CHRONIQUE DE MAREME
Aicha : à la découverte d’Oumi
Aujourd’hui c’est samedi, Oumi, la sœur de Malick, nous a invités chez elle. Malick dit que c’est une femme en or et son binôme dans la famille. En tout cas je ne suis pas aussi stressée que jeudi passé.
Hier, mes parents m’ont vraiment sauvé la mise. Dès que nous avons franchi la porte, Malick m’a directement attaqué. C’était à la fois sauvage et excitant. J’ai gouté au piment du Nigéria en intégralité. Hi Allah. Mon portable s’est mis à sonner et après dix minutes d’insistance Malick m’a laissé répondre. C’était Papa, il était en ville avec Maman et voulait passer pour découvrir chez moi. Avant même qu’il ne finisse sa phrase, j’ai dit oui. Ça nous a fait plaisir de voir autant de joie sur leur visage quand on leur a fait visiter l’appartement. Malick me dira plus tard qu’il avait peur qu’on lui reproche de m’avoir installé dans un petit appartement pendant que son autre femme vit dans un palace. J’en ai ri pendant une minute. On est différent sur un point, je trouve toujours qu’il en fait trop avec moi alors que lui a l’impression que ce n’est pas suffisant. Quand ils sont partis, le gars m’a encore culbuté et cette fois j’ai vraiment dansé la zumba.
Tu penses à quoi, demande mon cher mari en entrant dans la douche.
Tu es vraiment méchant Malick, je ne peux même pas m’assoir correctement.
Ça t’apprendra femme.
Regarde-moi, ce sauvage rék, tu ne payes rien pour attendre.
Ah bon, parce que tu as encore l’intention de faire quelque chose, demande-t-il en me regardant malicieusement.
Je te vois venir, n’y compte même pas. J’ai eu ma dose d’une semaine et sort d’ici avant que ton esprit tordu là reprenne le dessus. Il a éclaté de rire avant de m’embrasser et de tourner les talons.
Nous sommes arrivés chez Oumi vers 14 h car nous sommes d’abord allés acheter quelques présents. Oumi nous a reçus avec un grand sourire, pas ces sourires jaunes comme celui d’Abi ou de ma belle-mère. Elle m’a fait plein de bises, m’a tournoyé et m’a encore prise dans ses bras. Son accueil si chaleureux m’a détendu de suite. On sentait à quel point c’était sincère. C’est une femme d’une beauté époustouflante et pleine de joie. Elle ressemble beaucoup à Malick, le même trait de visage, le même sourire, certain gestes et autres. Malick me fait savoir que sa sœur est une grande commerçante avec trois boutiques à Dakar et cinq dans les régions.
Dès que nous nous sommes installés dans le salon, elle nous a pressés pour qu’on lui raconte notre ‘histoire d’amour’. Mon mari lui a raconté comment nous nous sommes rencontrés, combien il s’est trompé à mon compte, la victimisation d’Abi pour nous séparer etc, etc. Sans l’accident peut – être nous n’en serions pas là. Oumi était comme une enfant qui regarde la belle au bois dormant. Elle n’arrêtait pas de rire, de sursauter, de s’exclamer et surtout d’être heureuse pour nous deux. Je sentais vraiment que j’allais avoir une nouvelle amie. Par contre, j’ai trouvé bizarre le comportement de son mari. Il est resté à peine cinq minutes avec nous avant de disparaître. On ne l’a revu qu’au moment du déjeuner durant lequel, il a essayé tant bien que mal de paraitre poli. Après le repas, il s’est excusé en prétextant une urgence et est parti. Oumi s’est levé pour l’épier par la fenêtre. Quand elle s’est retournée, elle m’a fait un clin d’œil.
Enfin seule ma chérie, je reviens tout de suite. Elle sort de la maison en courant. Je regarde Malick qui éclate de rire en remuant la tête. Cinq minutes plus tard, elle revient avec une valise qui parait très lourd, vu comment elle la tirait.
- C’est quoi ? Demande Malick en fronçant les cils.
- Ce n’est pas ton affaire. Il faut bien que je gâte ta femme après tout ce que tu as fait pour moi.
