Entre les Sénégalais et leur banque, c’est une relation entre le pickpocket et l’usager de ce «Car rapide».
Sauf que, si ce dernier a la possibilité de traîner son bourreau devant un commissariat de police, tel n’est pas le cas pour le client, victime de pratiques bancaires. Malheureusement, l’Etat, qui devrait arbitrer entre le fort et le faible, laisse faire. La Bceao, elle, prend des mesures mais ne se soucie pas de leur application. Quant aux associations consuméristes, elles sont confinées dans un statut d’observateur passif, faute de moyens légaux d’interventions. Coup de projecteur sur une jungle où la puissance financière fait la loi.
Des taux démesurés et agressifs appliqués aux clients
Les demandeurs de prêts bancaires restent souvent la vache à lait des banques et des autres services financiers. Ces derniers, dotés de pouvoirs financiers ne lésinent point sur les moyens pour « arnaquer » les usagers. Ainsi, les financiers trouvent toujours des stratagèmes pour pousser les clients à s’endetter. Le plus souvent, les institutions financières profitent des rentrées scolaires, des fêtes de fin d’année et celles religieuses. Ce faisant, elles proposent selon les périodes des prêts à des taux démesurés, agressifs et ruineux. Et, avec les prêts, les banques ne se limitent pas uniquement au taux de remboursement, variant entre 6 et 7%. Une fois le prêt contracté, le processus de démolition, devant faire payer aux clients des taxes et des frais supplémentaires se passe le plus souvent sous silence. Au fur et à mesure que le client rembourse, il se rend compte qu’il verse plus qu’il n’a emprunté à la banque. Il découvre qu’il doit à la banque une taxe des intérêts de retard, de frais impayés, des intérêts de commissions, des commissions de retrait de guichet automatique de banque (Gab), des commissions de solde en Gab et une facturation. Ces multiples frais gonflent la dette du client envers sa propre banque. Il s’endette davantage sans s’en rendre compte. Depuis la libéralisation, les banques sont libres de fixer leur taux d’intérêt, tout en ne dépassant pas le seuil d’usure, accepté par le Bceao. Celui-ci, s’établit à 18% pour les banques et 27% pour les services financiers décentralisés (Sfd). Alors, beaucoup tombent dans le piège des banques et peinent à s’en sortir. Certains, faute de paiement perdent leurs maisons, véhicules ou font la prison. Saliou Diaw fait partie de ceux qui se disent victimes des banques. Il a fait un prêt de 500 000 Fcfa auprès d’une banque de la place. Ce dernier, garde toujours le goût amer de cette aventure. « Comme je voyais les publicités en longueur de journée, je pensais que c’était facile. Mais aussi, j’étais sous la pression de ma famille et celle de ma femme. Je voulais vraiment, pouvoir faire ce mariage sans difficulté financière. Mes difficultés ont commencé quand j’ai commencé à rembourser. Je me suis rendu compte que je dois plus que convenu », témoigne-t-il avec regret. A l’en croire, la Banque n’a pas seulement, prélevé le taux convenu. Mais, plus… Le hic, d’après notre interlocuteur, les banquiers ne donnent même pas le temps au client de bien lire les termes du contrat qui les lient. « Quelqu’un qui est dans le besoin n’a même pas le temps de voir le contrat. L’essentiel pour lui, c’est de pouvoir régler le problème auquel il fait face. Les banquiers qui ne laissent pas non plus le temps de s’imprégner des réalités du contrat sont contents quand un client est dans le besoin. Donc, c’est les yeux fermés qu’il procède à la signature du contrat. C’est un contrat très long, difficile à lire à cause de sa police. Il y a aussi des termes que personnes ne comprend à part les banquiers », a relevé M. Diaw.
