Tout ça pour ça, serait-on tenté de dire. Après un mois de préparation et de polémique, qu’est ce que le dialogue soi-disant national a produit de concret, pouvant impacter sur le quotidien des Sénégalais. Au contraire, ceux d’entre eux qui ont prêté l’oreille à ce qui se passait au palais ont dû déchanter à la baisse des rideaux.A la place d’une concertation productive sur la marche du pays, on a eu droit à un débat politicien. Ce, avec des dizaines d’orateurs qui ont défilé, de manière désorganisée, devant le chef de l’Etat pour lui tresser des lauriers ou poser des doléances.
A entendre son discours inaugural, on distingue assez nettement un président Macky Sall s’accommodant parfaitement avec le paradoxe. Il soutient que le Sénégal est une démocratie majeure, qui n’a rien à envier aux grandes démocraties mais au vu de ce qui s’est passé, on est en droit de dire qu’on n’a pas encore les hommes d’Etat à la hauteur de notre démocratie. On ne voit jamais dans cette catégorie de pays, un président de la République passer 8 heures à la télé avec une partie de l’opposition pour faire du coq à l’âne. Ce qu’a d’ailleurs confirmé l’ancien ministre des Affaires étrangères de Me Abdoulaye Wade, Cheikh Tidiane Gadio, lors de sa prise de parole. «Certains prennent le temps de décliner tout leur programme parce qu’ils pensent que le dialogue s’arrête aujourd’hui et qu’ils ne reverront plus le président de la République», ajoute-t-il. Avant de poursuivre: «Il y a une tension dans la salle parce que la personne ne peut pas rester concentrée pendant deux heures, alors que nous sommes-là depuis plus de quatre heures». Aussi, pour circonscrire les discussions, il propose au président de la République des thèmes de dialogue et de mettre l’accent sur la sécurité, la Casamance et la diaspora, tout en demandant à ce que le dialogue continue sur le renforcement des institutions. Autant de remarques qui prouvent que la précipitation a été érigée en méthode de préparation.
Le pays n’a aucun problème politique et est très loin d’être bloqué pour nécessiter un dialogue national, très souvent l’apanage des pays qui sortent de conflit ou de crise institutionnelle. Ce qui est très loin d’être le cas du Sénégal. Discuter de la manière de réduire les 267 partis politiques du pays est un travail facile que nos députés peuvent régler sans bruit. Aujourd’hui, le dialogue qui sied devrait porter sur la souveraineté économique du pays. Ce, pour que nos entreprises soient plus compétitives et créent des emplois pour les milliers de jeunes qui débarquent chaque année sur le marché du travail. Car, le problème du Sénégal est loin d’être politique, il est purement économique. Et seule la classe politique semble encore l’ignorer.
Seyni DIOP