Si sa mise en service est saluée avec faste, il reste que le démarrage des activités de l’aéroport international Blaise Diagne provoque l’inquiétude à Ziguinchor.
Car, aujourd’hui, les populations doivent encore faire face à la tyrannie de la distance, du moins pour ceux qui ont l’habitude de prendre l’avion.
(Correspondance) – L’aéroport international Blaise Diagne a officiellement démarré ses activités avant-hier suite à une inauguration qui a pris les allures d’un événement international. Grâce à la magie de la télévision, la cérémonie a été suivie partout au Sénégal, mais, certainement pas avec le même enthousiasme. Car, à Ziguinchor, l’inquiétude a fini de se mêler à la satisfaction. La tyrannie de la distance s’est soudainement emparée d’une population qui a toujours vécu avec le sentiment d’être loin, très loin même de la capitale Dakar. Il y a quelques jours, le premier adjoint au maire de Ziguinchor était monté au créneau pour exprimer l’appréhension des citoyens du sud avec cette «délocalisation» qui n’est pas sans impact négatif. «Prendre l’avion à Ziguinchor, faire 45 minutes pour ensuite parcourir une quarantaine de kilomètres avant d’arriver à Dakar me paraît aberrant», se désole Seydou Sané. Selon lui, quand on prend l’avion, c’est pour faire une économie de temps et d’efforts. «Or, ce qui se passera désormais, c’est qu’on fera plus de temps pour rallier Dakar à partir de Diass que les 45 minutes nécessaires entre la capitale du sud et Dakar». Comme le premier adjoint au maire, beaucoup de gens qui ont l’habitude de prendre l’avion se montrent préoccupés. «La situation risque d’être difficile pour tout le monde. Imagine par exemple qu’on évacue un malade par vol. Une fois à Diass, on se retrouvera dans la contrainte de faire encore près de deux heures pour arriver à destination», déplore-t-on à Ziguinchor. Aussi, les usagers acceptent difficilement l’augmentation du coût du voyage inhérent au transfert de l’aéroport. «Il faudra encore faire des efforts financiers en prenant un taxi qui va vous déposer à Dakar», fait remarquer Seydou Sané qui juge déjà le prix de l’avion très cher. Tout cela, à son avis n’est pas de nature à favoriser le tourisme en Casamance. «Les touristes vont devoir débourser plus pour venir en Casamance. Ce qui peut les décourager et fragiliser du coup la destination», alerte-t-il. «Ce sont des contraintes qui viennent s’ajouter à celles qui étaient déjà là», regrette B. Sambou. Pour ce dernier, le transport va devenir plus contraignant pour ceux qui viennent de cette partie sud du pays, mais aussi, des autres régions de l’intérieur. C’est pourquoi, le gouvernement est invité à trouver une parade. L’alternative, de l’avis du premier adjoint au maire de Ziguinchor, c’est d’accorder une dérogation aux vols intérieurs. «En attendant de rendre beaucoup plus fluide le trafic entre Dakar et Diass avec notamment la mise en service du Train express régional (Ter), nous demandons au président de la République d’autoriser les vols en provenance de l’intérieur du pays de continuer à atterrir à l’aéroport Léopold Sédar Senghor de Yoff», dit-il. Plus qu’une simple demande d’une autorité municipale, il s’agit là de l’expression d’une préoccupation des populations qui vivent avec la hantise de la distance.
Mamadou Papo MANE