CONTRIBUTION
Notre village planétaire est frappé de plein fouet par une foudroyante et effroyable pandémie. Un redoutable virus, le Covid-19, a mis à nu la vulnérabilité et l’impuissance des pays que l’on croyait socialement, financièrement, économiquement et militairement tout-puissants. Ce virus sournois, invisible, têtu et coriace nargue l’arrogante suffisance des plus riches et met à rude épreuve leurs difficultés à la résilience. Pour preuve, les USA qui sont la première puissance au monde, ont dénombré 1 200 morts en une seule journée. Auparavant, l’Espagne et l’Italie avaient respectivement fait un décompte macabre de plus 600 et 800 décès. Or jusque-là aucun vaccin n’est disponible et pire, aucun traitement n’est encore reconnu. Cette impuissance notoire à faire face au virus, devenue une menace transfrontalière, est d’ailleurs source de migraines chroniques et de pathologies invalidantes pour l’économie mondiale.
Quoiqu’il advienne, le monde globalisé restera à jamais un village planétaire. Il y aura encore et toujours mouvements des capitaux, des personnes et des biens. Les interconnections, les interactions et les interrelations sont irréversibles. La crise actuelle prouve à suffisance que nul ne peut arrêter la mer avec ses bras. N’en déplaise d’ailleurs aux égoïstes théoriciens de l’immigration choisie, non seulement insouciants et inconscients de la solidarité internationale mais froidement insensibles à l’interdépendance des communautés. Dans la mondialisation-globalisation, il y aura inévitablement une circulation indéterminée des virus et des microbes. Cette circulation des virus et microbes est intimement liée à celle des personnes et des biens. Dès lors, face à de telles menaces aussi imprévisibles que dévastatrices, il serait plus sage et plus responsable pour tout Etat-Nation de se prémunir. Dans sa politique préventive où une crise pareille à celle du Coronavirus fait plus ressortir l’égoïsme et le manque de solidarité des Etats les plus proches, l’Afrique doit moins attendre des autres qu’elle ne doit exiger d’elle-même. Les autres ne feront véritablement rien de durable à sa place. Le Covid-19 serait-il alors une opportunité pour se passer de l’aide fatale et de l’assistance tapageuse des Occidentaux ? Est-ce un mal nécessaire pour apprendre à mieux respirer en se passant volontiers de l’assistance respiratoire étrangère ? Ou encore une souveraineté à gagner pour se priver définitivement des somnifères et de la perfusion étrangère qui affectent si dangereusement la santé publique des Africains ?
Force est de reconnaitre que Les soleils des indépendances chantés par Ahmadou Kourouma avaient fait naître chez les africains l’espoir d’une renaissance et d’un renouveau prometteurs. Hélas, ces soleils à peine levés, se sont trop tôt pâlis, couchés. L’immense espoir suscité par l’accession des pays africains à la souveraineté internationale a vite viré au vinaigre du désespoir. Aucun panafricaniste de renom n’a survécu pour porter et entretenir durablement la flamme de l’espoir. Patrice Emérite Lumumba, Kwame Nkrumak, William Tolbert, Amílcar Lopes Da Costa Cabral furent sauvagement et prématurément éliminés avec une complicité étrangère. Des dictateurs aussi nuisibles les uns que les autres émergèrent, plombant pour des décennies le développement de l’Afrique. Parmi eux, force est de constater qu’Ahmet Sékou Touré, Francisco Macías Nguema, Joseph-Désiré Mobutu et Jean-Bédel Bokassa ont agi pire que les esclavagistes et les colons. Sous leur funeste magistère, les soleils des indépendances se sont transformés en éclipses solaires. D’autres tels Albert-Bernard Bongo et Félix Houphouët-Boigny ont participé avec les maigres ressources de leur pays, à la formation et à l’élection de dirigeants français.
Que retenir véritablement de la pandémie du Covid-19 ? Quelle place pour l’Afrique dans le nouvel ordre politique, économique, juridique et sanitaire mondial ? Sinon que l’Afrique a plus que jamais intérêt à œuvrer pour sa souveraineté intégrale. Mieux que tout autre continent, elle a ses multiples richesses du sol et du sous-sol. Elle a plus de terres arables que n’importe quel autre continent pour sa souveraineté alimentaire et pour être le grenier de la planète. Elle a son soleil qui lui est envié, ses alizés et ses harmattans enchanteurs, ses fleuves et lacs voies de navigation et sources d’énergies propres (photovoltaïques, éoliennes et hydrauliques). Ses belles plages au sable fin pour promouvoir le tourisme. Elle n’a pas besoin d’aumône et ses enfants ne sauraient servir de cobayes pour faire fi du Primum non noncere æ (D’abord ne pas nuire).
A-t-on jamais vu une épidémie ou une pandémie cibler les plus valeureux ou les plus prometteurs des hommes et femmes dans l’histoire de l’humanité? Aux africains de comprendre que l’esclavage et la colonisation ont fait plus de victimes que le SIDA et le Covid-19. Jamais une épidémie ou une pandémie n’aura fait autant de victimes africaines que les odieux crimes de l’esclavage et de la colonisation. Ces deux fléaux ont pris à l’Afrique ce qu’elle avait de meilleur par la déportation des ses hommes et femmes les plus valides et valeureux. Et pourtant elle tient bon. Suffisant pour que les africains se réveillassent de leur torpeur et de leur profond sommeil rétrogrades. Aujourd’hui plus que jamais, ils doivent rester éveillés, vigilants, pour apprendre patiemment et obstinément à se passer de l’aide intéressée et de l’assistance calculée des occidentaux. Ils doivent aussi se débarrasser de la perfusion chinoise et des somnifères de l’Occident.
En 60 ans d’indépendance, l’Afrique n’a-t-elle pas formé des élites qui font leurs preuves partout ailleurs ? Ces brillants chercheurs ne doivent-ils pas mieux que quiconque participer à la construction d’une Afrique souveraine et attractive ? Imaginez si les français avaient, peu avant les indépendances, découvert et exploité le pétrole et le gaz de pays comme le Sénégal où d’importantes réserves ont récemment été trouvées ! N’est-ce pas un signe, une chance inestimable à saisir pour renverser la fâcheuse et honteuse tendance de l’immigration clandestine ? Une chance providentielle pour prendre son destin en main sans contraintes extérieures imposées ? Une chance pour rehausser le niveau de la recherche scientifique dans les universités et instituts africains. Une chance pour transformer toutes les matières premières et tous les produits africains en Afrique. Une chance pour inverser à leur avantage et pourquoi pas pour équilibrer ou rendre excédentaire la balance commerciale africaine ? Une chance pour des universités d’excellence de renommée internationale. Des universités si attractives que mêmes les européens, américains et asiatiques tomberaient sous leur charme. Une chance immense pour que les africains produisent ce qu’ils consomment et consomment ce qu’ils produisent. Une chance pour une conscience panafricaine forte, avant-gardiste et prospective pour placer l’Afrique censée être le meilleur continent au cœur du monde des affaires.
Samuel SENE
Consultant-formateur
Ecrivain-chercheur
221 77 518 31 57