Il est parti comme il était venu. Mais, c’est moins le temps passé avec ses militants que son silence qui intrigue l’opinion. Car, tel un zombie, Abdoulaye Wade est resté muet de Sédhiou à Ziguinchor. Un silence assourdissant qui laisse la place aux commentaires.
(Correspondance) – Son arrivée était annoncée pour dimanche matin. Mais, c’est finalement à 21 heures que le Pape du Sopi a foulé le sol de Ziguinchor. Il s’agissait d’une visite très attendue dans une ville où la puissance du Parti démocratique sénégalais (Pds) appartient depuis des années à l’histoire. En quittant les siens en 2012, le maire de Ziguinchor, Abdoulaye Baldé était parti avec presque toute la base du Pds, réduisant le Pds à sa plus simple expression. Depuis lors, Wade n’était plus venu à Ziguinchor. Avant-hier, le chef de file de la Coalition gagnante Mankoo Wattu Sénégal était attendu par les membres de son parti. Ou, plutôt, ce qui en reste. Ces derniers ont réservé un accueil nocturne chaleureux à leur leader. Seulement, il est loin derrière, le moment où Wade haranguait les foules avec ses discours parfois provocateurs. Les nostalgiques des envolées verbales du vieil opposant qu’il était et qu’il est redevenu depuis l’alternance de 2012 ont dû se rendre à l’évidence. Ce n’est plus le même Abdoulaye Wade qu’ils ont retrouvé. Certainement fatigué par le poids de l’âge et épuisé par les deux semaines de campagne électorale qui l’ont mené un peu partout dans le pays, le vieux tribun a perdu son verbe. Devant ses inconditionnels qui l’ont attendu le temps qu’il fallait, le secrétaire général du Pds n’avait que ses mains pour s’adresser à la grande foule massée à la place Aline Sitoé Diatta.
Cette attitude a été la sienne depuis Sédhiou et même avant. De la capitale du Pakao à Ziguinchor, les militants n’ont eu droit qu’à quelques balancements de mains de la part de quelqu’un qui les avait habitués à mieux et à plus que ça. Mais, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis lors. Dimanche, Wade est venu à Ziguinchor, a salué les militants et autres curieux avant de prendre la direction du Balantacounda. Comme Ziguinchor, Goudomp a accueilli un leader sans voix. «Surpris mais pas déçu, parce que cela fait longtemps que nous attendions ce moment de communion avec notre guide», lance un inconditionnel du vieux. Derrière ce soulagement se cache un remords, celui de voir ce grand homme exposé aux rigueurs de la campagne électorale. «Je voulais vraiment voir mon leader. Mais, il est parti en laissant en moi un sentiment de remords comme si c’est moi qui suis responsable de son implication dans ces élections. Wade ne mérite pas ça. J’ai eu très mal en le voyant ainsi sans voix», regrette un contemporain des grandes virées électorales des années 1980 de Wade. Comme ce militant nostalgique d’un passé où le Pape du Sopi respirait la forme, l’immobilisme verbal du prédécesseur du Président Macky Sall pendant son séjour Ziguinchorois intrigue. Ses militants du sud se contenteront donc de la présence physique d’un leader qui a marqué l’histoire politique du Sénégal, mais qui refuse de capituler.
Walf quotidien