Serigne Mbaye Thiam invité au respect du droit Au nom de l’autorité de la chose jugée, le Forum du justiciable invite Serigne Mbaye Thiam à respecter la décision de la Cour suprême ayant annulé l’arrêté de radiation des 690 élèves-maîtres. Un refus inscrit sur le compte d’un manque de respect à la Justice. Prenant le contre-pied des députés, le Forum du justiciable dénonce le refus du ministre de l’Education nationale de se conformer à la décision rendue par la Cour suprême. C’est au sujet de l’affaire qui l’oppose aux 690 élèves maîtres.
«Nous sommes dans un État de droit. Par conséquent, les décisions de justice, lorsqu’elles sont revêtues de l’autorité de la chose jugée, ont une force exécutoire et doivent s’appliquer», rappelle le Forum du justiciable dans un communiqué. Ce principe juridique s’appelle, en droit, «erga omnès». Cela signifie que cela s’applique à tous. A cet effet, Babacar Bâ et ses camarades invitent l’Etat du Sénégal à «prendre toutes ses responsabilités face au refus catégorique du ministre de l’Education nationale de se conformer à la décision de la Cour suprême». Faute de quoi, le Forum du justiciable considère que «ce refus pourrait être un précédent grave pour la justice sénégalaise». Pourquoi la Cour suprême a annulé la radiation La Cour suprême a annulé l’arrêté n°38-16 du 27 août, du ministre de l’Education nationale, portant «annulation de l’admission de 690 élèves-maîtres». Serigne Mbaye Thiam en a ainsi décidé, suite à des soupçons de fraude. Il a annulé leur admission et procédé à leur remplacement. Au lendemain de leur radiation, les concernés ont attaqué la décision ministérielle, à travers un «recours en annulation pour abus de pouvoir», devant la Cour suprême qui leur a finalement donné gain de cause. Même si cette décision ne signifie pas qu’il n’y a pas fraude, il reste que celle-ci lève un coin du voile sur la démarche jugée «laconique» du département ministériel considéré. La première erreur a été de sanctionner d’office et d’autorité, alors que l’affaire à une connotation purement pénale. «Le soupçon de fraude ne repose sur aucune base légale. La fraude n’a pas été constatée juridiquement. De ce fait, il n’appartient pas au ministère d’en faire le constat parce qu’il n’est pas une entité juridique. Une fraude se constate non pas sur constat des agents du ministère, mais par un auxiliaire de justice», avait estimé un spécialiste en droit dans les colonnes de Wal Fadjri. Selon le juriste, «il n’appartient pas au ministre de l’Education nationale de sanctionner en cas de fraude. Ce que la loi lui autorise de faire, c’est de prendre des sanctions disciplinaires lorsqu’il constate une faute lourde comme l’absentéisme, entre autres. La fraude ne relève pas de la compétence du ministère». Il ressort de ces éclairages que le ministère se devait d’intenter une procédure en «faux et usage de faux» et porter plainte. La Justice se chargera ainsi d’auditionner les concernés et déterminer s’il y a eu fraude ou pas. En ce moment, le ministre peut, valablement, prendre un arrêté de suspension, le temps que le contentieux soit vidé par les tribunaux. De ce fait, même une saisine de la Cour suprême ne va pas annuler la suspension de ces élèves-maîtres car cette juridiction ne statue jamais sur une affaire tant que les juridictions inférieures n’auront pas vidé le dossier déféré devant elle. La fraude dans le concours des 690 élèves-maîtres, session 2013-2014, a été découverte à la suite d’une mission de contrôle de l’inspection interne du ministère de l’Education nationale. Les conclusions avaient révélé que plusieurs notes ont été gonflées. Sur les 2 545 admis, 690 l’ont été suite à des falsifications de notes. En l’état, il semble que le ministère de l’Education nationale n’est pas dans une logique d’appliquer la décision rendue par la Cour suprême. Du moins si l’on se fie aux réactions du ministre lui-même et de certains de ses collaborateurs qui, au lendemain de la sortie de l’arrêt de la haute juridiction, ont estimé que la fraude existe bel et bien. Et que la Cour suprême n’a statué que sur la forme et non sur le fond. Les conséquences d’une inexécution d’une décision de Justice sont lourdes, sur le plan pécuniaire. Les articles 142 et suivants du Code des obligations de l’Administration prévoient un «dommage anormal et spécial». Ce qui signifie que la réintégration des 690 élèves-maîtres dans le circuit et leur indemnisation s’imposent.
Pape NDIAYE