Sous le magistère de l’équipe municipale sortante, l’ancien maire de la commune avait passé, frauduleusement, une convention liant la municipalité à la société Crest Global, propriétaire des bus Tata, dont l’administrateur est El Hadji Fallou Mbacké. Ce contrat de bail, d’une durée de 75 ans renouvelable tous les 25 ans, conclu, sous la manche, en 2010, sans l’autorisation du conseil municipal, est relatif à la cession de 24 367 m2 sise à la gare routière de Mbacké pour une insignifiante location annuelle de 1 500 000 F Cfa. Rapportée à l’étendue du bail, la cession de la gare routière revient 0 80 F/m2. Quant à la collectivité locale, elle n’engrange que 4 109 FCfa représentatifs de la recette journalière tirée de ce marché de dupes. Pour grave qu’elle fut, cette forfaiture n’est, pourtant, que la face visible de I’iceberg dont la partie cachée est autrement plus scandaleuse.
A la faveur de l’alternance, intervenue à la tête de la municipalité, le nouveau maire de la commune a fait, au cours de la première session du conseil municipal, une révélation fracassante selon laquelle l’administration de la société Crest Global avait sous traité, annuellement, pour son compte personnel, à 24 000 000 FCfa la gare routière, aux Indiens pour usage d’un atelier de maintenance des bus Tata. Dans l’euphorie de la victoire, le tout nouveau maire promet de requérir, dans les meilleurs délais, l’avis du conseil municipal aux fins d’annulation de ces contrats illégaux conclus au préjudice de la communauté. Finalement, de l’avis même du maire, le conseil municipal lui a délivré le mandat qui l’autorise à revenir sur ces conventions scélérates. Mais, depuis plus d’un un an déjà, c’est la loi de l’omerta qui prévaut, à la surprise générale, sur cette question qui procède, désormais, d’un sujet devenu tabou. Mais diantre ! qu’est-ce qui est advenu des surenchères du maire de la ville qui avait brandi la menace de traduire, devant les juridictions, l’administrateur de Crest Global sur cette affaire à laquelle le premier magistrat de la ville a finalement réservé un enterrement de première classe ? Qu’est-ce qui a refroidi les ardeurs du maire à l’issue de la concentration tripartite au sortir de laquelle un modus operandi semble avoir été trouvé ? Comme le prétendent des pans entiers de la population, existe-t-il alors une entente cordiale conspirée au sein des parties prenantes à la concertation ? En attendant de trouver les réponses à ces interrogations énigmatiques, la population continue de souffrir le martyr du fait de l’hypothèque qui pèse, durablement, sur la gare routière. La ville de Mbacké est quasiment rayée de la carte nationale du transport routier. Faute de disposer d’une gare routière fonctionnelle, la ville n’est plus considérée comme une destination reconnue par les chauffeurs qui brûlent l’étape de Mbacké aussi bien à l’aller qu’au retour. Ce phénomène est à l’origine de la prolifération de petites gares routières de fortune disséminées à travers la ville, une situation qui provoque le désarroi et le désordre dans les rangs des professionnels de la filière qui squattent les lieux d’où ils sont régulièrement délogés. L’absence de gare routière cause également de nombreux désagréments aux usagers, surtout en période de grand Magal. A ce contexte déjà lourd de conséquences, vient se greffer une grave évasion de recettes au seul préjudice de la collectivité locale qui trinque aux profits d’intérêts indus, dont bénéficie une étroite minorité. Pour l’anecdote, rappelons que la gare routière a été acquise, en 1990, sur financement de la Banque mondiale, par l’intermédiaire de l’Agence de développement municipal (Adm) pour un coût de 150 000 000 FCfa. Sous ce dernier rapport, en ma double qualité de conseiller municipal et de 3e adjoint au maire, j’avais adressé une correspondance à la directrice du bureau régional de la Banque mondiale, Véra Songwe, qui m’a répondu, par retour de courrier, à la date du 13 juin 2014 : «Conformément aux procédure de la Banque mondiale, votre lettre a été transmise à la vice-présidence, département intégralité (INT), une unité indépendante qui relève directement du groupe Banque mondiale (WBG), et qui est chargée d’enquêter sur les allégations de fraude et de corruption concernant les projets financés par la banque mondiale. Un responsable du département vous contactera sous peu, pour avis. Pendant ce temps, nous vous invitons à visiter le site : WWW.worldbank.orgint.» Depuis ce temps, beaucoup d’eau a coulé sous les points, mais rien n’a encore concrètement bougé dans le sens d’un règlement de cette question préoccupante. Youssoupha BABOU