- Tu ne me dois rien Oumi.
- Je te dois tout Malick. Ils se défient une seconde avant que mon mari lève les mains au ciel en signe d’abdication. Quand elle ouvre la valise, j’étais éblouie de voir autant de tissus, les uns plus beaux que les autres.
- Wawe, c’est magnifique, dis – je en prenant le premier. Il ne fallait pas toi aussi. J’ai déplié, plié et à un moment je me tourne vers Malick.
- Tu veux bien choisir pour moi car ils sont tous magnifiques.
- Choisir, mais tout est à toi dit Oumi en éclatant de rire. J’ouvre grand les yeux et la bouche.
- Quoi ? Non non non, toi aussi, je ne peux pas, c’est….
- Ce n’est rien Aicha, je t’assure. Je suis si contente de voir enfin mon frère si heureux que je suis prête à te donner une de mes boutiques entière wallay. Tu regarderas de plus près à la maison. S’il te plaît Malick va le mettre dans ta voiture avant que Souleymane ne débarque.
- J’ai remarqué son silence. Vous avez encore des problèmes.
- Pas des moindres. J’ai fait exactement ce que tu m’avais dit il y a un mois et là il boude.
- C’est bien, tu commences à avoir du caractère. Fier de toi, dit – il en prenant la valise.
- Qu’est – ce qu’il t’avait dit, demandais – je à Oumy avec curiosité.
- Ben, tu sais ma belle-famille et même ma mère n’arrêtaient pas de me piller comme des sangsues. Il ne se passait pas une semaine sans qu’une d’elle ne vienne à une de mes boutiques prendre un tissu. A la longue, j’allais mettre la clé sous le paillasson puisque tous mes bénéfices passaient par elles. Ca fait six mois que je n’ai pas acheté de marchandises. C’est ton mari qui m’a prêté de l’argent pour aller à Dubaï il y a un mois. Mais avant de partir j’ai programmé un déménagement clandestin de toutes les boutiques. Aujourd’hui personne ne sais où sont les nouvelles, même pas ma mère. Depuis une semaine, on me lance toute sorte de pression et d’insultes…
- Surtout n’abdique pas, je te connais, lui lance Malick en revenant.
- Ne t’inquiète pas. Je suis faible mais pas bête. L’avenir de mes enfants est au-dessus de tout. Dans trois mois au plus, je te rembourse car les caisses commencent à se remplir, dit Oumy en se frottant les mains.
- Je ne suis pas pressé ma grande. Et les enfants, ils reviennent quand ? Elle se tourne vers moi.
La sorcière les a pris ce matin et comme je suis déjà à couteaux tirés avec Souley, j’ai laissé passer. En ce moment ils me cherchent avec leurs provocations tous azimut mais je ne répondrai pas. Tu as une chance inouïe Aicha d’avoir un mari qui te défend toujours devant ta belle famille. Je voulais aussi t’avertir sur ma mère. C’est une femme disons raciste, le genre qui pense que sa race est supérieure à toutes les autres. Alors attend toi à tout venant d’elle.
- Ne fais pas peur à ma femme, tu sais très bien que contrairement à toi, maman n’a aucun pouvoir sur moi.
- C’est vrai. Moi, avant mon mari, je l’avais présenté à un autre et elle a tout fait pour que ce mariage n’ait pas lieu. Au final, elle m’a forcé à me marier avec Souleymane dont la mère est cousine directe de la mienne. Heureusement pour moi que je suis tombée complétement amoureuse de lui après. C’est normal t’as vu comme il est beau.
- Shipp fait Malick à sa sœur. Ecoutez-moi celle – là. Plus amoureuse qu’elle tu meurs. J’ai tendu désespérément la main avant de m’effondrer dans le fauteuil. Ils se sont précipités sur moi affolés.
- Quoi quoi, qu’est – ce qu’il y a, s‘écrie Malick. J’aurai dû faire du théâtre moi. Je prends mon cœur et comme si j’avais du mal à parler, je souffle.
- Tu as dit que plus amoureuse que ta sœur tu meurs, alors c’est ce que je fais. Adieu Malick.
