CONTRIBUTION
Ainsi donc, après moult atermoiements, le président sénégalais a décidé de se payer un nouvel avion de commandement neuf. En l’occurrence, il s’agit d’un Airbus A320neo. Selon plusieurs sources dont le magazine économique français «Challenges», le prix catalogue de ce type d’appareil est de 108 millions de dollars Us, soit environ 60 milliards de FCFA. En s’abritant derrière la supercherie classique du secret-défense, Oumar Guèye, le ministre porte-parole du gouvernement sénégalais, a refusé de dévoiler le prix d’achat de l’avion, au grand dam des contribuables sénégalais qui ont financé cette acquisition. Mais selon ses propos, la dernière tranche des 60 milliards FCFA dus à Airbus sera soldée en juillet prochain en même temps que la réception de l’avion. Le jeu de cache-cache prend fin : depuis plusieurs mois, la Pointe de Sarène avait disparu des radars et le président voyageait autrement… On se doutait que Macky Sall n’allait pas continuer à «squatter» des aéronefs privés, une image de SAF (Sans Avion Fixe) qui contrastait avec son nouveau «leadership»…
Le 18 mai dernier, le président Macky Sall était à Paris comme une des stars du « Sommet sur le financement des économies africaines » pour demander l’annulation de la dette des pays pauvres, notamment d’Afrique. Du reste, cette posture était devenue son principal «combat» depuis que le président Emmanuel Macron avait choisi de lui faire porter le costume de porte-étendard des Etats du continent pour rebattre les cartes d’une dette qui, feignent-ils de penser, serait le plus gros frein aux politiques de développement et d’émergence.
Le chef de l’Etat sénégalais est libre de se prendre au sérieux ou de tomber dans le jeu de rôles que la France de son « cher Emmanuel » entend lui faire jouer pour des desseins qui lui sont propres au plan international. La réalité est que cette acquisition d’un avion neuf pour ses déplacements, ceux de sa famille et ceux de ses collaborateurs est une insulte délibérée aux populations sénégalaises, aux millions d’entre eux qui souffrent au quotidien des conséquences nées des politiques de mal gouvernance publique. C’est un pied-de-nez arrogant à tous ces malades qui meurent à l’infini aux portes et à l’intérieur des hôpitaux et établissements de santé publics victimes des sous-investissements de l’Etat et de ses démembrements. C’est une agression préméditée contre ces dizaines de milliers de travailleurs refoulés dans la précarité vitale par l’échec et le sabotage des structures publiques ou parapublics qui ont été leurs employeurs.
Le cynisme au cœur, c’est ainsi et seulement que l’ont peut qualifier cette nouvelle incartade présidentielle. Une caprice de plus dans l’impressionnante liste de reniements que le président Sall s’échine chaque jour à épaissir, au mépris de ses engagements initiaux lors de sa longue traversée du désert sénégalais. Mais ne faisons pas la fine bouche : il y a bien longtemps que la surprise – en tant que phénomène – ne devrait plus être invoquée en ce qui concerne les actes que pose notre cher président de la république ! Il est comme il est. A moins de trois ans de sa retraite présidentielle, pourquoi se priverait-il d’un des avatars majestueux de la souveraineté d’Etat ? Le pire est à venir.