Les forces de sécurité éthiopiennes ont réprimé des manifestations dans les régions Oromia (centre et ouest) et Amhara (nord), faisant plusieurs dizaines de morts ce week-end. L’ONG Amnesty International fait état de 100 tués.
Le gouvernement éthiopien a violemment réprimé les manifestations antigouvernementales ayant eu lieu le week-end du 6 au 7 août, les forces de sécurité tuant plusieurs dizaines de personnes dans les régions Oromia (centre et ouest) et Amhara (nord). Amnesty International fait état de près de 100 tués et accuse la police d’avoir tiré à balles réelles sur des « manifestants pacifiques ».
« Selon nos informations, entre 48 et 50 manifestants ont été tués dans la région Oromia », avait déclaré pour sa part à l’AFP Merera Gudina, figure de l’opposition éthiopienne et président du Congrès du Peuple Oromo. « Ce bilan pourrait être beaucoup plus élevé car il y a de nombreux blessés » par balle, a-t-il précisé.
Une source diplomatique en poste à Addis-Abeba, interrogée par l’AFP, a, elle, rapporté un premier décompte partiel de 49 morts pour les deux régions, Oromo et Amhara.
Plusieurs rassemblements dans la région
Les manifestations, aux motifs différents, avaient pour point commun une dénonciation de l’accaparement de l’appareil d’État par des responsables essentiellement issus de la région du Tigré.
Les manifestants d’Amhara s’étaient réunis pour protester contre l’imposition de projets d’expropriation de terres agricoles, tandis que ceux d’Oromia exigeaient la libération de personnes arrêtées lors de précédentes manifestations, elles aussi en réaction à un projet similaire. Plusieurs rassemblements ont eu lieu dans l’ensemble de la région Oromia, y compris à Addis-Abeba.
Samedi matin, environ 500 Oromo s’étaient rassemblés sur Mesqel Square, la place centrale de la capitale. Les mains croisées au-dessus de la tête en signe de protestation, les manifestants ont été violemment dispersés par les forces de sécurité. Certains d’entre eux ont été arrêtés et embarqués dans des camions de police. Dimanche, le mouvement s’est poursuivi dans la région Amhara.
Ailleurs dans la région, la répression a été plus sanglante, notamment dans la localité de Nekempte, où les forces de sécurité ont ouvert le feu sur la foule.
Le lendemain, les forces de sécurité ont usé de la même violence dans la région Amhara. Selon Amnesty, au moins 30 manifestants ont été tués dimanche dans la seule ville de Bahir Dar (nord), la capitale régionale où plusieurs milliers de personnes avaient pris part à la manifestation.
Réseau internet bloqué
Pour le moment, aucun bilan n’a été communiqué par le gouvernement éthiopien concernant ces événements. Vendredi, le Premier ministre éthiopien Haile Mariam Dessalegn avait annoncé l’interdiction des manifestations « qui menacent l’unité du pays ». Il avait autorisé la police à utiliser tous les moyens nécessaires pour appliquer l’interdiction.
Les autorités éthiopiennes ont bloqué samedi le réseau internet dans l’ensemble du pays ainsi qu’une partie des réseaux téléphoniques. Le réseau internet était de nouveau accessible lundi matin dans la capitale.
Une contestation violemment réprimée depuis 2015
En novembre 2015, un projet d’extension de la capitale s’était heurté à une contestation massive, réprimée brutalement à plusieurs reprises. L’ONG Human Rights Watch avait fait état de plus de 400 morts dans les manifestations antigouvernementales qui s’étaient déroulées fin 2015.
Bien que le gouvernement ait finalement abandonné les réformes contestées, ce recul n’aura pas suffi à apaiser les tensions qui ont surgi de cette affaire. Groupe ethnique le plus important du pays, la communauté Oromo dénonce les politiques du gouvernement d’Addis-Abeba, plus favorables aux deux autres grandes communautés du pays, les Tigréens et les Amhara.
Jeuneafrique