Effets de la publicité mensongère
Dans la conquête d’une clientèle à enrôler dans le système, il semble prouver que les banques usent de tous les moyens pour épater ceux qui sont dans le plus grand besoin. Fréquemment, elles utilisent des publicités, dites mensongères pour attirer plus de victimes. Cette attraction accroche et marche bien. Puisque, de nombreux citoyens se retrouvent endettés jusqu’au cou. De son côté, Mariama Dieng, responsable dans une entreprise de la place soutient que les banques ne disent pas la vérité en matière de prêt. Elle, qui avait un projet de construction d’une maison ne savait pas qu’elle se trouvait dans un vaste piège de la banque contactée. « Je me suis présentée avec mon dossier, ils ont demandé des garanties et fixer le taux. Ce que j’ai accepté. Seulement, ils sont ensuite revenus avec plusieurs rubriques de paiement. Je ne comprenais plus rien. Ils ont dépassé le seuil convenu », a déploré notre interlocutrice. Pourtant, le demandeur de crédit doit s’intéresser à la convention qu’il signe avec la banque pour ne pas tomber dans le piège ruineux. Ce dernier, doit aussi chercher à maîtriser tous les contour , liés au prêt, dont les commissions qui sont jugées par certains faramineuses. Face à l’ampleur du phénomène, certaines organisations syndicales ont fait de la baisse drastique du taux lié au prêt bancaire leur cheval de Troie. Elles mènent une lutte acharnée pour que la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao) puisse mettre en place une règlementation, obligeant les banques à appliquer des taux en deçà de 18%. Selon certaines sources, le taux élevé s’explique par le fait que les banques ne tiennent et ne respectent nullement le principe d’annualité du taux d’intérêt. Alors que la Banque centrale (Bceao) a un taux minimum de soumission de 3% et un taux du guichet de prêt marginal de 4%.
Les banques ne veulent prendre aucun risque
De la signature de la convention de crédit à son paiement intégral, les banques écartent tout risque. Elles se sécurisent et exposent les clients aux risques. Ainsi, pour fixer le taux d’intérêt du crédit à rembourser, elles font payer au client plusieurs frais. Parmi lesquels, les frais de dossier, les primes d’assurance-vie, prime d’assurance pour perte d’emploi, les commissions d’engagement et le coût du risque. « Les banques ne perdent jamais. Elles mettent plusieurs barrières entre elles et les risques. Donc, c’est le client qui supporte tout », a expliqué Seydou Ndiaye. Il reste d’avis que les banques ne cherchent que le profit. Chaque banque a sa propre politique. Avec la concurrence qui devient de plus en plus rude, chacune d’elle cherche à faire le maximum de profit. Et, il semble que tous les moyens sont bons pour s’enrichir. Quid à ruiner toute la clientèle. « L’Etat qui doit protéger les citoyens ne joue pas pleinement son rôle dans la régulation du secteur financier. Il doit obliger les banques à appliquer des taux raisonnables », dixit notre interlocuteur. En outre, ce dernier déplore la manière, dont certaines institutions financières de la place ruinent leurs clients. A l’en croire, elles cherchent par tous les moyens à augmenter leur profit. « Elles sont comme des chiens affamés. Elles veulent par tous les moyens s’enrichir sur le dos de leurs clients. Certaines banques sont devenues même, avides du foncier, des immeubles et des voitures. D’ailleurs, ce sont ces biens qu’elles exigent en guise de garantie », se désole M. Ndiaye. En effet, les banques en octroyant du crédit tiennent compte du taux de base bancaire, en plus de la marge bénéficiaire pour fixer le taux d’intérêt du crédit qui sera contracté. De son côté, Babacar Diop estime que les banques continuent à s’enrichir sur le dos de leurs clients sans aucun motif valable et justifiable. « Rien que les frais de chèques, de retrait dans les Gab, les banques se font plusieurs milliards de Fcfa. Il n’y a aucun service dans les banques qui est gratuit malgré l’insistance de la Bceao à rendre certains d’entre eux sans frais. Mais, jusqu’à présent, les banques n’ont changé aucune de leurs règles. Et, personne ne parle de ce problème qui appauvrit les usagers », a lâché M. Diop.