- Moo , dit Oumy avant d’éclater de rire. Malick fronce les cils et me donne une grosse tape à la tête.
- Aie, crie – je, en me massant le crane.
- Toi aussi Aicha, j’ai eu la trouille de ma vie, dit – il en se tenant le cœur. Nous éclatons encore de rire et je m’approche pour toucher sa poitrine qui bat très fort. Hé le gars, il m’aime dé. Je l’ai embrassé tendrement pour lui montrer mon affection. Après cela, on s’est tellement moqué de lui qu’il s’est mis à nous poursuivre partout dans la maison. Nous étions comme des gamins de 6 ans.
Nous avons continué ainsi jusqu’à notre départ. J’étais subjuguée et conquise.
- Ta sœur est vraiment géniale, je l’adore, dis-je à Malick qui se cramponnait au volant.
- Oui elle est extra. Dire qu’il y a sept ans, elle pensait être au bout de sa vie. Je t’assure que je fais semblant mais je déteste son mari. Seulement, ma sœur l’aime et je n’ai pas le droit de m’immiscer dans sa vie de couple.
- D’après ce que j’ai entendu, il est juste comme Mouha et…
- Jamais, il est pire. Attend je te raconte. Je ne sais pas comment maman a réussi à convaincre Papa mais Oumy a été mariée juste après son Bac, à 19 ans. Elle ne l’avait jamais vu mais comme mes parents ont été mariés comme ça et que ça a vraiment marché entre eux alors ils se sont dit pourquoi pas leurs enfants. Bref après le mariage religieux, son mari a demandé à prendre sa femme ce que mon père a par contre refusé. Il disait que sa fille est née et a grandi à Dakar et qu’elle n’allait jamais s’acclimater aux conditions de vie du Fouta. Après un an de tergiversions, son mari, professeur de maths, est descendu à Dakar. Financièrement, mon père l’a beaucoup aidé au début, il a même payé la caution de sa maison à la Sicap. Un mois après la mort de celui-ci, Souleymane est retourné au Fouta en mettant la maison en location. Pendant trois ans, Oumy m’a menti sur sa situation, disant à quel point elle était heureuse, qu’elle vivait seule avec lui dans une belle maison etc… comme j’étais en France, je ne pouvais rien faire. Mais dès mon retour, je suis parti au Fouta pour voir de moi-même. Je n’ai averti personne. Je ne te dis pas dans quelles conditions piteuses je l’ai retrouvée à la grande maison familiale. Le pire est que son mari était retourné à Dakar depuis un an disant qu’il gagnait plus d’argent là-bas qu’au Fouta. J’étais choqué et j’ai tout tenté pour la convaincre de me suivre mais elle a refusé. A mon retour, j’ai fait un gros scandale à ma mère qui jurait qu’elle ne savait pas que le mari d’Oumi l’avait abandonnée la – bas pour venir vivre à Dakar. Bref elle a engagé un bras de fer avec la belle-famille. Mais, plus les jours passaient, plus on se rendait compte qu’il y avait anguille sous roche. J’ai fait mon enquête et j’ai appris que monsieur se la coulait douce avec une autre de mes cousines qui avait à peine dix-sept ans. Malgré cela, Oumi refusait de venir avec nous et disait aimer son mari. Ma mère est allée voir un marabout qui lui a dit que le mari d’Oumy avait pris ses cheveux et ongles et l’avait bien attachée. Je ne croyais pas vraiment à ces trucs mais vu comment ma sœur restait aveuglément avec cet homme, je commençais à douter. Le marabout nous a recommandés de faire réciter le Coran au maximum et de prier pour elle. C’est à cette époque que j’ai compris que ma mère, malgré ces multiples défauts, aimait vraiment ses enfants. Tous les jours sans exception, elle faisait réciter le Coran à la maison. Elle avait engagé 11 garçons rien que pour ça. Au dix-septième jour, on a vu Oumy franchir la porte de la maison avec ses trois enfants. Je ne te dis pas la joie, ce jour-là. Il y avait de l’émotion dans sa voix.
