Depuis la dernière Assemblée générale de la Croix-Rouge sénégalaise, qui a permis au président sortant de rempiler pour un second mandat, les critiques fusent de partout quant à la régularité de l’élection. Entre accusations des uns et dénégations des autres, le dossier a fini entre les mains de dame Justice.
Les responsables de la Croix-Rouge sénégalaise ont décidé de laver leur linge sale en dehors de leur famille. Après moult tentatives de médiation qui se sont révélées comme de véritables coups d’épée dans l’eau, un des antagonistes a décidé de porter l’affaire devant les tribunaux. Pour comprendre les raisons de cette dernière crise, il faut remonter au-delà de l’Assemblée générale tenue au mois de décembre 2014 qui a consacré la réélection d’Abdoul Azize Diallo à la tête de l’organisation.
Le président pointé du doigt…
Pour les protestataires, Abdoul Azize Diallo a foulé du pied l’essentiel des textes régissant la Croix Rouge en créant un boulevard lui permettant de rempiler sans laisser la moindre once de chance à ses potentiels adversaires. Pour Ousseynou Badio, chef de file de contestataires, Abdoul Aziz Diallo a fait un forcing en organisant une élection aux antipodes de la démocratie. « Il a juste écarté ceux qui pouvaient lui causé des ennuis et saborder sa réélection », observe-t-il. Le président du Sous-comité local de Guinaw rail et non moins membre du Bureau national de la Croix Rouge rechigne toujours à cautionner la lettre circulaire du Comité national annonçant la suspension du Comité départemental de Pikine d’où il dépend. En effet, ladite lettre, en date du 20 octobre 2014, informe que le Bureau national de la Croix-Rouge s’est réuni le 14 octobre 2014 et a pris un certain nombre de mesures. La première indique que : «le bureau national charge le président de la Croix-Rouge sénégalaise de superviser directement toutes les procédures de la poursuite des renouvellements». Si cette mesure suffit, aux yeux des contestataires, à prouver l’implication d’Abdoul Azize Diallo dans les tiraillements qui ont émaillé les renouvellements des instances de base, la deuxième constitue une pilule qu’ils estiment être dans l’impossibilité d’avaler. Celle-ci explique : « Les comités départementaux visés (Ndlr Bambey, Diourbel, Gossas, Guinguinéo, Kaolack, Kébémer, Kounghoul, Medina Yoro Foulah, Podor, Pikine, Sédhiou) sont suspendus jusqu’après la tenue de l’Assemblée générale». Avec cette dernière mesure, Ousseynou Badio et ses camarades contestataires croient entrevoir une stratégie mise en branle pour permettre à Abdoul Azize Diallo de se débarrasser de ses contempteurs. Estimant ne pas comprendre pourquoi les responsables de Pikine ont été suspendus, ils brandissent une pile de documents devant attester des nombreuses démarches qu’ils ont entreprises en vue de se conformer. « Face à des gens prêts à tout pour saboter les renouvellements, le président aurait dû trancher au lieu de décider de la suspension du Comité départemental de Pikine », observent-ils. Ce ne sont pas les seuls reproches qu’ils vont formuler à l’endroit du président de la Croix-Rouge. En effet, revenant sur l’Assemblée générale du mois de décembre 2014, les contestataires relèvent que celle-ci s’est tenue sans que le quorum ne soit atteint. Selon les textes de la Croix-Rouge, pour que l’Assemblée générale puisse délibérer, il faut que les 2/3 des comités soient présents. Seulement, indiquent Ousseynou Badio et ses camarades, sur 86 comités, seuls 54 étaient représentés. « Vous vous rendez compte, une assemblée générale sans bilan financier, cela ne s’est vu qu’au niveau de la Croix-Rouge, c’est du n’importe quoi. Et il n’y a même pas de commissaire aux comptes. Comment voulez-vous dans ces conditions parler de transparence», martèlent-ils. Même son de cloche à Diourbel où, embouchant la même trompette, la responsable du Comité départemental ne se casse pas la tête pour trouver les raisons qui fondent la suspension du comité qu’elle préside. « Depuis plusieurs mois nous attendons vainement les financements qui ont été prévus pour Diourbel. Et c’est parce que nous continuons à réclamer ces 15 millions qui ont effectivement été décaissés que nous gênons ceux qui sont en haut. Ce qui s’est passé n’est rien d’autre que de la liquidation », peste Raby Ndiaye. Poursuivant et très en verve, elle renseigne qu’une plainte a été justement déposée pour faire la lumière sur cette manne qui leur vaut une suspension.
…récuse et accuse
Face à ce chapelet de reproches, la version du président Abdoul Azize Diallo était des plus attendues. Trouvé à son bureau, dans les locaux de la Croix-Rouge, il balaie d’un revers de main l’essentiel des manquements qui lui sont imputés. Estimant n’avoir rien à voir avec les tiraillements qui ont été notés lors des renouvellements des instances de base de certaines localités, il trouve que ces responsables suspendus doivent s’en prendre à eux-mêmes. « Je les ai convoqués ici, dans mon bureau afin qu’ils trouvent un terrain d’entente. Au lieu de se retrouver autour de l’essentiel, ils en sont venus aux mains. Ils ont été séparés», explique-t-il. Poursuivant, le sieur Diallo informe : « Nous ne pouvions pas reporter l’Assemblée générale en attendant qu’ils soldent leurs comptes ». Interpellé sur le quorum qui ne serait pas atteint lors de l’Assemblée générale, le président botte en touche et invoque les comités départementaux suspendus et les responsables ayant voté par procuration. S’agissant de la plainte que ces pourfendeurs ont déposé aux fins d’annuler l’Assemblée générale, Abdoul Azize Diallo se dit disposé à se conformer à la loi et compte appliquer tout ce qui émanera du tribunal. Affaire à suivre !
Mame Birame WATHIE