Les institutions de microfinances dictent leurs lois
L’arnaque ne semble être seulement l’affaire des banques. Les institutions de microfinances, dont le taux est plafonné à 27% pratique cette gymnastique aux clients ou partenaires. Ces dernières appliquent régulièrement la méthode forte pour soutirer des fonds inestimables aux clients demandeurs de prêts. Elles ne mettent pas de gang pour recouvrer le crédit. Offrant de crédit avec un taux de 7%, selon le type de client et de prêt. Ces institutions, appliquant des taux supérieurs à ceux des banques déroulent la stratégie, pouvant ruiner du jour au lendemain le client. Une fois à termes, les institutions de microfinances saisissent, dans une impunité totale, les biens des clients sans ordonnance judiciaire, ni avec la présence d’huissier. « J’ai contracté un prêt de 3 millions au taux de 6,6% dans une institution de microfinance de la place. Celle-ci, m’a imposée des mesures auxquelles, j’ai été obligé de renoncer au prêt », témoigne une jeune commerçante, Ramatou Ngom. Elle voulait, relève-t-elle, développer davantage son activité. Elle prévient qu’aucune institution financière ne parle un langage de vérité. « Quand ils viennent dans les maisons, ils rendent tellement les choses faciles. Tu as l’impression que c’est presque gratuit. Elles savent épater les pauvres qui ont besoin d’argent pour survivre. Mais, à la fin, on se retrouve avec des soucis inexplicables », regrette la commerçante. Elle estime que la responsabilité de l’Etat, qui n’a rien fait pour réglementer le secteur, est largement engagée. « Les microfinances qui devraient contribuer à l’amélioration des conditions de vie des populations démunies, contribuent grandement à la dégradation de leur état de pauvreté. Donc, il faut être prudent », conseille-t-elle. Et, un tour auprès des usagers de microfinances, permet de se rend compte que ces dernières constituent des goulots d’étranglements. Même s’il a développé son activité économique, grâce à un financement d’un établissement de microfinance, Mar Ndiaye n’a plus confiance en ces multiples services financiers décentralisés. Selon lui, il y a une grande différence entre les premières institutions de microfinances et celles qui pullulent dans la capitale. « Avant, on pouvait avoir facilement un prêt sans beaucoup de contraintes. Mais, tel n’est pas le cas aujourd’hui, avec la batterie de mesures imposée. Je dirai même que ce sont des mesures contraignantes qui ne contribuent pas au développement, à la marche de l’économie nationale. Il y a trop de barrières entre ces institutions qui devront faciliter le développement économique des usagers », constate-t-il. Souvent, les agents des microfinances, chargés du recouvrement se permettent de descendre dans les maisons des clients pour saisir leurs biens.
Les Pme plus exposées à l’arnaque des banques
Dans cette stratégie des banques, les petites et moyennes entreprises (Pme) qui ont besoin d’accompagnement financier sont les plus exposées. En effet, ces dernières qui sollicitent des fonds pour développer leurs activités économiques paient plus cher que les particuliers. Les filiales des banques établies en Europe refusent de s’adapter à l’application de certaines pratiques bancaires, révolues en occident. Ce constat dérive d’un gérant d’une unité de production industrielle (Sarl) du nom de Maguette. Il s’agit pour lui, des dates de valeurs ou des délais d’imputation dans le compte, les frais de chèques, frais de forçage ou anticipation de quelques heures sur la solde et les pénalités sur le remboursement anticipé. « La pratique consiste à faire payer pour recevoir ton argent, à payer des commissions d’anticipation des paiements. Tout simplement, parce que tu es un bon payeur », se désole-t-il. D’après ce dernier, les agios restent trop élevés. « Ma banque me prélève 200 000 F Cfa par trimestre. Et lorsque, j’ai un découvert de 10 millions qui est le plafond autorisé, le prélèvement passe de 500 000 F Cfa. Nous avons constaté qu’il y a aussi, pour les particuliers, des frais de consultation en ligne de 5 000 F Cfa et de 11 200 F Cfa pour les Pme. Certainement, les agios sont énormes. Ce qui est regrettable demeure l’absence d’informations sur ces montants », proteste-t-il. Maguette signale dans sa comparaison le taux de crédits de 2 à 3% en France. Ce même taux avoisine au Sénégal les 12%. Ailleurs, d’autres entrepreneurs remettent en cause la supposée mission d’accompagnement des banques aux Pme. C’est l’avis d’Alassane, un jeune entrepreneur qui prévient sur l’existence de la panoplie de documents. « La banque demande comme garantie, en plus de l’attestation de revenu irrévocable, pour un simple découvert un titre foncier, un bail ou un véhicule de moins de 5 ans. N’empêche, le demandeur connaîtra des lenteurs avant de rentrer dans ses fonds. Et face cette situation, il est contraint étant prestataire, d’observer un énorme blocage pour le démarrage de ses activités. Alors que, nous pré finançons avant de recouvrir nos fonds à la livraison », regrette-t-il.
ENTRETIEN AVEC…
FAMARA IBRAHIMA CISSE, LE PRESIDENT DE L’ASSOCIATION DES CLIENTS ET SOCIETAIRES DES INSTITUTIONS FINANCIERES (ACSIF)
« Au Sénégal, il y a un vide juridique »
Interpeller sur l’arnaque des institutions bancaires, sur le taux promotionnel proposé aux clients, lors du grand évènement, le président de l’association des clients et sociétaires des institutions financières (Acsif), Famara Ibrahima Cissé soutient que les banques ne cherchent qu’à ruiner leurs clients. Cependant, il n’a pas manqué de pointer du doigt la responsabilité de l’Etat. Mais aussi, celle de la Banque centrale qui a failli à son rôle de régulateur du marché bancaire.
