Mahammad Boun Abdallah Dionne et les «députés du Président» ont encore fait leur show à l’Hémicycle.
Pendant près de six tours d’horloge, le chef du gouvernement, tenaillé par une tradition républicaine démodée, a de nouveau fait vibrer l’Assemblée nationale d’applaudissements. Et, au sortir de cette séance d’exorcisme, c’est la politique générale de la Nation déjà définie par le président de la République et tournant essentiellement autour du Pse, qui est toujours de mise. Si ce n’est pas une perte de temps…
La marche actuelle du gouvernement ne va nullement changer nonobstant la déclaration de politique générale faite ce mardi par son chef. Comme pressenti par de nombreux observateurs et acteurs, le Plan Sénégal émergent a été au centre du discours du Premier ministre. Mais, pouvait-il en être autrement ? Comme consacré par la Constitution, c’est le président de la République qui définit la politique de la Nation. A travers sa Déclaration de politique générale, le chef du gouvernement indique les voies et moyens devant permettre l’exécution des grands axes de ladite politique et engage la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale qui lui accorde ou non sa confiance. Le refus de confiance pouvant entraîner la démission collective du Gouvernement. En France, le Premier ministre Edouard Philippe, qui a fait sa déclaration de politique générale le 4 juillet dernier, a obtenu la confiance de l’Assemblée nationale française, avec 370 pour, 67 contre et 129 abstentions.
Seulement, au Sénégal, on a tendance à singer la France dans la forme. Le fond qui est beaucoup moins adaptable à sa démocratie est personnalisé selon la convenance des tenants du pouvoir. Mahammad Boun Abdallah Dionne n’a pas dérogé à la règle. Loin d’exposer les grands axes de la politique de la Nation définie par le chef de l’Etat et les principales mesures devant être mises en branle pour leur exécution, a plus passé son temps à faire le bilan du régime de Macky Sall. «Entre 2012 et 2016, au-delà des programmes de réhabilitation, le Gouvernement a investi environ 132,6 milliards de FCFA pour construire et équiper 9 538 salles de classe, 333 écoles élémentaires, 162 collèges de proximité, 21 lycées, 20 blocs scientifiques et technologiques, et 12 daaras modernes», a déclaré Mahammad Boun Abdallah Dionne. Ainsi, selon les programmes des différents départements ministériels, le chef du gouvernement a listé les réalisations pour lesquelles son équipe a été mise en place. Et, si ce n’est pas un bilan qui dressé, ce sont des promesses qui sont distillées. «Ces investissements sont accompagnés d’un programme de construction de 30 000 lits en résidences universitaires ainsi que des restaurants pour les étudiants et des logements pour les professeurs», a souligné le Pm qui parle non pas de construction de chambres mais de lits pour étudiant.
Toutefois, si Mahammad Boun Abdallah Dionne a déroulé sans anicroche enveloppant son discours d’une rhétorique saillante tendant à rehausser plus la forme de sa déclaration que le fond, c’est que les députés ont été loin d’avoir joué leur partition. Ils ont, une nouvelle fois, raté une occasion de contrôler l’action du gouvernement. Dans une automaticité déroutante, ils ont montré qu’ils étaient déjà convaincus avant même que le Premier ministre ne franchisse la porte d’entrée de l’Hémicycle. En dehors de ceux de l’opposition, dont le temps de parole n’a pas permis une critique approfondie, les députés se sont plus illustrés, comme le feraient les lutteurs, dans des remerciements et des encouragements indignes de leur fonction. Et, c’est sans eau qu’ils ont avalé la pilule de l’acquiescement.
Mame Birame WATHIE