- Waouh ! Mais comment se fait – il qu’elle est de nouveau avec lui.
- Il y a quatre ans, j’ai eu une belle commission dans un de mes procès et j’ai donné la totalité de cette somme à ma sœur qui a ouvert de suite un grand magasin. Mon père disait qu’un cœur en or transforme tout ce qu’il touche en or aussi. Oumi est une femme si gentille et si pieuse qu’en moins de deux ans, sa fortune s’est rapidement fructifiée. Son ex l’a su et est revenu ramper.
- Et elle l’a pardonné ?
- Ce n’est pas pour rien que l’on dit que l’amour est aveugle. Souleymane est son point faible et cela personne n’y peut rien. Mais je te jure que des fois j’ai peur pour elle et je n’ai aucune confiance en cet homme.
- Alors prie toujours pour elle et Dieu la protégera inchalah.
- Inchallah….
Nous sommes dimanche, mon mari et moi, enlacés dans le fauteuil comme des sardines, regardons «Focus », un film de Will Smith. Avec les petites bises qu’il me fait de temps en temps, j’ai bien peur de mettre le film en pause. C’est fou comme en deux semaines seulement Malick a réussi à me changer autant. J’adore faire l’amour et découvrir les plaisirs de la chair humaine. J’aime ce sentiment de quiétude que j’éprouve quand je suis avec lui. Je suis si heureuse que des fois ça me fait peur.
Demain il va commencer à faire la navette et je préfère ne pas y penser pour l’instant. A chaque fois que ça me traverse l’esprit, j’ai un petit pincement au cœur. Il va dormir avec une autre femme, lui faire l’amour, lui dire des mots doux alors forcément ça me fait quelque chose. Son portable sonne. Comme je suis collée de dos à lui, je vois la personne qui appelle : Marianne. Mon cœur fait un bond. Malick raccroche et dépose le portable sur la table basse.
- Pourquoi tu as raccroché, demande – je ?
- Elle va juste me souler alors….
- Ne sois pas trop goujat avec elle. Vous êtes sortis ensemble pendant deux ans, ce n’est pas rien.
- Et qu’est – ce que tu veux que je fasse, demande-t-il un peu agacé.
- Rien, juste que ce n’est pas bien de l’ignorer ainsi.
- Je la connais Aicha et si je me mets à jouer au gentil avec elle, elle va s’incruster dans ma vie. C’est mieux ainsi. Le téléphone recommence à sonner.
- S’il te plaît prends et vois ce qu’elle te veut. Il me regarde deux secondes, avant de décrocher. Le cri derrière le combiné est tellement fort que Malick le détache de son oreille. J’ouvre grands les yeux et lui il raccroche automatiquement. On se regarde de nouveau avant de se tordre de rire.
- Je te l’avais dit, cette fille est complétement maboule.
Nous reprenons notre position et remettons le film en marche. Plus tard, quand je voulus faire le diner, Malick a refusé. Le motif, le gars dit qu’il veut s’imprégner de moi au maximum car il ne va pas être avec moi durant deux jours. Comme si on n’allait pas se voir au bureau, un vrai dramaturge celui-là.
Malick : l’agression
Cette nuit j’ai enlacé très fort Aicha dans mes bras, on dira que j’exagère mais plus les heures passent plus je suis stressé et énervé à l’idée de rester deux jours sans la prendre dans mes bras. Mouha a raison, je ne suis vraiment pas un polygame. A deux reprises, j’ai pris mon portable pour appeler Abi et lui dire que finalement je prends un mois. Mais la connaissant, c’est sûr qu’elle allait me faire un de ces scandales.
Le lendemain nous avons quitté l’appartement en silence. J’ai essayé de faire la conversation mais le cœur n’y était pas, alors je me suis tu. Même si Aicha m’a lancé de temps en temps un sourire histoire de me montrer que tout va bien, je sens qu’elle est dans le même état que moi. Nous descendons de la voiture et je prends sa main.