Walfadjri : Où en êtes-vous dans votre combat contre le refus des banques d’appliquer certaines mesures de la Bceao pour la gratuité de certains services bancaires ?
Famara Ibrahima Cissé : Vous savez, l’Etat du Sénégal a bancarisé depuis 2010 tous les avoirs des clients et des travailleurs. Depuis lors, nous sommes en train de mener un combat pour obtenir une bancarisation simple. Parce qu’il nous est donné de constater dans notre pays une floraison des institutions bancaires. Nous sommes aujourd’hui, à 24 banques et trois établissements financiers à caractère bancaire. Nous sommes aussi, à plus de 360 institutions de microfinances qui pullulent un peu partout. Nous sommes en train de mener un combat allant dans le sens de la baisse des taux d’intérêts, des agios, des frais de dossiers, produits et services bancaires. Nous avons pu obtenir, 19 mesures de gratuité que la Banque centrale a initiées et qui devaient entrer en vigueur depuis le 1er octobre 2014. Entre autres mesures, il y a les frais d’ouverture de compte qui devraient être gratuits, les frais de fermeture de compte, les relevés de compte que la Banque Centrale a demandé à ce qu’ils ne soient plus payés. Malheureusement, certaines banques refusent de manière catégorique de respecter ces mesures de gratuité. Nous sommes dans ce combat pour obliger ces institutions bancaires à respecter ces mesures de gratuité pour passer à la phase II. Parce qu’il était prévu deux phases. Une première phase qui devait concerner la gratuité de certains services bancaires et une seconde phase pour la baisse du coût de certains services bancaires. Nous avons déjà finalisé, négocié et validé la première phase. Il reste maintenant, à aller très rapidement vers la deuxième phase. Les banques sont en train de procéder à une lenteur. Il y a des tergiversations qui font que nous tardons à entamer la deuxième phase
Les banques en proposant des prêts à des taux préférentiels ne disent pas toute la vérité aux clients. Dans votre combat, qu’est-ce que vous faites en ce sens, pour sensibiliser davantage les usagers des banques ?
Nous sommes dans un combat contre la désinformation. Vous savez, entre le client et la banque, il y a un contrat, une convention qui est signée. Cette convention, malheureusement, elle n’est pas explicite. Parce que, si vous allez à la banque, le banquier ne prend pas la peine de vous faire lire la convention ou bien de vous lire la convention de manière explicite, conformément aux recommandations de la loi de la Banque centrale. Cette dernière, demande à ce que le banquier clarifie les termes de la convention au client. Et, nous avons observé que les termes ne sont pas clarifiés d’avance. Le jargon est tellement technique que le client n’est pas à même, de le déchiffrer. Il y a un flou de jargons. C’est pourquoi, dans un premier temps, nous avons demandé à ce qu’il y ait une harmonisation des vocabulaires bancaires. Ce qui tarde à se réaliser jusqu’à présent. La convention octroie la part du lion à la banque. Vous savez, les conventions devraient être des conventions gagnant-gagnant. Elles doivent profiter aussi bien à la banque qu’au client. Malheureusement, les conventions que nous avons dans nos banques sont exclusivement au profit des banques. Ce que nous avons toujours dénoncé. L’autre facteur, c’est la désinformation qui concerne la publicité mensongère. Faites un peu le tour de la ville de Dakar, vous verrez des plaques publicitaires, annonçant des taux promotionnels de 5,5% à 7 %. Il en est de même, dans les journaux et partout. C’est de la pure désinformation. Parce que les clients qui s’y engagent, après signature de la convention se rendent compte que le taux annoncé est diamétralement opposé au taux appliqué. Ce qui relève de la désinformation et de la publicité mensongère. Les fortes directives de la Banque centrale demandent à ce que le taux annuel effectif global figure sur toutes les plaques publicitaires et sur toutes les conventions de prêt. C’est ce taux qui devrait être annoncé. Ce que nous avons fait, c’est de mettre en place un site qui permettra à tout client de vérifier le taux qui lui est annoncé à travers un baromètre. Nous demandons à l’Etat de faire de sorte que la loi soit rude, vigoureuse pour sanctionner la publicité mensongère. Il faudrait que l’Etat du Sénégal mette en place un fonds pour payer les frais de procès des petits clients. Aujourd’hui, si vous portez plainte contre une banque, elle a la possibilité de prendre des sanctions vis-à-vis de vous. Parce que non seulement, vous lui avez donné des garanties. Elle a aussi, la possibilité de prendre un avocat pour tenir. Alors que, si la banque cause un préjudice au client, ce dernier n’a pas les moyens de prendre un avocat et d’ester ou d’intenter un procès. Pour aider ces clients, il faudra qu’il y ait la mise en place d’un fonds qui va permettre aux petits clients de supporter les frais d’un procès. Parce que, si vous contractez un prêt, il y a ce qu’on appelle la taxe sur les opérations financières ou bancaires qui revient à l’Etat du Sénégal. Malheureusement, elle ne sert pas au client. Nous avons dit qu’il faudrait que 0,01% soit octroyé à des associations des consommateurs comme la nôtre et qui va permettre à ces dernières, en cas d’un préjudice de la banque de permettre aux clients de bénéficier d’une manne financière qui va payer les frais de leurs procès. Comme cela se passe en France. Il y a une loi qui date du 23 décembre 1973. Celle-ci, sanctionne la publicité mensongère. Malheureusement au Sénégal, il y a un vide juridique.
