La législature qui s’achève n’a, en rien, constitué une avancée par rapport aux précédentes. La parlementaire Elène Tine qui en est convaincue a listé les manquements qui justifient sa position et indexé la responsabilité de Moustapha NIASSE.
(Correspondance) – «Le Parlement n’a pas du tout répondu aux attentes des populations durant cette présente législature qui tire à sa fin». C’est l’avis de la parlementaire Elène Tine qui prenait part au forum dit de redevabilité parlementaire organisé par la section départementale du Forum civil de Thiès. Une rencontre tenue dans la salle de conférence de la chambre de commerce et à laquelle ont pris par les députés Abdou Mbow de l’Apr, Mamadou Dalane Faye du parti Rewmi. Pour la députée de Bës Du Niakk, la 12ème législature a été un échec. Un échec que, selon elle, le président du groupe parlementaire de la majorité doit reconnaître. «Je pense que nous n’avons pas répondu aux attentes de la population. Il suffit de faire une petite enquête auprès de la population pour en avoir le cœur net. Nous nous sommes donnés en spectacle et pour moi personnellement c’est une grande déception». Et la parlementaire de poursuivre pour dire en imputer une grande part de responsabilité au Président de l’Assemblée nationale. «Nous avons mené les Assises nationales ensemble et nous avons eu à prendre beaucoup d’engagements dans le cadre de la charte de bonne gouvernance démocratique. Tous engagements qui devraient normalement faire avancer les choses au Parlement. Il (Moustapha Niasse, Ndlr) en avait l’opportunité mais n’a rien fait», regrette-t-elle. Aussi et pour se faire plus explicite, la parlementaire de faire savoir que, tout au long des cinq années de cette législature, sur les 145 lois qui ont été votées, une seule a fait l’objet d’un renvoi en seconde lecture et c’était en début de mandat. Il s’agissait, rappelle-elle, du projet de loi sur la révision de la Constitution portant suppression du Sénat. Pis, poursuit-elle, une seule de ces 145 lois votées relève d’une proposition émanant du parlement. Il s’agit, selon elle, de celle «scélérate» qui touche au règlement intérieur de l’Assemblée nationale et qui n’a pas permis de régler les problèmes de fond ayant trait à certaines dispositions qui plombent aujourd’hui le Parlement et font d’elle l’annexe de l’exécutif. «Nous avons un règlement intérieur qui ne permet ni l’expression plurielle encore moins de tirer le maximum du mandat des députés pour aller vers des solutions. Comment comprendre que, durant cette législature, nous n’ayons même pas eu une seule enquête parlementaire et n’avons voté qu’une seule proposition de loi ? Les questions écrites que nous envoyons au gouvernement restent sans réponse. Ce qui est une violation flagrante de la loi quand on sait l’exécutif a le devoir de répondre dans les 30 jours qui suivent le dépôt».
Une seule loi sur 145 émane de l’Assemblée
Au-delà, Elène Tine estime que, pour apporter les ruptures qu’il faut, l’Etat doit aller vers une indemnisation parlementaire en lieu et place de cette forme d’indemnisation mensuelle qui encourage l’absentéisme. Car aujourd’hui le constat est qu’il y a des députés que leurs pairs ne parviennent même à reconnaître tant ils brillent par leur absence à l’hémicycle. «Je pense que nous devons aller vers un nouveau Parlement. On nous avait parlé de rupture en 2012 mais cette rupture n’est pas effective. Quelles sont les commissions qui ont été faites ? Pourquoi aujourd’hui, face à la cherté du coût de l’autoroute, le parlement ne peut pas faire une enquête parlementaire, regarder la concession qui a été faite et demander au gouvernement de la réviser pour que cette pression énorme sur la population puisse être desserrée ? Surtout que c’est avec l’argent de ces populations qu’on a construit cette autoroute». Pour elle, si le parlement avait fait cette rupture-là, on aurait pu avoir des enquêtes parlementaires sur la question du pétrole et du gaz qui a empesté l’atmosphère en un moment donné mais aussi sur la situation terrible qui sévit à Dakar Bamako Ferroviaire, ex-Transrail, et à la Nsts. Quid dit-elle de Nécotrans qui bénéficie d’une concession de 25 ans et qui, en trois ans, a renvoyé quelque 120 employés sénégalais ainsi que toutes les sociétés sénégalaises qui étaient au Môle 8 ?
Mamadou Dialane Faye, son collègue parlementaire, abondera dans le même sens en soutenant, sans ambages, que l’Exécutif a une mainmise sur l’Assemblée nationale. En effet, dit-il, il ne fait l’ombre d’aucun doute que l’organisation des débats en plénière est dictée par le bureau de l’Assemblée. «Le format que le bureau nous offre ne correspond pas à l’exigence et A l’avancée démocratiques», dit-elle. La conséquence en étant, poursuit-il, que sur une cinquantaine de questions orales, l’opposition parlementaire n’a droit qu’à deux ou trois questions et cela ne peut pas relever le niveau du débat en termes de participation de qualité. Et de déplorer les nombreux bocages au niveau du Parlement. «Il n’y a pas une volonté manifeste du Président de l’Assemblée nationale de faire aboutir des enquêtes parlementaires et initiatives de proposition de loi ainsi que le contrôle de l’action gouvernementale. Je pense que l’Assemblée doit connaitre des mutations profondes en termes de management global», dit-il.
Walf Quotidien