Paul Kagamé menace la France d’une nouvelle rupture des relations diplomatiques si le pays relance l’enquête sur l’attentat contre l’ex-président Juvénal Habyarimana. “Si tout recommencer doit s’assimiler à une épreuve de force, eh bien, nous aurons une épreuve de force. » Cette mise en garde lourde de menaces est du président Paul Kagame. Dans un discours devant le Parlement, le président rwandais a implicitement menacé la France, lundi 10 octobre, d’une nouvelle rupture des relations diplomatiques à la suite de la décision par des juges français de relancer leur enquête sur l’attentat contre l’ex-président Juvénal Habyarimana, attentat qui a déclenché le génocide rwandais de 1994.
L’enquête relancée
Les juges français ont décidé de relancer leur enquête pour entendre l’ex-général Faustin Kayumba Nyamwasa, qui accuse l’actuel président Paul Kagame d’être l’instigateur de l’attentat contre M. Habyarimana. L’attentat contre l’avion de Habyarimana, le 6 avril 1994, est considéré comme l’élément déclencheur du génocide des Tutsis au Rwanda, qui a fait au moins 800 000 morts. Au Rwanda, une commission d’enquête a imputé l’attentat à des extrémistes hutus voulant se débarrasser d’un président jugé trop modéré.
En France, l’enquête ouverte à Paris après la plainte des familles de l’équipage, composé de Français, avait été close en janvier et une demande de non-lieu soumise par la défense de sept protagonistes mis en examen. La décision des juges de demander l’audition de l’ex-général Nyamwasa est susceptible d’ouvrir un nouveau délai de plusieurs mois.
Kigali veut tourner la page
« Après avoir trouvé que ce qu’ils cherchaient n’était pas là et ne reposait sur rien, je lis dans les médias que nous devrions tout recommencer », a lancé M. Kagame, avant de menacer de manière voilée d’une nouvelle rupture des relations diplomatiques. « Souvenez-vous, autrefois, lorsqu’au lieu d’aller chercher un visa à l’ambassade française, vous alliez dans une autre ambassade », a déclaré Paul Kagame. « Tout recommencer peut à nouveau signifier cela. » Les relations diplomatiques avec la France avaient été rompues, et l’ambassade de France à Kigali fermée, entre 2006 et 2009, à la suite de l’émission de mandats d’arrêt par un juge français contre des proches du président Kagame, soupçonnant un commando du Front patriotique rwandais (FPR, au pouvoir) d’être derrière l’attentat contre M. Habyarimana. « C’est la France qui devrait être sur le banc des accusés et être jugée », a lancé le président. Les autorités rwandaises accusent toujours l’armée française d’avoir été impliquée dans le génocide de 1994. Ancien chef d’état-major de l’armée rwandaise (1994-2002), M. Nyamwasa s’est réfugié en Afrique du Sud où il a fait l’objet d’au moins deux tentatives d’assassinat.
Le Point