Le gouvernement s’apprête à déposer sur la table de l’Assemblée nationale un nouveau code gazier pour, dit-il, une bonne gouvernance des ressources. Interpellé sur la question, le Coordonnateur régional Afrique de l’ouest de l’Ong «Publier ce que vous payez», Demba Seydi, a émis des réserves sur la pertinence d’une telle loi. Mieux, il dénonce l’excès de pouvoir, dans les textes et loi, du président de la République.
Un code gazier devra remplacer les dispositifs concernant le gaz dans le code pétrolier qui est en gestation. Seulement, la pertinence de cette nouvelle loi soulève des interrogations auprès de certains acteurs de la société civile. C’est le cas de Demba Seydi, coordonnateur régional Afrique de l’Ouest de l’organisation non gouvernementale, «Publiez ce que vous payez». Ce dernier qui intervenait sur la gouvernance des ressources extractives estime qu’il y a un excès de pouvoir qui a été attribué au président de la République ainsi qu’aux acteurs étatiques impliqués directement comme les ministères. Selon lui, malgré les efforts de gouvernance qui peuvent favoriser la transparence dont l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (Itie), cet excès de pouvoir dans les textes ne favorise pas la bonne gouvernance. A l’en croire, cela peut être susceptible de favoriser des actes de corruption dans le secteur. Ensuite, poursuit-il, ce sont des acteurs qui agissent généralement de façon très isolée et qui ont des agendas parfois politiques qui ne correspondent pas forcément aux besoins réels des populations. «Il y a un certain nombre de problèmes liés à l’élaboration des textes. D’abord, c’est l’approche. Elle n’est pas inclusive et participative. Parce que, nous considérons que le meilleur texte de loi, quel que soit le secteur, c’est le texte qui fait le consensus de la majorité des populations sur la base des consultations qui sont organisées. Que ce soit les acteurs de la société civile, les populations à travers le parlement et les collectivités territoriales», a relevé M. Seydi. Qui déplore également que les textes élaborés au Sénégal soient laconiques. En réalité, regrette-t-il, ce sont des phrases qui sont du fourre-tout. «Il n’y a pas de détails qui permettent au moins à chaque acteur de savoir jusqu’où s’arrête son rôle. Cela constitue un réel problème notamment, dans le secteur extractif où beaucoup d’articles et codes renvoient à des arrêtés. Ce qui donne au président de la République encore beaucoup plus de pouvoirs d’agir et pas souvent forcément au bénéfice des populations. Cela reste problématique par rapport à nos textes», s’offusque-t-il.
Des démarches qui ne sont pas sans conséquences. Car, explique-t-il, au moment de la mise en œuvre, le texte n’étant pas clair, l’Etat ne définit pas clairement les moyens de mis en œuvre de ces textes et lois. Parce que, s’insurge-t-il, il n’y a même pas un plan opérationnel de la mise en œuvre de ces lois. Pis, Demba Seydi révèle que le cadre institutionnel qui est chargé de pouvoir garantir la mise en œuvre de ces lois est souvent déficitaire. «Souvent, ce sont des institutions qui n’ont pas les moyens d’exercer correctement le travail ou bien elles n’existent tout simplement pas dans l’exercice de leur fonction et les conséquences, c’est que du point de vue économique et financier, nous nous sentons léser. Cela redonne beaucoup plus de pouvoirs à un groupe d’individus et malheureusement qui peuvent être exposés à des situations de corruption, de concussion ou de toute autre délit connexe», clame-t-il. Par ailleurs, il se désole de l’absence de l’ensemble des acteurs dans l’élaboration du nouveau code gazier. Ce qu’il considère comme une première erreur. «Comparer aux autres lois qui ont été adoptées au Sénégal, la loi sur le gaz n’a pas été communiquée en réalité. On s’est réveillé un beau jour pour nous dire que le Sénégal va adopter une loi sur le gaz. C’est un problème. Je ne vois pas la pertinence de séparer la loi gazière de la loi pétrolière. Ce sont deux secteurs très connexes, très liés. C’est généralement les mêmes acteurs qui agissent dans ce milieu. A quoi bon créer un code gazier ? Surtout que la majorité des gisements gaziers ont été déjà attribués sur la base de la loi sur le pétrole. Est-ce que cela signifie qu’on va casser ces contrats qui sont attribués sur la base du code pétrolier. Donc, cela crée totalement un flou pour les années à venir étant donné que les contrats et les clauses qui sont déjà consignés, la nouvelle loi ne va pas s’appliquer à ces contrats», a-t-il conclu.
Adama COULIBALY