Dans une déclaration exclusive à l’émission Balance de Walf-Tv, qui sera diffusé ce soir à 21 heures, le secrétaire général du Syndicat des travailleurs de la Justice (Sytjust) parle, pour la première fois, du scandale à la Cour d’appel de Dakar. Une occasion pour Me El Hadji Boun Malick Diop de s’offusquer des poursuites sélectives opérées dans les rangs des seconds couteaux, à la place des vrais coupables.
Réaction très attendue du Syndicat des travailleurs de la Justice (Sytjust), au sujet du scandale de la Cour d’appel de Dakar. Une histoire de faux ordres de libération qui met sur la sellette un agent de cette juridiction à qui on reproche d’avoir fabriqué de faux documents pour faire libérer des détenus sénégalais et étrangers. D’emblée, le secrétaire général du Sytjust déplore la sélectivité des poursuites judiciaires engagées contre un des leurs. «Ce sont des faits d’une extrême gravité. C’est un vrai scandale. Nous n’en revenons toujours pas, mais la Justice doit mener une enquête approfondie et ne pas se limiter aux bouc-émissaires. Il faudra sanctionner tous les coupables parce que ça décrédibilise la Justice sénégalaise. Des détenus ont été libérés en toute illégalité alors que d’autres sont en train de purger leurs peines dans la dignité», a déclaré Me El Hadji Boun Malick Diop à l’émission Balance de Walf-Tv qui sera diffusé ce soir, à 21 heures.
Pour le greffier au Tribunal de grande instance de Fatick, ce scandale qui a conduit plusieurs personnes en prison a des relents de complicité, en raison du fait que les signatures de certains magistrats sont apposées dans les documents incriminés. «Au Sénégal, on a l’habitude de sanctionner des seconds couteaux en lieu et place des vrais coupables. Il faut qu’on fasse des investigations approfondies pour voir comment des gens ont osé faire de faux ordres de libération pour faire libérer des détenus. On a retrouvé les signatures de procureurs dans les faux ordres de libération. On doit faire une enquête pour voir si les signatures sont imitées ou scannées», confie Me Diop.
Interrogé sur les raisons à l’origine des fréquents scandales qui secouent la Justice ces derniers temps, le secrétaire général du Sytjust met à l’index les recrutements fantaisistes dans des postes clés au niveau des cours et tribunaux. «Plusieurs personnes n’ont pas leur place au tribunal. Sur ce cas, seul un travailleur de la justice est arrêté. La cause : des gens qui fréquentent le tribunal, juges et procureurs, en cas de grève ils font office de greffiers ad hoc. Ce sont des rats du palais qui font des actes que même les greffiers n’osent pas faire parce qu’ils ne sont pas formés à cela», déclare-t-il.
«Il ne faut pas se limiter aux bouc-émissaires»
Sans transition, il revient à la charge en déplorant le maintien d’agents retraités dans les juridictions. «Des gendarmes à la retraite sont toujours maintenus à leurs postes. On les retrouve comme secrétaires du parquet, des juges et des greffiers en chef et ils font office de greffiers ad hoc en cas de grève. Ce sont les auteurs de tous les grands scandales dans la justice. Le personnel judiciaire doit être qualifié et formé dans le traitement des actes de procédure, que ce soit les secrétaires de greffe, les agents administratifs et autres. Des gens qui n’ont pas le sens de responsabilités officient dans les plus hautes instances des juridictions. Pis, certaines personnes se font passer pour des avocats en rackettant les justiciables. Il faut faire un nettoyage au Palais de justice en donnant des badges d’indentification et des cartes d’accès au personnel. Il n’y a pas de sécurité au Palais de justice où on note des cas de vol, de cambriolage et autres».
Quant aux responsabilités, le syndicaliste met certains acteurs de la Justice au banc des accusés : «Comment se fait-il qu’un garde pénitentiaire retraité pendant six ans continue d’exercer à la Cour d’appel ? Pourquoi il y est maintenu ? Qui l’a maintenu là-bas ? Ce n’est personne d’autre que le procureur. Un retraité qui ose rester au parquet général pendant des années l’est selon le bon vouloir du procureur. Au Secrétariat du tribunal, on trouve des gens sans salaire qui sont des retraités maintenus dans les secrétariats des juges. Il en est de même pour un bénévole qui officie au greffe pendant des années, sans salaire. Il faut qu’on arrête d’arrêter les bouc-émissaires. Tous les grands scandales de la justice n’impliquent que très rarement des greffiers. Nous sommes conscients des dangers du métier parce que c’est un milieu à enjeux».
Pape NDIAYE