Les magistrats en ont assez de leurs décisions jamais exécutées. Le refus de l’Administration d’exécuter certaines décisions de Justice a occupé une bonne place lors des échanges, hier, à la rentrée solennelle des cours et tribunaux.
C’est le cas notamment dans l’affaire des 690 élèves-maîtres, le différend entre les communes de Djiddah Thiaroye Kao et Wakhinane Nimzatt pour le contrôle du marché Bou bess, entre autres. Introduisant le discours d’usage sur le thème «Le contrôle juridictionnel de l’Administration», le magistrat Sangoné Fall s’en est offusqué. «Il faut le relever pour le déplorer, le plus souvent, c’est l’administration elle-même qui fait de la résistance. Elle doit comprendre, qu’au même titre que les particuliers, qu’elle doit se soumettre au droit, en usant le cas échéant des voies de recours. La question est alors de savoir dans quelle mesure, et par le biais de quels moyens, le juge administratif peut contraindre l’administration à se conformer à ses décisions», a constaté avec amertume le conseiller référendaire à la Cour suprême. Procureur général près la Cour suprême, Cheikh Tidiane Coulibaly est revenu, à son tour, à la charge : «L’Administration doit agir en conformité avec la Constitution et les lois qui fixent les limites de son action. Le contrôle juridictionnel est institué en vue de s’assurer de la conformité de l’action de l’Administration à la hiérarchie des normes et de prémunir les citoyens contre l’arbitraire ou les rassurer».
Favoritisme dans les marchés publics
La procédure de passation des marchés publics n’a pas manqué d’alimenter les débats. Et c’est pour rappeler à l’Administration les principes qui doivent prévaloir. «Les procédures de passation des marchés doivent respecter les principes de libre accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats, de non-discrimination et de transparence», dit-il. Pour le conseiller référendaire à la Cour suprême, Sangoné Fall, le principe de transparence se traduit par une information préalable des candidats sur les critères que l’autorité contractante entend mettre en œuvre, lors de l’évaluation des offres. A l’en croire, ce principe suppose aussi que ces critères soient définis de manière objective, pour faciliter le contrôle de leur application et éviter tout favoritisme. «Le principe de transparence commande aussi que les critères définis par l’autorité contractante soient appliqués de manière égalitaire à tous les soumissionnaires», recommande-t-il.
Lors des échanges, il aussi été question de l’encadrement des mesures de police en matière de liberté de réunion, d’association et d’expression. «Pour ordonner la fermeture provisoire d’un siège de parti politique, un gouverneur a invoqué dans son arrêté des risques de troubles à l’ordre public, alors qu’il ne ressort pas des éléments du dossier que le risque de télescopage allégué fut de nature à menacer l’ordre public dans des conditions telles qu’il ne pût être paré au danger par des mesures de police appropriées, lesquelles pouvaient être prises en l’espèce sans aller jusqu’à la mesure extrême de fermeture du siège du parti et, en prenant une telle mesure, l’autorité administrative a porté atteinte au droit de propriété privée et à la liberté de réunion et d’association». Une position partagée par le procureur général Coulibaly pour qui «s’il incombe à l’autorité administrative compétente de prendre les mesures qu’exige le maintien de l’ordre, elle doit concilier l’exercice de ce pouvoir avec le respect de la liberté de réunion garantie par la Constitution».
Pape NDIAYE