Au moment où je traverse avec Aicha le hall, quelqu’un tire violement sur mon costume me déséquilibrant. Le temps que je me remette sur les pieds, je vois Marianne en furie attaquer Aicha. Pan, un coup de poing direct sur la mâchoire et un grand coup de pied au ventre. Mon sang fait un tour. En deux temps trois mouvements, je les ai rejoints et j’ai empoigné très fort Marianne avant de lui donner une retentissante gifle qui l’a expédiée au sol. Le temps que je touche Aicha pour voir si tout allait bien, mademoiselle rapplique et cette fois avec plus de hargne. Waw, j’étais sidéré. Comme elle fait des cours de self défense, j’ai eu du mal à la maitriser. J’aurai pu lui donner une belle droite mais c’est une femme alors je l’ai maitrisée jusqu’à l’arrivée de la sécurité. Elle criait si fort en se débattant. Quand mes deux agents ont pris la relève, elle a dit quelque chose qui m’a glacé sur place.
- Je ne sais pas comment ni quand mais je te jure que je vais vous détruire. J’en fais le serment moi Marianne Cissé la fille de son père.
J’ai attendu qu’elle disparaisse de ma vue pour me retourner vers Aicha qui se tenait toujours le ventre. Elle est plus aussi sonnée que moi.
- Ça va ? lui demandais – je
- Oui, un peu secouée c’est tout. Je la prends dans mes bras et sens son cœur battre très fort.
- Excuse-moi mon amour je ne savais pas qu’elle pouvait être si violente.
- En tout cas, la prochaine fois que je la verrais, je fais un sprint direct. Pourquoi tu ne m’as pas dit que c’est la petite sœur de Bruce Lee. J’éclate de rire avant de l’amener vers l’ascenseur.
- Je te promets qu’elle ne s’approchera plus de toi.
- Qu’est-ce que tu as l’intention de faire.
- D’abord porter plainte ensuite engager un processus qui fera qu’elle ne s’approche plus de toi.
- Mo tu ne crois pas que tu exagères, dit – elle en faisant une grimace.
- Tu as mal ? Et si on allait à l’hôpital, dis-je en m’approchant d’elle.
- Hôpital diam? Yaw Malick…
- Aicha, ta joue commence à enfler et tu te tiens toujours le ventre, je…
- J’ai vu pire Malick alors s’il te plait oublions cette histoire. Mon cœur se serre quand elle dit cela.
- J’ai promis de te protéger et elle va regretter de t’avoir attaquée. N’essaye même pas de me convaincre. En plus tu l’as entendu, ne prend pas à la légère sa menace. Elle s’approche langoureusement et se colle à moi.
- La pauvre est juste désespérée et c’est normal : tu t’es vu ? Thiofé, rofé, doré (un homme avec tout ce qu’il faut). Je me retiens de rire.
- Tu es folle. L’ascenseur s’ouvre, je l’accompagne jusqu’à son bureau avant de rejoindre le mien. La première chose que je fais c’est d’appeler Maitre Guirane, il est fort dans les affaires d’agression. Dans notre cabinet, ce qui fait notre fort c’est que dans chaque domaine juridique nous avons un expert. Ensuite, j’ai appelé le chef de la sécurité pour qu’il me procure la vidéo du hall. Une heure plus tard, j’avais tout réglé. Dans moins de 48 heures, elle va recevoir une assignation directe.
Suzanne est arrivée avec la même remontrance du genre je te l’avais dit, cette fille est folle, bref vous savez quoi. Revenu au calme, j’essaye de me concentrer sur un de mes dossiers mais je n’arrête pas de penser à Aicha. Alors je décide d’aller voir si elle va mieux et quelle ne fut pas ma panique quand je l’ai trouvée allongée sur son petit divan. J’ai couru et me suis accroupi.
- C’est quoi ? Tu as toujours mal ? Pourquoi tu ne m’as pas averti.
- Thiey, j’ai un peu mal au bas ventre mais ça va, je….
- Viens on va à l’hôpital. Elle ouvre la bouche…Arrête de prendre tout à la légère. J’ai vu le coup de pied qu’elle t’a donné. Alors tais-toi et suis moi, lui criais – je. Elle se lève en boudant mais fait encore une grimace. La peur qui commençait à monter, s’est intensifiée quand le médecin lui a demandé la dernière fois qu’elle a vu ses règles. J’ai arrêté de respirer en attendant la réponse de Khadija qui tardait à venir.
