Je vous propose de partir de deux constats. Le premier est que l’école constitue le berceau de
la citoyenneté. Le deuxième est que l’apport des technologies numériques dans le secteur de
l’éducation n’est plus à démontrer. Ces deux constats conduisent à une réflexion nécessaire
sur la notion de patriotisme numérique, une notion cruciale pour préserver l’identité culturelle
et éviter ce que j’appelle le néocolonialisme numérique. Il convient donc d’assurer que les
modèles d’intelligence artificielle (IA) et les autres ressources numériques soient développées
en tenant compte des réalités et des besoins sénégalais et non exclusivement basées sur des
références extérieures.
Une des premières étapes du patriotisme numérique dans le secteur qui nous occupe consiste
à développer des contenus éducatifs et culturels sénégalais, ce qui inclut notamment la
création de plateformes et de ressources pédagogiques numériques en langues nationales et
basées sur les réalités sénégalaises.
Par ailleurs, la formation des enseignants et des élèves à l’utilisation critique et créative des
technologies numériques est essentielle. Ils doivent être capables de créer et de gérer des
contenus numériques qui reflètent leur propre culture et histoire. Il serait en effet paradoxal
que les nouvelles générations maîtrisent davantage des références extérieures que celles qui
sont censées être les leurs.
Bien entendu, la dépendance aux technologies étrangères et le manque de financement pour
les projets nationaux peuvent freiner le développement d’une véritable autonomie numérique.
A cet égard, il semble essentiel d’encourager les entreprises, notamment dans le domaine des
technologies de l’information et de la communication au service de l’éducation à innover et à
développer des solutions adaptées. Les talents ne manquent pas et j’ai eu récemment
l’occasion de rencontrer les équipes de 6 startups sénégalaises qui travaillent dans cet esprit.
Le patriotisme numérique en général et dans le domaine de l’éducation en particulier est donc
une réponse stratégique pour protéger l’identité culturelle du Sénégal tout en restant ouvert
sur le monde et en promouvant un développement technologique durable et autonome. Si les
talents qui fleurissent au Sénégal dans le domaine du numérique se conjuguent avec une forte
volonté politique, le pays peut s’affirmer comme un leader sur le continent.
Par Dr Laurent BONARDI