L’Association nationale des kinésithérapeutes du Sénégal a fait face à la presse, hier. Il s’agissait de dénoncer la prolifération des salons de massage clandestins. Et, par la même occasion, inviter l’Etat à fermer immédiatement ces officines qui, selon eux, opèrent dans l’illégalité.
L’affaire du viol présumé opposant le leader de Pastef/Les Patriotes Ousmane Sonko à la masseuse Adji Sarr a fait sortir les kinésithérapeutes de leur réserve. Faisant face à la presse, hier, le président de leur association, Dr Cheikh Seck, et ses collègues ont fustigé ces salons de massage qui poussent comme des champignons dans la capitale sénégalaise. Pour Dr Seck et Cie, il y a un problème par rapport à l’exercice de cette profession. Car, la kinésithérapie souffre de plusieurs maux notamment l’exercice illégal, l’absence d’un code et une réglementation vétuste. Et puisque la nature a horreur du vide, le métier en est parasité, d’après eux, par des soi-disant masseuses clandestines qui ouvrent des salons à tour de bras. «Aujourd’hui, l’absence d’un code de santé a ouvert la voie à toutes sortes de dérives», constatent les spécialistes du corps. Qui rappellent que le décret de 1953 avait défini, de façon très claire, que l’acte de massage est exclusivement réservé aux masseurs kinésithérapeutes. Donc, ils considèrent que c’est un acte de soins. Et c’est un agent de santé spécialisé qui doit le faire. Ils disent n’avoir pas attendu cette histoire de viol qui met en cause l’homme politique Ousmane Sonko et la masseuse Adji Sarr pour interpeller les autorités sur le nécessaire encadrement de ce métier. Depuis 2012, disent-ils, ils n’ont cessé de d’alerter les autorités. Pour preuve, ces kinésithérapeutes disent détenir copie des correspondances qu’ils ont adressées aux différents ministres qui se sont succédé à la tête du département de la Santé. Mais, personne n’a daigné aller vérifier ce qui se passe derrière les rideaux de ces salons de massage. «Dans le système de santé, un malade ne peut pas être pris en charge seul. Il faut impérativement que plusieurs acteurs interviennent. Malheureusement, en ce qui concerne les kinésithérapeutes, nous sommes en nombre insuffisant. Ceux qui exercent dans les structures sanitaires font moins de 80 spécialistes. Et si on se base sur le ratio de l’Organisation mondiale de la santé (Oms), nous sommes très loin de ce qu’on devrait avoir comme nombre de spécialistes au Sénégal. Aujourd’hui, il y a des régions du pays qui ne disposent d’aucun kinésithérapeute et toutes les affections qui devraient nécessiter une rééducation sont référées à Dakar», dénoncent ces spécialistes.
Pas de tarif à 200 mille francs
Sur les tarifications dans le public, Dr Cheikh Seck et ses collègues ont tenu à apporter des rectificatifs. Pour eux, il n’y a pas de séance de massage qui est facturée 200 mille F Cfa. «Peut-être que c’est la compréhension qui n’a pas été bonne ou bien l’expression qui n’a pas été bonne. Donc le service public offre un tarif moins cher, parce qu’il est défini par un arrêté ministériel», prescrivent-ils.
Avant d’ajouter : «Il faut savoir que, pour le mal de dos, il y a un certain moment où le massage est interdit. Aucun kinésithérapeute ne peut faire un massage à un patient sans, au préalable, lui faire un bilan. En même temps, les malades qui viennent vers nous ont déjà leur diagnostic bien établi par leurs médecins traitants. Cela peut être le rhumatologue, l’orthopédiste etc. Donc avec un spécialiste, le patient ne court aucun danger, contrairement à ces salons».
En plus d’avoir décrété, hier, une «journée morte» sans kinésithérapie dans toutes les structures sanitaires, Dr Cheikh Seck et ses collègues n’excluent pas de démissionner tous de la Fonction publique si, avertissent-ils, l’Etat ne met pas fin à la pagaille qui règne dans le secteur.
Samba BARRY