CHRONIQUE DE WATHIE
L’émergence que Macky SALL entonne depuis qu’il est élu à la tête de l’Etat, les générations qui vont en profiter n’ont pas encore vu le jour. La création de richesse qui est à la base de tout développement économique est mise entre les mains d’étrangers qui n’ont absolument pas intérêt à voir le Sénégal sortir de la pauvreté au risque de ne plus pouvoir l’exploiter. Tout ce qui est indispensable et susceptible de générer de véritables revenus pour les populations comme communiquer (Orange), boire (SDE), s’éclairer (Solairedirect, Senergy Suarl, Eiffage…), se déplacer (Eiffage, Total) est confié aux Français. Et à ceux qui, bien avant, avaient déjà le monopole du sucre (CSS), l’Etat veut maintenant confier le petit commerce. Les commerçants auront beau vociféré, Auchan ne bougera d’un iota. Ce tableau aux couleurs vives qu’ils rechignent à regarder, c’est dans les bureaux présidentiels qu’il a été dessiné. Mais, avant d’aller aux champs, un mot sur l’équipe de Deschamps.
Les chroniqueurs d’une célèbre radio française, commentant le parcours médiocre des équipes africaines à la présente Coupe du monde, ont étalé toute sorte d’arguments, des fois péjoratifs, sans jamais évoquer l’une des raisons fondamentales. Les pays africains ne sont pas performants en football parce qu’aussi la France et ses voisins leur prennent leurs meilleurs joueurs. Qu’aurait été la sélection dirigée par Didier Deschamps sans Samuel Umtiti, Kylian M’bappé (Cameroun), Ousmane Dembélé, Benjamin Mendy, (Sénégal), Paul Pogba (Guinée), l’infatigable N’Golo Kanté (Mali), Steve Mandanda, Presnel Kimpembe, (Congo), Blaise Matuidi (Angola), sans parler des Steven Nzonzi, Nabil Fekir, Adil Rami, Djibril Sidibé ? La même question peut être posée concernant son futur adversaire au mondial russe. Comme dans bien d’autres domaines, la Belgique n’est forte qu’avoir pillé la RD Congo qu’elle a privé de talents comment Vincent Kompany, Michy Batshuayi, Romelu Lukaku,Youri Tielemans et bien d’autres. L’équipe qui gagnera, quelle qu’elle soit, fera à coup sûr vibrer de nombreuses villes africaines. Si de nombreux pays africains francophones ne parviennent pas à inscrire leur nom sur les cahiers des médaillés d’or aux Jeux Olympiques, c’est que la France et ses voisins sont passés par là. Cela n’explique pas totalement l’échec des pays africains à la coupe du monde mais, c’est un état de fait que les spécialistes du football français n’admettent que de manière inaudible. Pourtant, ils savent mieux que quiconque, que de Platini, Tigana, à Zidane en passant pas Luis Fernandes, la France qui a brillé au football s’est toujours appuyée sur des « tirailleurs ». Quand il s’agit de hisser au plus haut niveau le drapeau tricolore, la France se départit de toute vergogne. Qu’il soit tenu par une main noire ou blanche, n’est pas important ; l’essentiel est que c’est la France qui gagne. « Des tirailleurs » qui, après avoir magnifiquement défendu les couleurs de la France, sont, à défaut d’être exécutés comme ceux de Thiaroye 44, laissés pour compte. Marcel Désailly, l’anglophone qui se voulait plus français que les Français dans les terrains ne dira pas le contraire. A part les chaines de télé, personne ne veut de ses connaissances footballistiques. Il s’est rabattu, en vain, sur la sélection de son pays d’origine, le Ghana, qui n’a pas non plus voulu de ses services. Ce n’est pas par hasard si Thierry Henry, le meilleur buteur de l’histoire de l’équipe nationale de France, est sur le banc de la Belgique.
La coupe du monde qui bat son plein permet de mieux comprendre la politique étrangère de la France qui orientée, en sport ou en économie, est la même. C’est celle qui veut que pour devenir grand et le rester il faut piller l’autre. Pour se donner bonne conscience le général De Gaule soutenait que « les Etats n’ont pas d’ami, ils n’ont que des intérêts ».
Et c’est là que la position exprimée par le représentant de la France au Sénégal, sur l’affaire Auchan, prend de l’importance. En déclarant que « Auchan apporte un réel service aux consommateurs », l’ambassadeur Christophe Bigot, ancien membre du service secret français, donne à l’affaire une ampleur d’Etat. Comme avec la signature du protocole d’accord liant l’Etat du Sénégal au groupe Alstrom, dans le cadre du TER, c’est l’Etat français qui est monté au créneau. Comme il l’avait pour Total, Eiffage… Des entreprises dont les capitaux sont loin d’être seulement publics. Et c’est la où l’Etat du Sénégal était attendu. A l’instar de la France, mettre en avant ses intérêts en poussant des Sénégalais à profiter de ce champ qu’ils ont si difficilement labouré. Les boutiquiers et autres petits commerçants ne peuvent faire face à un mastodonte comme Auchan. C’est le B.a.-ba du commerce. Le Maroc, plus proche de la France et beaucoup plus peuplé que le Sénégal, a mis en avant les labels Acima et Marjane (fondés par des Marocains) poussant Auchan à faire ses valises en 2007. Mais, ce n’est pas de Macky SALL qu’il faut attendre une telle rebuffade.
Mame Birame WATHIE