Jeudi 21 décembre, le gratin de la Majorité a battu le rappel des troupes pour investir officiellement son candidat, Amadou Bâ. Le 29 novembre, pour tuer la rumeur qui se faisant insistante sur un probable report de la Présidentielle de 2024, le président de la République a signé le décret de convocation du collège électoral. Un alignement presque parfait des planètes pour la tenue d’une élection dans deux mois. Toutefois, le mystère demeure toujours sur le nom de ceux qui vont participer à ce scrutin, le premier du Sénégal indépendant qui ne verra pas le Président sortant participer. Pourtant deux cents soixante-sept (267) Sénégalais se sont présentés à la Direction générale des élections (Dge) pour le retrait de leurs fiches de parrainages. Parmi ceux-ci, aucun n’est à 100% sûr de voir sa candidature passer comme lettre à la poste. Un ensemble de conditions/obstacles ont été posées par le législateur. Entre autres, il s’agit d’être de nationalité exclusivement sénégalaise, de jouir de ses droits civiques et politiques, d’avoir 35 ans, au moins, 75 ans au plus, le jour du premier tour de scrutin, de disposer d’un certain nombre de parrainages (populaires ou parlementaires), déposer une caution de 30 millions Cfa à la Caisse de dépôts et de consignations, disposer d’un quitus fiscal, etc.
S’il est aisé pour certains de satisfaire quelques-unes des exigences légales, il est, en revanche, difficile pour certains autres d’être aux normes. Chacun des candidats les plus en vue a une épée de Damoclès suspendue sur sa tête. C’est le cas de Ousmane Sonko, condamné par contumace dans le dossier Adji Sarr. Un débat juridique sur l’existence ou la désuétude de cette contumace se pose de plus en plus dans l’espace public où sachants et non sachants y vont de leurs commentaires. D’aucuns soutenant que la contumace tombe dès lors que le leader du Pastef dissous est arrêté ou écroué -ce qui est le cas actuellement- qu’importe la procédure. En face, il leur est rétorqué que la contumace ne tombe que quand le contumax est arrêté dans le cadre de la procédure pour laquelle il a été condamné par contumace.
En attendant que le dossier soit vidé par les juridictions compétentes, son mandataire national, Ayib Daffé, fait le pied de grue à la Direction générale des élections où il espère se faire remettre les fiches de parrainages de son mandant, actuellement dans les liens de la détention. Ce, malgré deux jugements d’instance (Ziguinchor puis Dakar) qui lui sont favorables. L’Etat, à travers son Agent judiciaire, et ses avocats avancent à pas de caméléon pour une forclusion du candidat déclaré de Pastef. Ce dernier, par principe de précaution, avait joué la carte de la prudence en faisant parrainer Bassirou Diomaye Faye, lui-même en prison et à qui les affidés du pouvoir dénient, même avec sa présomption d’innocence, toute capacité de candidater. Leur argument ? Le parti qui porte sa candidature a été dissous et, du coup, n’a plus la capacité juridique de porter une candidature. Voilà où on en est dans le camp de Ousmane Sonko.
Chez Karim Wade, l’horizon n’est guère plus dégagé. Condamné par la Crei à une peine de prison ferme pour laquelle il a obtenu une grâce présidentielle et à une amende de 138 milliards, le candidat déclaré du Pds s’est lancé dans la course aux parrainages et a même reçu quittance de sa caution. Mais, Karim Wade pourrait se voir opposer le non acquittement de sa condamnation pécuniaire à verser dans les caisses du Trésor. Ses partisans se gargarisent partout de ce que le fils de Wade n’a pas versé un centime à l’Etat, signe, selon eux, qu’il ne se reproche rien. Mais, attention à l’effet boomerang, l’Etat étant fondé à lui opposer ce défaut de paiement. S’y ajoute que Karim Wade n’aurait pas renoncé à sa nationalité française. Une renonciation juridiquement impossible, vu que, de facto et de jure, il en jouit du fait de sa naissance sur le sol français.
Quant à Khalifa Sall, bénéficiaire de la grâce présidentielle sur la peine privative de liberté, il se dit qu’il a payé son amende dans le dossier de la caisse d’avance de la Ville de Dakar. Toutefois, il y a une semaine, face aux journalistes, son lieutenant Barthélémy Dias qui a vu sa condamnation en appel confirmée par la Cour suprême dans le cadre du long feuilleton judiciaire du meurtre de Ndiaga Diouf, pense que, en réalité, ce qui est visé, c’est la candidature de Khalifa Sall. L’astuce consistant à le déchoir de son mandat parlementaire. Ce qui ferait un député de moins si le candidat de Taxawu Sénégal devait recourir au parrainage par les députés.
Trois exemples, parmi d’autres, pour montrer que, aujourd’hui, la seule certitude, c’est que Macky Sall ne sera pas candidat et que même son poulain, Amadou Bâ, pas tout à fait certain du parrainage populaire, malgré la communication du pouvoir, agite, en sous-main, l’éventualité d’un parrainage parlementaire au cas où celui citoyen ferait flop.