CHRONIQUE DE SIDY
Le Jardin céleste a fini, comme le monde qui l’a précédé, par basculer dans la désobéissance. Car avant le Jardin céleste, il existait celui des démons et des diables qui avaient instauré sur terre un système d’éternel recommencement qui voyait la construction toujours suivi d’une destruction. Ainsi, la gabegie s’était répandue de même que la criminalité et le sang coulait profusément. L’insécurité régnait partout. La crise s’en est installée sans solution envisageable. Ce qui poussa le démon et le diable à aller se réfugier dans le monde des anges et de s’inscrire dans une paix absolue où la violence de même que l’offense étaient à annihiler. Dans ce monde de sublimation et de sainteté, les éloges au Créateur étaient un refrain quotidien rythmant la vie dans toutes ses dimensions. Et c’est dans ces circonstances que l’humain parut, se révélant tel un serviteur à la disposition des anges tout comme des démons et des diables. Acceptant son sort, cet être finira par devenir l’élu, le choix pour un autre monde, celui du pardon. Mais, mis à l’épreuve, l’humain tombe, de par ses caprices et ses faiblesses, dans le péché et devait ainsi descendre sur terre. Ainsi, d’une situation confortable où tout était entre ses mains, il se précipitait vers une aventure pleine d’incertitude. Cette vie qui débuta dans un lopin de terre, la station de Arafat, devint un idéal à atteindre. Ici, la supériorité est reconnue au seul Créateur. Une nouvelle vie qui devait commencer ici-bas, pour finir, en jour, à l’au-delà. Une vie de rédemption pour un retour à la case de départ.
C’est alors qu’une confrontation s’est installée entre le vrai et le faux, le bien et le mal. La justice et l’injustice. L’affaiblissement et l’arrogance. La vie était devenue un vaste champ de bataille dans un cercle vicieux et pour un éternel recommencement.
Adan et Eve ont instauré une société basée sur une famille et une progéniture qui se multiplie à travers des mariages entre hommes et femmes de la même famille, avec un échange de jumeaux et de jumelles. Ils avaient instauré un système donnant une grande place au sacrifice devant servir tout le temps au Créateur. Des offrandes lui étaient ainsi dédiées et leur acceptation était le symbole d’un verdict en faveur de celui qui donnait. Une vie primitive tournant essentiellement autour d’activités agraires et pastorales qui exclut la faim, la soif…
Et un jour, Caïn, qui ne cessait d’épier sa propre jumelle, finit par tomber amoureuse de celle-ci. Il perdit son sang-froid, obnubilé par ce qu’il venait de constater, il commença à perdre la raison. Ainsi, il s’opposa à Abel qui, comme le voulait la coutume, avait droit sur sa jumelle. Il voulut que son frère garde sa jumelle pendant que lui vivrait avec celle avec qui il avait partagé le même ventre. Caïn se rebella contre la loi familiale et troubla cette vie de quiétude, l’amour l’ayant complétement métamorphosé. Il voulut coute que coute pêcher dans cette eau trouble, car son cœur a été complétement épris par cette beauté maudite qu’est sa jumelle. Il devint complètement sourd et muet. Il était ivre de cet amour platonique qui devait remette en cause les réalités sociales, la coutume et l’ordre établi dans cette famille.
Caïn n’écoutait plus personne et ne regardait, ne faisait plus que ce que son cœur lui dictait. Il était prêt au sacrifice suprême pour assouvir son désir. Il ne voyait plus et balaya d’un revers de main tout ce qu’on pouvait lui opposer comme arguments. Seule son intention comptait à ses yeux : épouser sa jumelle et jamais celle de son frère Abel. Adan chef suprême de la famille ordonnant, pour les départager, de faire une offrande et que celui qui verrait la sienne acceptée aurait raison sur l’autre. Ainsi, ils vont tous deux présenter leurs offrandes. Caïn proposait une maigre partie de sa récolte et Abel présenta le plus beau veau de son troupeau. Et, ils vont exposer leurs dons étalés sur une place déserte. Celui d’Abel va être accepté, contrairement à celui de Caïn qui a été rejeté. Et la sentence sera en faveur d’Abel. Caïn devait abandonner son amour pour accepter celui de son destin. Et entre cœur et raison, Caïn refusa catégoriquement cette sentence. Il décida, par préméditation, de venir à bout de son frère Abel. Ce dernier décida de ne pas faire face. Une catastrophe s’en suivie. Caïn assassina son frère Abel. Le premier crime sur terre. Le premier meurtre dans ce monde de pardon qui faisait suite au péché d’Adan dans le monde de sublimation et de sainteté. Précédé par celui des démons et diables qui était dominé par la gabegie et la criminalité.
Caïn eut d’énormes difficultés pour cacher son crime. Et inspiré par la technique du corbeau, il prit le parti d’ensevelir le corps d’Abel. Ainsi, l’humain s’inspira de l’animal pour commettre un acte dicté par son instinct. Le premier meurtre de l’humanité fut ainsi un crime passionnel.
Chronique à lire tous les vendredis…
Par Sidy Lamine NIASSE
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