La loi sur la présence de l’avocat dès l’interpellation suscite craintes et interrogations auprès du Forum du justiciable. Adopté par le Conseil des ministres de l’Uemoa le 25 septembre 2014, ce règlement n°5 est relatif à l’harmonisation des règles régissant la profession d’avocat, dans l’espace Uemoa. Il prévoit, en son article 5, que «les avocats assistent leurs clients dès leur interpellation, durant l’enquête préliminaire, dans les locaux de la police, de la gendarmerie, ou devant le parquet. A ce stade, aucune lettre de constitution ne peut être exigée de l’avocat». Entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2015, cette nouvelle disposition est désormais officielle au Sénégal, car insérée dans le corpus législatif, avec le vote, par l’Assemblée nationale, du projet de loi (numéro 26/2016 du 21 juillet 1965) portant réforme du Code pénal et du Code de procédure pénale, vendredi dernier. De quoi susciter des inquiétudes auprès du Forum du justiciable, par le biais d’un communiqué publié, hier. «Quelle est la classe sociale qui peut se payer les services d’un avocat dès les premières heures de la garde à vue ?», s’interroge-t-on dans le document. Tentative de réponse de l’organisation en question : «Certainement la classe sociale qui a les moyens de ses ambitions. Lorsqu’on est riche, tout est plus facile, on jouit d’une sorte de respectabilité sociale, on peut mieux se loger, s’habiller, se soigner et on peut aussi et surtout mieux se défendre dans la vie, en général et dans la Justice en particulier».
Pour le juriste Babacar Bâ, président du Forum du justiciable, il est évident que cette mesure profitera uniquement aux nantis et non à la couche sociale démunie, cette couche sociale qui n’a pas les moyens de se payer les services d’un avocat. Selon lui, devant une telle situation, force est de constater que «ce système juridique est aussi injuste pour les pauvres, même si cela ne s’exprime pas du tout de la même manière». «Il serait plus judicieux de penser aux pauvres en élargissant la commission d’office d’un avocat pour ceux qui n’en ont pas les moyens. Cette couche sociale qui peine à joindre les deux bouts doit pouvoir être assisté d’un avocat au cours des diverses phases de la procédure (garde à vue, instruction, audience de jugement)», relève le communiqué. La même source ajoute que l’exercice de cette faculté doit être effectif, ce qui implique, par exemple, que le mis en cause (pauvre) puisse communiquer dans une langue qu’il comprend mais également qu’il puisse se défendre convenablement.
Walf Quotidien