La polémique ne fait que commencer. Après le débat sur le dépistage du cancer du sein menant parfois à un sur-diagnostic, c’est au tour de celui du cancer de la peau d’être remis en cause. Alors qu’en France, les campagnes de prévention nous conseillent de faire surveiller nos grains de beauté chaque année, aux Etats-Unis, un examen de la peau annuel permet de faire le point. Pour déterminer le bénéfice réel d’une telle démarche, le groupe consultatif «U.S. Preventive Services Task Force » (USPSTF), composé d’experts médicaux, s’est penché sur la question. Résultat, il estime «insuffisantes les preuves pour déterminer si les bienfaits potentiels d’un examen annuel par un médecin sont plus grands que les risques » chez les personnes sans précédent familial de mélanome ou de prédispositions particulières. Publié dans le Journal of the American Medical Association (JAMA), leurs conclusions citent notamment les risques de diagnostics erronés ou les prélèvements inutiles entrainant des complications. Dans un éditorial également publié dans le JAMA, le Dr Martin Weinstock, professeur de dermatologie à la faculté de médecine de l’université Brown à Providence, dit comprendre la méthodologie suivie par l’USPSTF mais émet un doute sur ses conclusions.
Des conclusions qui agacent les dermatologues
«Déterminer scientifiquement l’utilité de ces examens demanderait des résultats d’essais cliniques très étendus vu la faible mortalité liée du cancer de la peau » oppose le Dr. Weinstock. Or l’USPSTF n’a pas cherché à s’appuyer sur des opinions d’experts. «Le groupe tire ses conclusions sur des données provenant d’un ensemble d’essais cliniques strictement contrôlés. Mais pour le cancer de la peau, ces informations sont assez réduites », pointe le dermatologue. Le Dr Weinstock souligne que «la vaste majorité des dermatologues pensent qu’une détection précoce des mélanomes réduit le risque de mortalité, et l’examen de la peau est le principal outil pour cela ». L’American Academy of Dermatology (AAD) a réagi aux conclusions de l’USPSTF en défendant l’utilité du dépistage. «Les dermatologues savent que le dépistage du cancer de la peau peut sauver des vies », a déclaré le président de l’AAD. Avec 3,3 millions de cas diagnostiqués en 2016, la tumeur maligne de la peau est le cancer le plus fréquent aux Etats-Unis. Pour la plupart des formes bénignes, 76 000 mélanomes provoqueront tout de même plus de 10 000 décès. En France, ce sont 60 000 nouveaux cas diagnostiqués par an, dont près de 7500 mélanomes. Le bras de fer n’en est qu’à son premier round.
Top Santé