- Je ne sais plus, dit – elle en me regardant cette fois alarmée. Je n’ai pas l’habitude de regarder la date de mes menstrues. Elle ferme les yeux comme pour réfléchir. Mon Dieu, je ne pourrais pas vous dire la date mais je suis sûre que ça fait plus d’un mois. Vous croyez que… sa voix se casse, je m’approche et lui prend très fort la main en lui donnant une bise sur le front.
- Calme-toi bébé. Elle a commencé à pleurer, moi j’essayais juste de garder mon sang froid au maximum possible alors que je bouillais de l’intérieur. Le médecin lui a tendu un test de grossesse et cinq minutes plus tard, c’est confirmé : Aicha est bel et bien enceinte. Le médecin l’a amené faire un scanner et quelques analyses. Je faisais les cents pas dans le couloir tellement j’avais la frousse. Je vais tuer Marianne si jamais il arrive quoi que ce soit à eux.
Quand j’ai vu le médecin sortir du couloir, je me suis figé mais son sourire rassurant m’a calmé.
- Tout va bien, vous pouvez respirer, dit – il d’un ton taquin. Le coup au ventre fait toujours très mal mais heureusement pour elle, il n’y a pas eu de traumatisme. Le scanner n’a montré aucune blessure interne à part une petite mais vraiment minuscule ouverture de l’embryon. Mon cœur reprend la chamade, il a bien dit ouverture. Ce n’est rien, je vous assure, elle va juste devoir rester deux jours sous surveillance et après elle pourra reprendre ses activités.
- Si elle va bien pourquoi la retenir deux jours. Qu’est – ce que vous me cachez ? Son sourire s’agrandit avant qu’il ne réponde.
- Si vous voulez, elle peut partir seulement les femmes sont têtues et elles ne respectent jamais les consignes données par leurs médecins. Si vous pouvez la surveiller tant mieux. Sachez qu’elle doit rester couchée pendant 48h d’affilée.
- Non je préfère qu’elle reste ici, c’est mieux. Je veux la voir.
- Oui bien-sûr. Suivez-moi. Je la retrouve couché sur le lit, pensive. Le sourire qu’elle me lance est à la fois triste et joyeuse. Je la prends dans mes bras pendant je ne sais combien de minutes.
- Tu es rapide toi, à peine deux semaines et me voilà déjà enceinte.
- Mes petits soldats sont efficaces. Je suis fier d’eux. Elle éclate de rire et moi de même. Mon portable sonne, je regarde c’est Abi, je décroche.
- Tu es où ?
- Bonjour Abi, je ne savais pas que j’ai des comptes à te rendre par rapport à mes déplacements.
- Ecoute Malick, aujourd’hui c’est mon tour et toi tu sors avec Aicha pour aller je ne sais où ?
- Tu es au bureau ?
- Oui bien sûr, cria-t-elle. Tu es où j’ai dit.
- A l’hôpital, Aicha a été agressée ce matin et ….
- Shippp c’est ce que tu as trouvé comme mensonge. Quel hôpital ? J’ai raccroché et mis le phone sous silence avant de rejoindre Aicha.
- Je n’arrive pas à croire que j’attends un bébé.
- J’aurais voulu que ça ne soit pas si tôt.
- Ah bon pourquoi ?
- D’abord parce que je ne pourrais plus te faire certain trucs et en plus tu vas commencer ces caprices de femme enceinte beurk. Elle a commencé par me poser de multitudes de questions jusqu’à finir par s’endormir. Je suis retourné au bureau le cœur plus léger. Suzanne m’attendait toute anxieuse et quand elle a appris la nouvelle, elle a sauté partout dans le bureau. Ensuite elle m’a raconté le petit scandale d’Abi et les insultes qu’elle a proférées quand elle a essayé de lui expliquer ce qui s’est passé.
- Bilay Malick, la prochaine fois je l’affronte malgré sa gabarie.