Est-ce qu’il n’y a pas une part de responsabilité de l’Etat du Sénégal ?
Effectivement, il y a une responsabilité de l’Etat du Sénégal. Il y a même, une responsabilité citoyenne. Vous savez que nous avons interpellé à plusieurs reprises aussi bien, l’Etat du Sénégal que l’Assemblée nationale pour que des lois protectrices des clients soient votées dans notre pays. Notamment, la loi sur le délai de rétractation, qui permet au client, après la signature de la convention de bonifier de 15 jours pour se rétracter s’il le souhaitait. Une loi qui existe dans les pays civilisés comme la France, l’Allemagne protège en quelque sorte, les clients après la signature du contrat. Parce que, la banque ne vous permet pas de prendre la convention pour l’amener chez vous, la lire à tête reposée ou bien chercher l’avis d’un expert. C’est après la signature que les clients se rendent compte qu’ils ont été arnaqués et bernés. La loi ne permet pas aux clients de se rétracter ou bien de revenir sur la convention qui a été signée. Mais, si aujourd’hui, nous arrivons à adopter la loi sur le délai de rétractation, les sénégalais pourront bénéficier de quinze jours après signature pour voir s’il faut valider ou s’il faudrait se rétracter par rapport à la convention. Il y a aussi le délai de grâce. Un commerçant peut prendre un prêt aujourd’hui, le lendemain, le marché peut prendre feu. Alors qu’il avait contracté un prêt, en donnant des garanties comme sa maison. Maintenant, si le marché prend feu, c’est indépendamment de sa volonté. Malheureusement, dans notre pays, les banques astreint des clients dans de tels cas. Elles prennent leurs maisons, saisissent leurs voitures etc. Alors que dans d’autres pays, le client est placé sous la protection de la loi, celle sur le délai de grâce. Il peut bénéficier de 24 mois de délai de grâce. On ne dit pas qu’il ne doit pas payer le crédit. Mais, il va bénéficier d’une grâce de deux ans pour se refaire, avant de commencer à rembourser le prêt. Cette loi n’existe pas dans notre pays. Cette loi qui existe en France autorise les associations des consommateurs à intenter au nom de leurs adhérents une action judiciaire où se constituer partie civile au cours de l’instance pénale si, le préjudice concerne l’intérêt collectif. En d’autres termes, c’est une loi qui permet aux associations de consommateurs de constituer partie civile ou de porter plainte contre une institution bancaire. Je parlais de la publicité mensongère que nous constatons tous, l’association des clients de banques ne peut rien contre cette publicité. Parce que ; la loi ne lui autorise pas à intenter une action judiciaire ou de porter plainte. Mais, si cette loi existait, je pense qu’on n’en serait pas là. Les banques qui le font ne sont pas des banques nationales. Parce qu’il faut le préciser encore, le Sénégal ne détient pas, jusqu’au moment où je vous parle, de banques purement nationale. La banque où nous avons beaucoup d’actions, c’est la Banque de l’habitat (Bhs). Le Sénégal est à 40% d’actions. C’est cette banque qu’on appelle nationale, alors qu’elle n’est même pas nationale. Chez nous, il n’y a que des banques étrangères. Et, ces banques n’osent pas dans leur pays d’origine faire des publicités mensongères, faire des plaques d’annonce publicitaires de 5,5% etc. Mais, dans notre pays, ces banques s’autorisent à arnaquer les gens, en faisant des publicités mensongères. Cette loi de 1973 devrait être adoptée dans notre pays pour dissuader cette publicité mensongère qui, aujourd’hui, condamne le client dans les institutions bancaires. Parce que tout simplement, il ignore le taux appliqué.
