En avril dernier, Edouard Philippe avait fixé l’objectif de réaliser «au moins 700.000 tests virologiques par semaine» contre le coronavirus. Deux mois plus tard, le nombre de tests hebdomadaires dépasse à peine les 200.000, selon Santé publique France. D’où l’inquiétude des laboratoires, qui se retrouvent avec des millions de tests inutilisés sur les bras. Bientôt périmés, ils pourraient devoir être mis à la poubelle.
C’est notamment la crainte du groupe de laboratoires Unilians, implanté dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. Après avoir massivement acheté des tests PCR (par prélèvement nasal) pour dépister le coronavirus, il voit les composants de ces tests se périmer un par un. «On aura plus de 40.000 tests que l’on ne va pas utiliser. Cela représente, en tout cas pour notre structure, un chiffre d’environ 700.000 euros», déplore ainsi à France Bleu Geneviève Ferret, directrice du laboratoire Unilians de Montbrison (Loire). Sans compter la perte liée à l’investissement alloué aux machines servant aux analyses.
Au total, ce serait des millions de tests inutilisés qui dormiraient dans les congélateurs de l’ensemble des laboratoires privés hexagonaux. «Nous utilisons seulement un tiers de nos stocks», indique à La Croix François Blanchecotte, président national du Syndicat des biologistes. Du côté du groupe Inovie par exemple, on réalise 10.000 tests par semaine en période de grosse activité, contre une capacité de 20.000 à 25.000. Chez Biogroup LCD, implanté dans le Grand Est et en Ile-de-France, c’est 30.000 par semaine, alors qu’il pourrait en effectuer jusqu’à 50.000.
Revendre des tests à l’étranger
Avec en toile de fond le risque de péremption des réactifs – qui coûtent 20 à 30 euros par personne – utilisés pour ces tests. En effet, certains périmeront dès le mois de septembre prochain. Impossible donc d’imaginer pouvoir les utiliser en cas de seconde vague à l’automne ou à l’hiver, comme le prévoient certains spécialistes. La loi interdisant de revendre ses stocks en France, les laboratoires tentent de trouver des débouchés à l’étranger, notamment en Amérique du Sud, où le coronavirus circule encore activement.
Du côté de l’Etat, on ne s’oppose pas à ces remises en circulation. «Il [l’Etat, NDLR] reste en contact avec les laboratoires de biologie pour garder une marge de sécurité et anticiper une éventuelle recrudescence des besoins», souligne la Direction générale de la santé à La Croix. Avec l’idée désormais de commander des tests avec des dates de péremption les plus lointaines possibles, pour éviter que la situation actuelle ne se répète.
CNews