Depuis la nuit des temps, hommes et femmes apprennent à vivre ensemble et à partager le même espace.
Si dans la plupart des sociétés, la cohabitation fonctionne, il existe hélas des endroits du globe où le rapport est compliqué et conflictuel. Pour contrer les violences qu’elles subissent régulièrement, des femmes au Kenya ont créé des villages où les hommes sont bannis.
Les villages de femmes comme rempart face à la violence
Les mentalités ont beau avoir évolué et la société avec, il subsiste des zones dans le monde où les femmes sont maltraitées et abusées. C’est le cas notamment sur le continent africain. Le cas d’école : les femmes de la tribu Samburu au Kenya. Il y a 25 ans maintenant, des pionnières issues de cette tribu ont eu l’idée de villages féminins, des refuges face à la violence masculine. L’un de ces villages se nomme Mopukori. Il a été mis en place à quelques kilomètres de la bourgade d’Archers Post (plus de 300 km au nord de la capitale Nairobi), pour fuir le sort réservé aux femmes dans cette communauté.
A la manière de leurs cousins Masai, les Samburus pratiquent l’excision (ablation du capuchon clitoridien ou du clitoris entier) avant le mariage, souvent arrangé très jeune pour les femmes. Dans cette région pauvre et isolée, les filles quittent l’école très tôt (elles ne maîtrisent donc pas le swahili et l’anglais, parlés à l’école) et sont réduites à un rôle de mère, avec peu de considération. Les violences faites aux femmes au sein du foyer ne sont d’ailleurs pas rares. C’est pour mettre fin à tout cela que ces femmes Samburus (une partie) ont quitté leurs foyers pour s’installer ailleurs. Un ailleurs où la gent masculine n’est pas la bienvenue.
Des mini-républiques où les femmes décident
C’est dans une plaine aride que se sont installées les premières exilées Samburu. Des huttes en bois et en plastique se dressant dans une zone où les éléphants et les léopards passent souvent la nuit : Mopukori est né. La doyenne du village décrit cela comme un havre de paix : « Nous sommes très heureuses de vivre ici parce que nous sommes libres. Personne n’est là pour nous imposer des restrictions, nous avons le pouvoir« . C’est autour de Nepi Lelegweny, 42 ans et le regard tranquille, que se rassemblent les quelques 26 femmes composant cette drôle de communauté. Leur objectif commun : rompre la fatalité de leur destin. La dernière arrivée, Jernesa Lekiloi (presque 28 ans) raconte son arrivée : « Nous sommes venus à pieds, moi et mes cinq enfants. Cela a pris deux semaines car il fallait porter les plus petits, faire des haltes. »
Elle s’explique aussi sur ce choix : « J’étais mariée à un homme très violent, qui buvait beaucoup. Nous avons eu jusqu’à 300 chèvres, mais il a tout vendu pour acheter de l’alcool. Je ne veux surtout pas qu’il revienne, il me battrait encore. » A Mopukori, elle a trouvé ce qu’elle cherchait : un environnement bienveillant et démocratique. Si la présence des hommes y est tolérée, ce n’est pas le cas par exemple à Umoja (à 10 km). Au fil des ans, quelques communautés de ce type ont essaimé dans la région. A Mopukori, une dizaine d’hommes vivent entourés de ces femmes, mais ce sont surtout les fils des résidentes devenus adultes. Les pères peuvent venir voir leurs enfants, les « petits amis » peuvent rendre visite mais la règle est stricte : seules les femmes décident qui a droit de cité.
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