Et, la mobilité bancaire ?
Les clients ne peuvent pas non plus quitter la banque. Pour quitter une banque au Sénégal, le client paie une faramineuse somme de 175 500 Fcfa. C’est un problème. Et, la question de la mobilité bancaire n’est pas réglée dans notre pays. Si vous voulez changer de banque, vous ne devez payer absolument rien. Malheureusement au Sénégal, vous payez une faramineuse somme. Vous payez une attestation d’engagement à 50 500 Fcfa, une attestation de non engagement encore de 50 500 Fcfa, des frais de pénalité de remboursement par anticipation. La responsabilité de l’Etat est tellement engagée. Parce que, si vous allez dans d’autres pays, le client est protégé dans la mobilité bancaire. Tout le monde sait que le client est tenu par deux banques. Sa banque d’origine et la banque d’accueil. Entre les deux puissances financières se trouve le client qui n’est pas protégé dans notre pays. Il y a aussi la question de surendettement qui n’est pas réglée. Dans d’autres pays, il y a la loi sur le surendettement. Il vous est donné de constater qu’à la fin du mois, des salariés qui vont pour prendre leur salaire se retrouve avec zéro franc. On leur dit qu’il ne vous reste plus rien ici. Ce qui est inacceptable et inadmissible. Et, c’est ce qui est une violation flagrante de notre code de procédure civile. Parce qu’il est clairement établi dans notre code de procédure civile, en son article 381 qui stipule que le « client, à la fin du mois doit avoir les 2/3 de son salaire ». La banque doit respecter une certaine quotité insaisissable. C’est une partie du salaire que le client ne peut céder et que le créancier ne doit prendre en aucun cas. Malheureusement, à la fin du mois, baladez-vous un peu dans les institutions bancaires, vous verrez des salariés qui ne peuvent pas accéder à leur salaire. Parce que tout simplement, la banque leur a tout pris. Ce qui est une violation flagrante de la quotité insaisissable. La loi sur le surendettement viendrait tout simplement régler définitivement ce problème. Et, surtout dissuader les créanciers véreux qui tenteraient d’absorber tous les salaires d’un client. L’Etat ne fait rien et la Banque centrale a failli à son rôle de régulateur du marché bancaire. Les Etats, il faut les comprendre aussi, le lobbying bancaire est très puissant. Ce qui fait que malheureusement, nos Etats ne font rien pour soulager les clients dans les institutions bancaires.
Est-ce que vous avez évaluez les pertes des clients dans les institutions bancaires ?
Les pertes sont énormes. Surtout, avec les saisies opérées par les institutions bancaires. Les saisies de maisons, de biens. Dans les institutions de micro finance, c’est encore plus grave. Parce que, sans ordonnance judiciaire, sans la présence d’un huissier, les institutions de microfinance sont en train de faire leurs lois. Elles se permettent de descendre dans les maisons des clients pour saisir dans l’impunité totale, leurs biens. Ce qui est une catastrophe pour notre pays. Les lois ne sont faites que par les institutions bancaires. Donc, les pertes sont énormes au niveau de la clientèle. Il faut considérer une chose, le meilleur client de la banque, c’est le surendetté. Si le client gagne de l’argent, la banque gagne de l’argent. Si le client perd de l’argent, la banque gagne encore de l’argent. Telle est la relation bancaire au Sénégal. Alors que sous d’autres cieux, la banque veille à ce que le projet du client qui a été financé soit une réussite. Malheureusement, dans nos pays, si la banque vous prête de l’argent, son seul souhait est que vous échouez pour saisir votre bien que vous avez eu à hypothéquer. La preuve, aujourd’hui, si vous contractez un prêt dans une institution bancaire, la banque vous demande des garanties. Si vous n’avez pas un bulletin de salaire ou une maison à garantir, la banque ne vous octroie pas le prêt. Ce qui est révélateur que ces banques ne cherchent qu’à saisir les biens de ses clients. Qu’il s’agisse de maison ou de voiture.
Dossier réalisé par Adama COULIBALY (Walf Quotidien)