L’emprisonnement de Karim WADE a-t-il suffi pour absoudre les «péchés» des anciens barons du régime de Me Wade ? Ou alors l’étau qui se serre et qui se resserre jusqu’à l’étranglement autour d’Aida NDIONGUE va-t-il suffire à redorer le blason de la CREI et raviver quelque peu la traque aux biens mal acquis, sans que les anciens collaborateurs de Me WADE ne soient inquiétés ?
La Cour suprême n’y est pas allée de main morte. Saisie par les avocats d’Aida NDIONGUE, pour atténuer la condamnation en sursis à défaut de l’annuler, la juridiction suprême a frappé fort, en condamnant la plaignante à un an de prison ferme et à payer une amende de deux millions F CFA. Et comme si cela ne suffisait pas, le juge ordonne la saisie de l’ensemble de ses biens. Ainsi, après avoir été purement et simplement relaxé, l’ancien maire des HLM a été condamné par la Cour d’appel de Dakar en avril 2016 à un an de prison avec sursis avant que la Cour suprême ne vienne anéantir ses deniers espoirs. Ce n’est pas seulement le verdict de la Cour suprême qui est sujet à commentaires, le dossier dans son intégralité relève d’une ineptie judicaire aux relents politiques qui déroute plus d’un observateur. L’affaire dont le traitement dure depuis que Macky SALL est à la tête de l’Etat, semble, de par ses nombreux rebondissements, avoir été concoctée pour assaisonner la traque aux biens mal acquis que Macky SALL a si chèrement vendue aux Sénégalais. En effet, pour une seule et même affaire, Aida NDIONGUE en aura vu toutes les couleurs. Poursuivie pour, notamment, «escroquerie et détournement de deniers publics» portant sur 20 milliards de francs CFA dans une affaire de construction de logements sociaux le fameux «Plan Jaxaay», Aida NDIONGUE a été relaxée deux mois après la condamnation de Karim WADE, après avoir passé 18 mois derrière les barreaux. Pendant que les fidèles de ce dernier disaient tout le mal qu’ils pensaient de la Justice sénégalaise, ses partisans jubilaient, magnifiant le travail des magistrats. Et maintenant que la libération en catimini du fils de l’ancien président de la République est perçue comme un enterrement de première classe de la traque aux biens mal acquis, la Cour suprême se rappelle avoir été saisie du dossier. Réagissant à ce verdict, Me Assane Dioma NDIAYE observait : « L’Arrêt de la Cour Suprême rendu dans l’affaire Aida NDIONGUE est aussi curieux qu’inédit. D’abord dans l’histoire judiciaire du Sénégal cette haute Cour s’est toujours gardée de rendre une décision autonome de condamnation. A juste titre, parce qu’elle n’est pas habilitée à apprécier des faits. Elle est juge du droit. Mais encore plus décisivement en condamnant à son niveau pour la première fois, elle viole le principe sacro-saint du droit au recours pour toute personne condamnée. Etant au sommet de la pyramide sa décision de condamnation est irrémédiable parce que insusceptible de recours ». La sévérité que laisse transparaitre la sentence sonne comme une piqûre rappel en l’endroit de ceux qui pensaient la traque terminée. Dans un communiqué, l’Union des indépendants du Sénégal (UNIS) se félicitait de «la décision juste et heureuse de la Cour suprême à récupérer les biens du peuple dans l’affaire Etat du Sénégal contre Aïda NDIONGUE». Et pour le chef de l’Etat qui a dernièrement lancé un célèbre «vous êtes ma grande sœur, vous êtes vraiment ma grande sœur… », tout est sur les rails. Même sa «grande sœur » peut-être condamnée et dépouillée.
Ce dossier a réussi la prouesse d’écarter Oumar SARR des débats. Alors que le 29 mai 2008, en signant l’Arrêté ministériel n° 5151 MUHHHA-PCLSLIB en tant que ministre de l’Urbanisme, de l’Habitat, de l’Hydraulique urbaine, de l’Hygiène publique et de l’Assainissement, il révélait être au cœur du «Plan Jaxaay». Il ne sera jamais réellement inquiété. Alors que lui qui comme Karim WADE et 23 autres personnalités du régime de Me Wade avaient été désignés par le procureur Alioune NDAO comme devant faire l’objet de poursuites judiciaires.
Pour tous ces ténors du régime de Me WADE contre qui Serigne Mbacké NDIAYE annonçait la prison en cas de défaite, Karim WADE semble les avoir remplacés en cellule. Car, s’il faut réellement poursuivre ceux de l’ancien régime qui s’en sont mis plein les poches, Aida NDIONGUE serait sans doute en fin de liste.
Mame Birame WATHIE