La situation est inquiétante dans la commune de Rufisque où les habitants sont comme condamnés à mourir. Le district sanitaire, avec le cumul de 546 cas positifs, au 31 janvier 2021 dont 320 communautaires et 222 cas secondaires avec 21 décès enregistrés, semble très préoccupé par la situation. Ce qui n’est pas le cas des populations qui lâchent du lest et refusent de mettre le couvre nez.
Si vous portez un masque à Rufisque, vous êtes vu comme un étranger ou un extraterrestre. Tellement les regards des passants sont braqués sur vous. Vous êtes défigurés de la tête au pied, avec un sentiment de mépris comme si vous aviez commis quelque chose de grave. En effet, à Rufisque, le masque est devenu une chose rare. Dans la rue, peu de piétons en portent. D’habitude, ce sont les plus jeunes qui portent des masques. En quittant Dangou, nous traversons le pont du Ter, près de la mosquée dite mosquée Toucouleur. Sur le passage, seuls les élèves des lycées Abdoulaye Sadji et Moderne portent le masque. Beaucoup d’adules rencontrés se faufilent entre les groupes de jeunes sans aucune mesure de protection. Ceux qui en disposent l’ont posé juste sur la face ou rabaissé sur le menton. Les plus disciplinés ont oublié de couvrir le nez. Beaucoup d’adultes interrogés disent avoir oublié leur masque à la maison. «J’étais pressé de regagner le travail et j’ai laissé mon masque sur la table», dit cet homme. «Je l’ai dans mon sac», dira cette autre femme qui, suite à notre interpellation, sort son masque et le porte.
Dans les véhicules, la situation est encore pire. D’habitude, les chauffeurs n’en portent jamais, sauf à la vue d’un agent des forces de l’ordre. «Dès qu’ils aperçoivent un policier, ils placent le masque. Après, ils l’ôtent», fait remarquer un témoin.
Dans un véhicule où le masque n’est pas exigé par les chauffeurs, c’est l’anarchie. Sur l’axe Darou Rahmane, un minicar rempli de passagers rallie la ville. Certains qui n’ont pas de place sont restés debout ou accrochés à la porte. Personne, à part ce professeur de mathématiques, ne porte un masque. Un accrochage est même évité de justesse quand un passager, en éternuant, a projeté de la salive sur l’enseignant masqué. «Je refuse des excuses et je demande que vous nous respectiez», s’exclame l’enseignant en colère et essuyant la salive du commerçant sur son visage. Ses excuses refusées, ce dernier garde le silence.
En quittant Gouye mouride, il n’est pas rare de rencontrer un adulte, masque à la main, traversant tranquillement la rue. Dans cet axe, également, les véhicules, souvent bondés, sont remplis de passagers qui ne portent pas de masque.
Dans les quartiers traditionnels comme Diokoul, Thiawlène, Dangou, il est très rare de rencontrer des adultes portant un masque. «Ici, on reconnait un étranger avec le masque», raillent des habitants.
Le couvre-feu n’est, également, pas respecté dans la commune de Rufisque où les boutiques baissent les rideaux aux environs de 23 heures, dans certains quartiers difficiles d’accès. A Arafat, au Nord-Est de Rufisque, des séances de thé sont même organisés devant des concessions. Il n’est pas rare de rencontrer des adultes assis dehors autour de la théière. Sans masque.
Najib SAGNA