Le projet de Loi de finances initiale pour l’année 2023 arrêté à 4 096,4 milliards francs Cfa contre 3 647,8 milliards francs Cfa pour la Loi de finances rectificative de règlement (Lfr) 2022 n’a pas rencontré l’adhésion de certains députés. Lesquels, notamment Guy Marius Sagna, se sont abstenus de voter le budget du ministère des Finances et du budget.
Tels des fourmis, les mots croissance, inflation, dette publique ont bourdonné dans les oreilles de Mamadou Moustapha Ba, ministre des Finances et du Budget. Son calme olympien n’a pas pu contenir le flot de critiques émanant de certains députés. Se relayant au perchoir, ces parlementaires n’ont pas raté le gouvernement surtout l’aspect lié à l’inflation et le niveau d’endettement du pays. «Concernant la croissance avancée, j’ai un sérieux doute à cause du niveau d’endettement du pays», se lamente le député de l’opposition Abba Mbaye, au moment où le projet de vote de loi de finances de 2023 indique que la croissance devrait rester dynamique, en passant de 4,6 % en 2021 à 3,8 % en 2022. «Elle serait soutenue, principalement, par la croissance au Nigéria qui est attendue en hausse de 3,4 % en 2022 contre 3,6 % un an plus tôt. Globalement, la croissance dans les pays émergents et en développement ressortirait à 3,6 % en 2022 contre 6,8 % en 2021. Quant aux perspectives de l’économie mondiale en 2023, elles demeurent moroses. Globalement, le ralentissement de l’activité économique mondiale devrait se poursuivre avec un taux de croissance projeté à 2,9 %», indique le projet de loi de finances présenté, hier, à l’Assemblée nationale.
«Des Sénégalais mangent du ‘’lakh’’ à midi… »
Des assurances qui ont laissé «perplexes» certains députés, tout comme la projection de 8,1 % du Fmi pour 2023. Dans ce sens, en commission, des députés ont demandé des explications relativement au secteur secondaire qui tirerait l’économie au détriment du secteur primaire, tout en s’informant sur le poids de ce dernier secteur dans notre économie. De plus, ils ont demandé le modèle économique sur lequel fonctionne le Sénégal. En écho, le député Mame Diarra Fam membre de la coalition Wallu d’indiquer que le Sénégalais lambda est fortement éprouvé. «On est à un niveau où l’on mange du ‘’lakh’’ (bouillie à base de mil) à midi, du ‘’Sombi’’ (bouillie à base de riz) le matin et du ‘’Thiéré’’ (Couscous) le soir. Même la baisse annoncée de certaines denrées de première nécessité n’a aucun effet sur le vécu du citoyen lambda qui suffoque avec le renchérissement de certains prix», déplore Mame Diarra Fam.
Tandis que d’autres députés se sont inquiétés que le Sénégal ne dispose «plus de marge de manœuvre concernant son endettement», puisqu’en l’espace de 10 ans, le volume de la dette a plus que doublé. Une interpellation qui a fait bondir le ministre des Finances et du Budget qui a indiqué que l’encours de la dette doit être analysé «en référence à celle de l’administration centrale, d’autant que la dette contingente des autres administrations publiques n’est pas prise en compte». De l’avis de Mamadou Moustapha Ba, le budget de l’année 2023 va apporter «des solutions» en vue de protéger les ménages et de contenir l’inflation à travers la maîtrise, voire la baisse des prix et l’amélioration des revenus.
«Recul progressif du Sénégal au classement de l’Idh…»
Malgré tout, le député Guy Marius Sagna n’entend pas voter ce budget puisqu’à ses yeux, ce budget est «du tape à l’œil». «C’est un budget de copains et coquins. Puisqu’on accorde à des entreprises étrangères une exonération fiscale tandis que le cultivateur, le paysan paie l’impôt. Pourquoi ces faveurs alors que le Sénégal paie 141 milliards par an pour le service de la dette», s’interroge-t-il.
Les autres inquiétudes des députés ont porté sur le recul progressif du Sénégal au classement de l’Indice de développement humain (Idh) depuis 2011. Ils ont également déploré l’examen du projet de Lfi 2023, en l’absence du projet de loi de règlement (Plr) de l’exercice 2021 en considérant qu’une bonne analyse sous l’angle de la sincérité du premier ne pourrait se faire sans le second. Sur le contexte d’élaboration du projet de Lfi 2023, ils ont jugé plus inquiétant les facteurs internes comme la corruption, le train de vie élevé de l’Etat et les contournements à la réglementation sur les marchés publics. Enfin, des députés ont appelé à «une meilleure coordination» entre les services des deux ministères, afin de disposer des mêmes informations.
Ndèye Maguette SEYE