CHRONIQUE DE WATHIE
A peine a-t-elle ouvert la bouche qu’une avalanche de critiques s’abat sur elle. Après le président de la Fédération de judo qui, avec des menaces à peine voilées, a savonné la judokate, Mamadou Diagna Ndiaye est monté, à son tour, au créneau pour clouer au pilori Hortense Diédhiou. Sa déception, personne n’a en rien à faire, tout comme les conditions qui ont sous-tendu sa défaite, l’essentiel est qu’elle la boucle et que la roue tourne.
Nul besoin d’attendre la fin des Jeux Olympiques pour se rendre à l’évidence que le Sénégal ne sera pas cité parmi les pays qui se sont illustrés. Les maigres espoirs d’engranger une médaille, même de bronze, s’évaporent au fil des sorties des athlètes sénégalais, en attendant Amy Sène, l’invitée qui veut faire la surprise. Du basket à la natation en passant par l’escrime, les lions ne sont de taille dans presque aucune discipline. Seulement, les autorités en charge du Sport voudraient, comme à l’accoutumée, que le constat s’arrête à cela. Leur responsabilité dans cette contreperformance généralisée n’est pas à chercher. Comme si de rien n’était, elles voudraient que les athlètes, dans une totale omerta, taisent leurs conditions de préparation, de départ pour le Brésil et de participation aux jeux. Et à l’instar des désastreuses campagnes précédentes, rentrer à la maison la tête basse, en attendant d’avoir une autre occasion pour réitérer les mêmes contreperformances. Il est, peut-être, compréhensible que le Sénégal, ce pays à peine visible sur la carte du monde, ne se fasse pas remarquer quand les meilleurs du monde se rencontrent. Mais, en plus d’être handicapés par cette dernière considération, les athlètes sénégalais ont été négligemment fagotés et envoyés à Rio où ils ne pouvaient guère être brio. «Les gens sont libres de croire qu’on peut gagner contre l’Espagne et la Serbie. Mais personnellement, je sais que ce n’est pas possible. Je reste sur mon objectif : l’Afrobasket». Ces propos du sélectionneur de l’équipe nationale féminine de basket peuvent renseigner sur l’état d’esprit de la délégation sénégalaise présente au Brésil. Et pour étayer son pessimisme, Moustapha Gaye ne manque pas d’arguments. «Je l’ai dit et je le répète. Ce n’est pas en restant à Marius NDIAYE à s’entrainer qu’on y arrivera, qu’on gagnera dans le haut niveau. Pour le top niveau, il faut aller jouer des matchs relevés. Dans le haut niveau, c’est la pré-compétition qui prépare la compétition. C’est ça la réalité. Elle est cruelle mais c’est ça», martèle le coach. Avant lui, c’est Hortense Diédhiou qui l’avait ouverte, mettant à nu des manquements déconcertant concernant l’encadrement de la délégation sénégalaise. «Je ne suis pas très déçue de ce que j’ai fait. Mais, je suis très déçue du manque d’accompagnement et de soutien des autorités. Aujourd’hui, la seule chose qui tienne dans le haut niveau, c’est l’encadrement de la personne aux niveaux moral, physique et financier. Ces filles-là ne sont pas plus fortes que moi (…) J’ai fait beaucoup d’attaques et peut être que si le coach était là, il allait me dire de me calmer. Pour moi, l’erreur c’est de monter (sur le tatami) sans mon coach (…) C’est la fédération qui décide de qui vient m’accompagner. Je me suis préparée avec un entraineur depuis le début de l’année en pensant qu’il allait m’accompagner. Malheureusement, j’ai su à la dernière minute que c’est plutôt le DTN qui vient m’accompagner», a soutenu l’athlète.
Mais non ! Hortense n’avait pas à l’ouvrir. Elle devait ravaler sa fierté, étouffer sa déception et réprimer sa colère. Elle n’avait pas à révéler qu’elle est montée «sur le tatami avec le kimono du Brésil». Et qu’elle a troqué les couleurs nationales parce que les arbitres lui ont dit, juste avant qu’elle n’engage le combat, qu’elle ne pouvait pas porter le kimono du Sénégal. Car, il y avait deux marques de sponsor alors qu’il ne devrait y avoir qu’une seule. Non, elle est allée trop loin. Et c’est Mamadou Diagna Ndiaye, qui ne sait pas ce qu’un athlète de haut niveau peut penser pour n’avoir jamais porté dans aucun stade le maillot national, qui le lui rappelle. «Il y a un principe dans la charte olympique. On ne critique pas son pays à l’étranger », déclare le président Comité national olympique et sportif sénégalais (CNOSS). Oubliant le coach des basketteuses qui n’a pas, non plus, attendu la fin des matchs de poule pour déplorer la mauvaise préparation de son équipe, Mamadou Diagna Ndiaye se défoule sur Hortense Diédhiou. «On ne règle pas ses comptes en fin de carrière à l’étranger (…) Il faut garder un niveau de vraisemblance dans toute chose. C’est sans doute une grande combattante même si elle ne nous a jamais amené de médaille», explique-t-il, sans trembler. Comme un portable sans réseau, Mamadou Diagna Ndiaye fait fi de la douzaine de médailles continentales, des 3 titres de championne d’Afrique remportés par la judokate qui était, aux derniers Jeux olympiques de Londres, le porte-drapeau du Sénégal. Si Mamadou Diagna Ndiaye est devenu d’un coup amnésique, c’est qu’Hortense a touché là où ça fait vraiment mal.
En déclarant, en plein tournoi des Jeux Olympiques, que son objectif reste l’Afrobasket, Moustapha Gaye n’a pas simplement mis en évidence l’état d’esprit de son équipe, il a également donné un indice sur ce que les Sénégalais font réellement au Brésil : du tourisme. La délégation de 52 membres compte 22 athlètes. Allez chercher qui sont les autres. Allez savoir si les 800 millions de nos francs annoncés par le Premier ministre n’ont pas servi d’argent de poche pour shopping, le Comité International Olympique ayant réglé toutes les notes. Mais, il s’agit, ici, d’un tourisme particulier. Il n’est pas question de dépenser de l’argent, au contraire on cherche à en empocher quitte à enfreindre les règles et de voir un athlète sénégalais habillé tel un Brésilien.
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Par Mame Birame WATHIE