de tout et accaparer la rente minérale». Charles Gaiky DIENE
L’opposition veut sensibiliser les diplomates étrangers sur la situation politique du pays
Pourquoi l’opposition saisit l’étranger
La saisine de la communauté internationale par l’opposition pour des affaires sénégalo-sénégalaises, est devenue presque une tradition au Sénégal. L’opposition au président Abdou Diouf ne ratait jamais une occasion de «vilipender» le régime socialiste devant la communauté internationale. Les opposants au président Wade ont perpétué cette tradition. Actuellement, l’opposition au président Macky Sall fait appel à l’étranger pour régler des questions électorales. Récemment, le Pds avait appelé à manifester pacifiquement dans la rue sa colère contre le pouvoir lors de la visite du président Français. Mieux, les libéraux avaient prévu de remettre à Emmanuel Macron un mémorandum pour dénoncer la politique du régime actuel.
Pour l’opposition du temps de Diouf, de Wade ou actuellement de Macky Sall, seule la communauté internationale est capable de tordre le bras au président de la République. Car, nos chefs d’Etat sont plus sensibles aux injonctions des puissances occidentales qu’à l’opinion nationale.
Il faut dire que l’Union européenne et les Etats unis ont un droit de regard sur les affaires sénégalo-sénégalaises pour deux raisons. D’abord, les opposants font systématiquement appel à eux. Ensuite, ils participent aux financements des élections et à l’audit du fichier électoral, en tant qu’observateurs. D’ailleurs, Benoît Sambou, le plénipotentiaire de la mouvance présidentielle ne cesse de rappeler que l’audit du fichier électoral a été décidé d’un commun accord à l’issue d’un appel d’offres international sous la supervision de l’Union européenne et sur financement de l’Allemagne. Charles Gaiky DIENE