En portant son choix sur Ousmane Sonko le 24 février dernier, Ziguinchor prenait le risque de se faire sanctionner comme en 2014. La composition du nouveau gouvernement est d’ailleurs perçue par une bonne partie de l’opinion comme la rançon de la défiance avec un Macky Sall qui a fait semblant de servir la capitale du sud au nom du principe d’équité territoriale. Une situation qui baliserait le chemin à Ousmane Sonko.
(Correspondance) – Le sort semble s’acharner sur les responsables de l’Apr à Ziguinchor. Aujourd’hui, c’est le Président Macky Sall qui vient de porter l’estocade à des leaders qui ne se sont pas encore relevés du traumatisme du 24 février dernier provoqué par la défaite devant Ousmane Sonko. La publication de la liste des membres du gouvernement a été vécue à Ziguinchor comme un coup de massue. Au premier rang des surprises, le départ d’Aminata Angélique Manga. Si sa nomination avait été inattendue pour beaucoup d’observateurs, le départ de «Ange» l’est tout aussi. La nuit du dimanche a été longue et traumatisante pour ses proches, mais pas seulement. Car, le choix de Macky Sall s’est porté sur la personnalité politique la moins connue dans la mouvance présidentielle dans la capitale du sud. Originaire de Dianky, dans le département de Bignona, Aminata Assom Diatta qui milite cependant à Ziguinchor, sera la seule représentante de la région à la table du conseil des ministres. Un choix plus que surprenant qui a échappé à tous les météorologues politiques. Macky Sall met ainsi en valeur un souteneur plutôt qu’un militant de l’Apr.
Hier encore, l’air de la déception soufflait sur Ziguinchor avec une population qui cherchait à comprendre ce qui se passait. Le regard des gens était évasif comme pour tenter de dissimiler la déception de se voir servir par contrainte. Le sentiment le mieux partagé dans la capitale du sud est que Ziguinchor est victime de son choix politique en faveur d’un opposant au régime actuel. Partout dans la région, les populations ont choisi Ousmane Sonko. Au lendemain du scrutin, beaucoup de gens voyaient venir la guillotine du maître comme en 2014 quand Benoit Sambou, alors ministre de la Jeunesse, est évincé du gouvernement pour sanctionner une déroute historique devant Abdoulaye Baldé.
Le Président Macky Sall aura certainement mal vécu la victoire de Sonko à Ziguinchor pour réserver une portion congrue à la région, pour beaucoup de gens, encore sous le choc du dernier remaniement. Dans le gouvernement, plus de Souleymane Jules Diop encore moins de Moustapha Lô Diatta. Et comme le chef ne pouvait pas zapper complètement les trois départements que sont Bignona, Oussouye et Ziguinchor, Macky Sall, soumis à la contrainte de la traduction en acte du principe de l’équité territoriale tant vantée «offre» un portefeuille pour respecter le parallélisme des formes par rapport à une région anticonformiste qui lui a préféré un autre. Une situation mal vécue à l’Apr, mais aussi dans les rangs des alliés. A l’Ucs par exemple, les militants ont perdu la voix. La volonté de voir Abdoulaye Baldé occuper un important portefeuille ministériel conformément à une rumeur de plus en plus persistante qui a circulé dans la ville, s’est envolée avec la liste rendue publique dans la nuit du dimanche par le nouveau secrétaire général du gouvernement, Maxime Jean Simon Ndiaye. Dans le nouvel attelage gouvernemental, ni Benoit Sambou, ni Doudou Kâ, Aminata Angélique Manga, Kéba Kourfia Diawara, ni Baldé, Souleymane Jules Diop, Mamadou Lamine Keïta, Moustapha Lô Diatta, mais plutôt, le leader du mouvement Jappo Ak Assom, Aminata Assom Diatta, peu connue des Ziguinchorois.
En faisant ce choix, le président Macky Sall ne place-t-il pas Ousmane Sonko et le Pastef en mode roue libre dans la région ? Déjà, les patriotes du sud occupent le devant de la scène pour surfer sur ce qu’ils considèrent comme un mépris du Président Macky Sall pour Ziguinchor et sa région.
Mamadou Papo MANE