La mobilisation des recettes pour l’Etat peut ne pas entraver la bonne marche des entreprises.
Et le président ivoirien, Alassane Ouatara qui vient de donner des instructions pour la suspension d’impôts prouve qu’on peut engraisser la vache pour mieux la traire demain. Cela, au lieu d’octroyer un cadeau fiscal à certains et mettre un révolver sur la tempe à d’autres qui paient déjà. Il montre ainsi que lui au moins se soucie de son secteur privé.
Alors qu’au Sénégal, on continue d’assigner des objectifs de recettes invraisemblables aux régies financières, la Côte d’Ivoire baisse les prélèvements du Fisc pour engraisser cette vache laitière. En effet, vendredi dernier, lors de la présentation de vœux de nouvel an à la presse de son pays, le président Alassane Dramane Ouattara a annoncé la suspension d’impôts réclamés par son secteur privé. «Je suis totalement ouvert à ça pourvu que ce soit dans l’intérêt de la Côte d’Ivoire», a-t-il confié à nos confrères ivoiriens. «Concernant l’annexe fiscale, bien qu’elle ait été adoptée par le Conseil des ministres, j’ai demandé à ce que cela soit suspendu et repris pour être conforme à l’orientation que nous avons dans notre pays», a-t-il indiqué après avoir appelé à la mi-janvier à des discussions approfondies avec le monde des affaires.
Ainsi, sans altérer les ressources de l’Etat, il est possible de baisser la pression fiscale pour inciter les entreprises à investir et créer plus d’emplois au bénéfice de l’Etat. Mais au Sénégal, c’est toujours la politique d’optimisation fiscale qui est appliquée. Ce, avec des contrôles qui s’apparentent à des braquages
Cette logique de ponction fiscale a même fini par exaspérer des patrons sénégalais. «Ils sont en train de tuer la poule aux œufs d’or. Les entreprises n’en peuvent plus de payer. Dès qu’ils (les pouvoirs publics : Ndlr) sont fauchés, ils envoient des inspecteurs en disant qu’il faut atteindre tel objectif. Cette année, ils ont fait une loi de finances rectificative parce qu’ils ont eu un pic au niveau des rentrées fiscales», confiait, en octobre dernier, un entrepreneur sénégalais à WalfQuotidien.
Certaines entreprises sont harcelées alors que d’autres bénéficient du cadeau fiscal où voient leurs sanctions rabotées à des montants dérisoires comme ce fut le cas de l’opérateur historique de télécommunication du pays. Lequel avait écopé d’une amende de 13 milliards de francs Cfa avant qu’elle ne soit, par la magie d’un recours gracieux, ramenée à 1,5 milliard. Preuve, pour certains hommes d’affaires, que l’Etat «s’acharne sur certains et cajole d’autres». Une situation en passe de pousser des hommes d’affaires sénégalais dans le ras-le-bol fiscal qui plombe la compétitivité de l’économie sénégalaise face à l’invasion de produits étrangers dont les pays disposent d’énormes facilités. «Comment, avec cette pression fiscale et un port qui ne marche pas, on peut imaginer tenir face à la concurrence des importations ?», s’interroge un patron contacté par WalfQuotidien.
Seyni DIOP