Le football sénégalais est désormais entré dans une nouvelle ère. Dix ans après l’avènement du football professionnel, les responsables de ce jeu, si charmant, ont décidé d’amorcer un tournant qui déshonore plus qu’il produise le contraire. L’acte de virage a été signé avant-hier, mercredi, au Grand Théâtre de Dakar.
Devant toute une assistance qui s’attendait à ce que les vrais problèmes du football en particulier, et du sport en général, soient soulevés en face de Macky Sall, candidat à sa propre réélection comme président de la République du Sénégal, les responsables ont préféré chanté la gloire d’un homme. Parfois avec une maladresse qui flirte avec le ridicule extrême.
En pleine campagne électorale pour le scrutin présidentiel de dimanche prochain, le président de la Ligue sénégalaise de football professionnel (Lsfp), Saër SECK, habillé en boubou marron pour la circonstance, a osé clamer haut et fort, sans sourciller, que la structure qu’il dirige va apporter son soutien au chef de l’Etat sortant en vue de sa réélection. Il faut donc désormais dire la Ligue sénégalaise de football politique (Lsfp) ! Quelle calamité !
On peut comprendre que Saer SECK soit un militant inféodé de Benno bokk yaakaar (Bby). On sait également que ce foot pro n’est que de nom, parce qu’il reste toujours au même stade d’amateur, avec son lot de dysfonctionnements accrus. On a vu que pendent ces dix années, aucune avancée n’est pratiquement notée, si ce n’est la régularité des compétitions nationales et un calendrier de plus en plus maîtrisé.
Les problèmes de salaires refaisant surface à chaque saison, les présidents de clubs étant arrivés quasiment à bout de souffle sur le plan financier… Mais l’attitude de Saër SECK est inexplicable et s’avère dangereuse. Il ne doit, sous aucun prétexte, fut-il pour séduire et toucher le candidat dans sa chair afin de l’amener à être plus généreux pour le sport, utiliser la Lsfp, qui est une association de football qui doit être apolitique, pour défendre des intérêts crypto-personnels.
Si son Diambars est en difficultés, la Lsfp, cette structure qui regroupe toutes les sensibilités, devrait être épargnée de cette manière de quémander des temps modernes. Il fallait plutôt rappeler à l’Etat, son devoir d’accompagner le football professionnel, puisque c’est lui-même qui avait exhorté les responsables à aller dans ce sens. Que le Sénégal suive l’exemple de la Côte d’Ivoire dont le gouvernement apportait une subvention annuelle de 50 millions de francs Cfa à chaque club. Et avec l’arrivée des droits télé, cet appui a été revu à la hausse en passant à 70 millions francs Cfa.
On attendait, du président de l’institut Diambars, beaucoup plus de classe, à la façon du président du Comité national de gestion de la lutte (Cng). Docteur Alioune Sarr a eu une attitude de grand dirigeant qui a compris que les hommes passent et que les instituts demeurent toujours. Si Macky Sall tombe au soir du 24 février, on imagine quel regard portera Saër SECK sur le prochain président de la République.
Pour ne pas compromettre l’avenir de ce football qui rassemble les passions, nos responsables doivent rendre le tablier pour continuer leur nouveau business politique. Là, ils trouveront pleinement leur place. Le sport transcende toutes les sensibilités. Surtout quand on a vécu des moments de contestations acerbes et qu’on continue d’entendre certaines critiques (devenues légitimes depuis mercredi ?) dans les stades et même dans les débats.
Adama COLY