Face aux ennuis causés par les opérateurs téléphoniques, les Sénégalais ne savent plus à quel saint se vouer. Pendant que l’Autorité de régulation et les associations censées défendre les usagers sont plus préoccupées par des prébendes, les consommateurs plient sous le coup de buttoir de sociétés qui n’ont qu’un seul souci : gagner de l’argent, encore gagner de l’argent, toujours gagner de l’argent. La qualité du service, ces opérateurs n’en ont cure malgré les centaines de milliards de francs CFA qu’elles alignent annuellement comme chiffres d’affaires. Si le coût élevé du téléphone polarisait jusque-là les complaintes, l’internet n’a pas mis du temps pour mécontenter de nombreux utilisateurs qui à force de maugréer en vain dans les salons, ont commencé à partager l’objet de leur courroux. A Tigo, comme à Orange, sans oublier Expresso, il est reproché de ne guère tenir compte des publicités qui annoncent monts et merveilles mais, qui à l’arrivée, se révèlent comme une véritable escroquerie. « Acheter une connexion sans avoir la possibilité de l’utiliser alors qu’à l’heure d’épuisement, ils n’ajoutent même pas une seconde de plus », expliquent de nombreux commentateurs, qui ne savent pas où aller se plaindre. En plus d’être chère, la connexion est extrêmement lente, observent certains qui n’hésitent pas à pointer du doigt une complicité entre les opérateurs. «Normalement, la concurrence devrait faire de sorte que les Sénégalais aient la connexion et le téléphone à un prix beaucoup plus réduit. Mais tel n’est pas le cas », explique Madou Ndiaye, que nous avons trouvé dans une boutique en train justement de recharger du crédit. Son point de vue est partagé par le boutiquier qui préfère garder l’anonymat. Rappelant les derniers mouvements d’humeur déclenchés par les revendeurs de crédit, il trouve que la boulimie des opérateurs n’épargne pas cette corporation qui perd de plus en plus de membres qui trouvent la vente de moins en moins rentable.
A l’Université Cheikh Anta DIOP de Dakar, le même sentiment d’impuissance anime les étudiants. Férus et même dépendant de Facebook, ils ne décolèrent pas contre Orange, Tigo et Expresso qu’ils accusent de tous les noms de voleur. « Avec Tigo, par exemple, quand ils te vendent les 4Go mille francs, il est impossible de se connecter à l’heure qui suit. Je ne sais pas s’ils le font express ou pas, mais il faut attendre des fois plus d’heure avant que la connexion ne marche. Et pourtant, ils n’ajoutent même pas une minute de plus dès que les 24 heures sont épuisées », observe Moustapha, le nez collé à sa tablette. Même son de cloche chez son voisin de chambre qui lui indique avoir fait la navette entre les trois opérateurs sans se décider à s’en tenir à un. « Ils sont tous pareils, six c’est neuf. C’est de grands voleurs. Dommage qu’on n’a pas la possibilité d’aller ailleurs. Le gouvernement doit réagir et ne pas se contenter des milliards qu’on lui donne et nous laisser à leur merci», peste-t-il. Avant de déplorer lui également la publicité mensongère à laquelle, selon lui, ces opérateurs s’adonnent. «Dès que vous achetez une passe, ils vous disent que Facebook est gratuit, mais ce n’est pas vrai. Dès que les Mo s’épuisent, vous n’avez plus de connexion ni sur Facebook ni ailleurs», déplore-t-il. Aissatou BA n’est pas loin de partager le même avis. L’apprenti juriste pense qu’il faut que les usagers se mobilisent pour barrer la route à ces opérateurs, car, de son avis, les associations consuméristes tout comme la presse ne feront rien pour leur faire changer de fusils d’épaule. «Le vol est flagrant, que ça pour l’internet ou le téléphone, le compte n’est bon qu’en leur faveur. Au départ j’appelais leur service clientèle pour me plaindre, mais je suis résignée en attendant de voir des victimes comme moi se lever», explique l’étudiante.
Si les complaintes sont unanimes, la solution n’est guère attendue, ni dans l’immédiat ni dans le cours terme. Pour beaucoup de Sénégalais, l’Etat est tout à fait impuissant ou alors fait semblant de l’être face à ces investisseurs étrangers qui prennent le beurre, l’argent du beurre et pensent emporter la vache laitière.
WALFnet