Reporters sans frontières (Rsf) a rendu public, hier, son rapport 2022 sur le classement mondial de la liberté de la presse. Et le moins que l’on puisse dire est que la nouvelle n’est pas bonne pour le Sénégal. En effet, classé à la 49ème place en 2021, notre pays se retrouve à la 73ème sur un total de 180 pays. Ainsi, il perd 24 places au moment où d’autres pays voisins comme la Gambie arrive à la 50ème place, avec un bond de 35 points.
Classé 49ème en 2021, le Sénégal occupe la 73ème place dans le nouveau rapport 2022 du classement mondial de la liberté de la presse, soit une chute de 24 points. Dans la région ouest africaine, notre pays est devancé par le Cap-Vert qui est venu à la 36ème position ; la Côte d’Ivoire à la 37ème ; le Burkina Faso 41ème place ; la Gambie 50ème place, et qui gagne 35 points. Sur les critères de notation, le Comité de sept experts s’est essentiellement intéressé sur des critères définis. Il s’agit de «la possibilité effective pour les journalistes, en tant qu’individus et en tant que collectifs, de sélectionner, produire et diffuser des informations dans l’intérêt général, indépendamment des interférences politiques, économiques, légales et sociales, et sans menaces pour leur sécurité physique et mentale». Au regard de ces indications, la majeure partie des pays du continent africain se situent entre la tranche «situation problématique, situation difficile», précise-t-on dans le document de Reporters sans frontières (Rsf).
Il faut signaler que ce classement révèle, toutefois, des exceptions dans certains pays en Afrique. Il s’agit des Seychelles, de la Namibie et de l’Afrique du Sud qui occupent respectivement le podium sur le continent. Car, la presse dans ces pays profite d’une situation plutôt «bonne». Par contre, une situation grave qui n’est pas enviable en Egypte, en Djibouti et en Erythrée. Ces pays africains figurent dans la bande rouge à l’instar de la Syrie, de l’Irak et de l’Arabie Saoudite ou encore de la Chine, de la Russie et de la Corée du Nord. «A l’échelle planétaire, seuls huit pays sont dans la bande verte. Ce qui prédit de bon augure pour la presse. Vingt-huit pays, soit un nombre record, sont en situation très grave en termes de liberté de la presse», relève le rapport du Classement mondial de la liberté de la presse de Rsf.
Au total, 12 pays passent dans la liste rouge du classement, dont le Bélarus (153e) et la Russie (155e) ; la Birmanie (176e) figure même aux côtés de la Corée du Nord (180e), de l’Érythrée (179e), de l’Iran (178e), du Turkménistan (177e) et de la Chine (175e). Le classement, qui évalue les conditions d’exercice du journalisme dans 180 pays et territoires, met aussi en exergue le «chaos informationnel actuel, soit un espace numérique globalisé et dérégulé, qui favorise les fausses informations et la propagande». En résulte une double polarisation, entre médias et entre États, qui intensifie les tensions.
L’invasion de l’Ukraine par la Russie…
Par ailleurs, l’invasion de l’Ukraine (106e) par la Russie (155e) à la fin du mois de février 2022 est emblématique du phénomène, puisqu’elle a été préparée par une guerre de la propagande, signale Rsf. Parmi les régimes autocratiques les plus répressifs, la Chine (175e) «a utilisé son arsenal législatif pour confiner sa population et la couper du reste du monde, et particulièrement celle de Hong Kong (148e), qui dévisse significativement dans le Classement».
«La rédactrice en chef de Russia Today, Margarita Simonian, a révélé le fond de sa pensée dans une émission de la chaîne Russia One en affirmant qu’aucune grande nation ne peut exister sans un contrôle de l’information», souligne le secrétaire général de Rsf, Christophe Deloire. «La mise en place d’un armement médiatique dans les pays autoritaires annihile le droit à l’information de leurs citoyens, mais il est aussi le corollaire de la montée des tensions sur le plan international, qui peuvent mener aux pires guerres. Sur le plan interne, la +fox-newsisation+ des médias est un danger funeste pour les démocraties. Car, elle sape les bases de la concorde civile et d’un débat public tolérant. Face à ces dérives, il est urgent de prendre les décisions qui s’imposent, en promouvant un +New Deal+ pour le journalisme, tel que proposé par le Forum sur l’information et la démocratie, et en adoptant un cadre légal adapté, avec notamment un système de protection des espaces informationnels démocratiques», préconise Christophe Deloire.
Samba BARRY