C’est maintenant clair, net et précis que, entre la néo-opposition et le pouvoir nouvellement installé, ce sera comme dans la jungle : œil pour œil, dent pour dent. Alors qu’ils avaient décidé d’observer un temps de clémence de cent jours correspondant au délai non codifié de grâce, les partisans de Macky Sall qui ont manifestement trouvé ce délai trop long ont déterré la hache de guerre. L’arrestation suivie de l’inculpation de Bah Diakhaté, présenté comme un activiste proche des officines de l’Alliance pour la République, a servi d’élément déclencheur à cette guerre qui risque d’être sanglante et de longue durée. Le nouveau pouvoir a visiblement opté pour l’utilisation de l’arme judiciaire pour museler les récalcitrants de ce parti qui commencent à se relever de leur cuisante défaite, au premier tour, à la dernière Présidentielle. Et à écouter le verbatim des vaincus de mars, on se croirait projeté une ou deux années en arrière. Tellement le narratif, le raisonnement et les mots utilisés donnent l’impression de déjà vu ou déjà entendu. Moustapha Diakhaté, Pape Malick Ndour et autres apparatchiks de l’ancien système ayant repris à leur compte les slogans et expressions de ce qui était il y a juste trois mois l’opposition radicale. Suppression de l’article 80. Vous avez bien lu ? C’est l’une des revendications de l’ancienne majorité. «L’institution de l’offense au chef de l’Etat représente, à mon sens, une menace pour la liberté d’expression en raison de son effet dissuasif sur les voix dissidentes. Or, il est essentiel que les citoyens aient le droit de s’exprimer librement, de critiquer les politiques et les actions de leurs gouvernements sans craindre des représailles judiciaires d’un ministère public souvent à l’affût.» Vous n’êtes ni sur la page facebook de Me Khouressi Bâ, ni sur celle de Me Ciré Clédor Ly encore moins sur le compte X du cadre Pastef, Amadou Bâ. Vous êtes bien sur la page de Me Oumar Youm qui, jusqu’à fin mars, occupait les fonctions de ministre des Forces armées. Patron de la «Grande muette», le maire de Thiadiaye avait déserté les plateaux pour se conformer à la tradition. Plus le cas, maintenant que la guerre est déclarée à ceux qui ont eu l’outrecuidance de leur ravir le fromage. Lui et ses anciens camarades sont décidés à mener la vie dure à ces chapardeurs de privilèges. Ils comptent leur faire payer l’affront. Jusqu’à la dernière goutte de sang.
Autant dire que, avec ce vocabulaire de guerre, les armes, conventionnelles ou non conventionnelles, utilisées de part et d’autre, le Sénégal est parti pour revivre des moments de violence -au moins verbale- jusqu’aux prochaines échéances. S’y ajoute que la société civile, accusée à tort ou à raison d’épouser les idéaux du pouvoir Pastef, n’est pas prête pour un cessez-le-feu. Patron de Horizons sans frontières, lui-même rescapé des geôles de l’Etat-Apr, pour avoir accusé le gouvernement d’avoir détourné fonds destinés à lutter contre l’émigration clandestine, Boubacar Sèye a initié, sur internet, une pétition visant à extrader et à traduire Macky Sall devant les juridictions nationales. Quant à Alioune Tine, il ne réclame ni plus ni moins que l’interdiction aux anciens Présidents qui ont épuisé leurs deux cartouches de postuler à une troisième, même après une période intermédiaire. De l’eau dans le moulin de ceux qui pensent que l’envie de se présenter en 2029 démange le toujours Président de Benno.
Tous les ingrédients sont ainsi réunis pour un…mortal kombat. Pincez-vous ; vous ne rêvez pas !