- Tu es sûre ? Demandais – je d’un ton espiègle.
- Daouda va m’aider, dit – elle incertaine. Je pouffe de rire.
J’ai essayé de reprendre tant bien que mal le boulot et j’ai quitté le bureau vers 18 h. Je suis retourné voir Khadija où je suis resté jusqu’à 20 h.
Avant de démarrer la voiture, je regarde mon portable. Quinze appels manqués : neuf d’Abi, deux de ma mère, un d’Oumi et le reste des clients….. Cette fille a alerté la terre entière dit – donc. Quand je me gare, je suis très remonté contre elle. Je déteste que l’on me manque autant de confiance. Dès que j’entre dans la maison, elle lance les hostilités.
- C’est à cette heure que monsieur se pointe, quel toupet ! Je ne vais pas accepter que tu me manques autant de respect……Je ne l’écoute pas et fais un sprint vers l’escalier. J’entre dans la chambre et enlève mes habits pour finir à la douche en fermant à clé. Je risque de la frapper si je lui réponds. Je l’entends crier derrière la porte et dire du n’importe quoi. Je sens que je vais craquer même si j’ai promis à Aicha, avant de partir, de lui parler calmement. J’ai pris tout mon temps pour prendre mon bain et en sortant madame s’est calmée et pleure silencieusement couchée dans son lit. Je me suis dirigé vers l’armoire ou j’enfile ma tenue de prière. J’ai prié pendant longtemps d’abord pour me calmer ensuite pour remercier Dieu du don qu’il venait de me faire. Quand je me lève de ma natte de prière, Abi s’approche de moi en disant.
- Tu viens manger, j’ai….Le regard que je lui lance la fait taire de suite. Tu tu… elle se tait et baisse la tête. On dit souvent que la première réaction de la jalousie c’est la folie, la deuxième le regret.
- Tu sais ce que je déteste le plus dans ton attitude, c’est le fait de vouloir jouer les victimes et donner l’impression au monde entier que je t’abandonne parce que j’ai épousé une autre femme.
- Ce n’est pas…
- Tais-toi quand je parle, criais – je si fort qu’elle a sursauté. Pour qui tu me prends Abi, ton copain ? Parce que je suis gentil avec toi, tu te permets de m’insulter quand cela te chante. Tu me traites encore de menteur ou un de ces dérivés et je te jure que tu verras mon côté sombre. Mon portable sonne, c’est ma mère, je décroche avec hargne.
- Enfin tu daignes répondre à ta mère, c’est quoi cette histoire ? Malick, je ne veux pas que tu trahisses ta femme pour….
- Maman criais – je. Est-ce que tu me connais injuste ?
- Non mon fils.
- J’ai amené Aicha à l’hôpital parce qu’elle a eu un accident alors qu’elle est enceinte. Le médecin l’a retenue pour deux jours puisqu’elle a une petite ouverture. Tout en parlant, je regarde Abi qui ouvre grand avant de se tenir la bouche.
- Je ne savais pas mon fils. Elle va mieux ? Abi croyait…
- Abi se comporte comme une enfant en jouant les petites filles impolies et jalouses. Avec moi ça ne marche pas car je n’ai ni le temps ni l’envie de jouer au chat et à la souris, encore moins de me justifier comme un gamin de quinze ans. Si elle continue dans cette lancée, elle va me perdre.
- Ne dis pas ça mon fils. Repose-toi et demain on en reparlera plus calmement. Aicha est dans quel hôpital.
- Clinique royale.
- J’irai la voir demain et je parlerai avec Abi. Félicitation mon fils, je t’aime tu sais.
- Moi aussi maman, merci maman, dis – je avant de raccrocher. Je m’assois sur le bord du lit, c’est vrai que la fatigue émotionnelle est plus forte que la fatigue physique. Abi vient s’agenouiller devant moi en me présentant des excuses. Je l’écoute à peine et m’allonge. En ce moment, la seule chose dont j’ai envie c’est d’être à côté d’Aicha…. C’est trop dur.
Par Madame Ndèye Marème DIOP
Chronique précédente, cliquez ICI