Plus de huit mois après les faits, l’affaire Babacar Guèye piétine. Selon une source proche du dossier, deux policiers ont porté plainte pour tentative de meurtre contre ce jeune Sénégalais abattu de cinq balles début décembre.
Dans la nuit du 2 au 3 décembre 2015, un jeune ressortissant sénégalais de 27 ans, Babacar Guèye, est abattu de cinq balles par une unité de la Brigade anti-criminalité de Rennes lors d’une intervention au domicile de l’un de ses amis. Selon la version du parquet, les fonctionnaires de police auraient tiré pour neutraliser un individu qualifié d’agressif. Une version contestée par la famille de Babacar Guèye ainsi que par le témoin direct du drame. Selon eux, le couple d’amis de la victime a alerté la police après que le jeune homme, pris d’une crise d’angoisse en pleine nuit, a tenté de se mutiler avec un petit couteau à pain. Pris de panique à l’arrivée des forces de l’ordre, il refuse de lâcher le couteau. Les policiers, pourtant en nombre, échoueront à l’immobiliser dans l’appartement après avoir manqué un tir de Taser et l’abattent de cinq balles dans la cage d’escalier de l’immeuble.
Deux enquêtes sont alors diligentées. L’une d’elles est confiée à la police judiciaire, l’autre à l’IGPN pour déterminer les circonstances qui ont conduit les fonctionnaires à faire un tel usage de la force. Contacté par Jeune Afrique à plusieurs reprises pendant les mois qui ont suivi, l’avocat de la famille de la victime, Me Abdoulaye Barry, déplorait ne pouvoir accéder au dossier, ainsi qu’aux analyses toxicologiques de la victime. Une source proche de l’affaire contactée par Jeune Afrique dénonce aujourd’hui « une enquête menée à charge contre Babacar Guèye ». Le Sénégalais, dont les analyses toxicologiques ont révélé qu’il n’était sous l’influence ni de l’alcool ni d’aucun psychotrope, a fait l’objet d’une plainte de deux policiers pour tentative de meurtre. « Ca a permis de mener une enquête à charge contre Babacar Guèye et de la classer sans suite puisqu’on ne peut pas poursuivre un mort », explique la source. De son côté, la famille de Babacar Guèye a déposé une plainte auprès d’un juge d’instruction pour homicide volontaire.
« Il s’accrochait malgré tout »
Babacar Guèye était arrivé en France en 2014 sans visa après avoir passé huit mois au Maroc. Et comme beaucoup d’immigrés en situation irrégulière, son quotidien en France a été semé d’embûches, notamment pour trouver un emploi et une certaine stabilité. « Il s’accrochait malgré tout. Il participait à des ateliers d’apprentissage du français, à un atelier de danse salsa qu’il devait bientôt animer et donnait des cours de danse africaine » confiait il y a quelques mois l’un de ses proches à Jeune Afrique.
Avec Jeune Afrique