CHRONIQUE DE WATHIE
« Le poison culturel savamment inoculé dès la plus tendre enfance, est devenu partie intégrante de notre substance et se manifeste dans tous nos jugements ». Cheikh Anta DIOP
SENGHOR a pris le dessus sur Mamadou DIA, parce que préparé et soutenu par ses compatriotes français qui ont très vite trouvé le talon d’Achille de cette société trop attachée à la palabre. Mis en scelle par une France désireuse de maintenir sa domination en dépit de l’indépendance proclamée, le poète s’est imposé avec à ses côtés ceux qui ont trouvé sa voix chantant Joal mélodieuse. Depuis, l’éloquence a pris le dessus sur le pragmatisme et, le Sénégal, au rythme du mbalakh, a continué à s’embourber s’accrochant inlassablement au futile et à l’accessoire. Maintenant que, au nom de la mondialisation, les frontières, surtout virtuelles, ont basculé, c’est presque tout un peuple qui se retrouve démuni et à la merci des propagandistes et théoriciens d’un nouvel ordre mondial qui fait de la foi un simple organe de l’organisme.
«Le Sénégal est un pays tolérant qui ne fait pas de discrimination en termes de traitement sur les droits (…). Mais on n’est pas prêt à dépénaliser l’homosexualité. C’est l’option du Sénégal pour le moment. Cela ne veut pas dire que nous sommes homophobes. Mais il faut que la société absorbe, prenne le temps de traiter ces questions sans qu’il y ait pression». C’était la réponse du président SALL à son homologue américain Barack Obama, en visite au Sénégal, en juin 2013. Le 27 juin, macky SALL qui animait une conférence de presse conjointe avec le président américain se savait attendu sur cette question de l’homosexualité qui semblait motiver le déplacement d’Obama à Dakar. Le président lança un retentissant NON, tout en ouvrant subtilement la porte.
Pourquoi l’Institution Sainte Jeanne d’Arc décide, maintenant, d’un coup, d’interdire le voile ? Ceux trouvent le calendrier fortuit n’essaieront probablement pas de comprendre pourquoi Wally SECK fait plus parler de lui par ces accoutrements que par la profondeur de ses paroles. Depuis quelques années, de nouvelles questions agitent avec récurrence le Sénégal. L’homosexualité, la franc-maçonnerie, l’avortement autant de sujets, parmi tant d’autres, assaillent, aujourd’hui plus qu’hier, la société sénégalaise au travers de la magie des réseaux sociaux. Les différences, comportementales notamment, entre l’Occident et la société sénégalaise sont de moins en moins manifestes avec l’importation massive de pratiques jadis unanimement rejetées. Et progressivement, comme l’avait conjecturé le président SALL, la société absorbe, en attendant d’être ivre au point de ne plus se reconnaitre.
C’est en connaissance de ces enjeux fondamentaux que certains en veulent à Iba Der THIAM et Cie. Dans une société où les repères deviennent difficilement perceptibles, connaitre qui l’on est, d’où l’on vient est fondamental. Et de l’Histoire, il est aussi attendu un renforcement du sentiment de patriotisme et de vouloir vivre en commun car ayant, ensemble, traversé des moments de gloire, ou, dans le cas du Sénégal, avoir subi les mêmes affres de la domination coloniale. Mais, Iba Der THIAM et ses collègues ont préféré mettre en avant ces histoires plus enclines à décliner le Sénégalais. C’est ainsi que les batailles de Djilas et de Logandème contre l’Armée de Pinet-Laprade, qui font depuis des décennies la fierté des Sérères qui se racontent de génération en génération ces prouesses contre le colon, sont passées sous silence par l’ouvrage qui n’a consacré que trois pages à l’histoire du Sine (627, 640 et 641). « Iba Der, fait relater l’arrestation de Limamou Laye à sa manière en reprenant la version du colon (à travers les correspondances rédigées à l’époque par l’administration coloniale), montre une certaine étroitesse de sa vision », s’est offusqué le président de la commission scientifique de Nurul Mahdi de la communauté layène, Baytir KA. C’est le même reproche fait par Touba qui trouve que sur bien des passages concernant le mouridisme, Iba Der THIAM et Cie se sont fondés sur des sources non fiables. Entre Charles Becker et Paul Marty, l’image du Sénégal ne peut scintiller. Le deuxième, lieutenant-colonel, officier supérieur de l’administration coloniale, qui se disait spécialiste de l’islam au Sénégal, a toujours nourri une haine viscérale à l’endroit de Cheikh Ahmadou Bamba. S’appuyer de ses écrits pour raconter l’histoire du fondateur du mouridisme est un exercice périlleux qu’Iba Der a pourtant tenté.
C’est un Iba Der THIAM acculé par la clameur populaire qui s’est rendu à l’émission « Jury du dimanche » déterminé à se disculper. A l’arrivée, il s’est davantage enfoncé, étalant un amateurisme saillant pour un travail aussi important que complexe. « Nous n’avions pas le temps de relire », « des fois je suis partial », « Dieu seul sait tout »…, des phrases et des expressions choc qui suffisent à discréditer toute l’œuvre. Donnant des exemples, le professeur assure pourtant que « ce n’est pas la première fois que les histoires suscitent des polémiques» et que ce projet « doit continuer ». Devant un vrai jury, autre que du dimanche, il aurait été déclaré coupable de collusion avec « l’ennemi ». Seulement, en affirmant que Macky SALL et l’Etat du Sénégal ne sont en rien concernés par le projet, il rend informel son ouvrage qui est donc susceptible d’être brûlé. Iba Der est de la trempe du professeur Ismaël Madior FALL, grandes connaissances, petite foi.
Mame Birame WATHIE