C’est pour des raisons de sécurité que l’imam Ndao et ses codétenus sont transférés de Rebeuss à la prison de Saint-Louis. Un transfèrement qui rappelle celui de John Oby.
La décision est effective, depuis hier. Toutes les personnes récemment inculpées puis placées sous mandat de dépôt, pour des infractions liées au terrorisme, ont été transférées vers la Maison d’arrêt et de correction (Mac) de Saint-Louis.
Il s’agit, selon nos informations, d’une décision purement administrative prise par l’Administration pénitentiaire elle-même, «sans ordre du juge d’instruction en charge du dossier».
Plusieurs facteurs sont à l’origine de ce déplacement des présumés Djihadistes vers un autre pénitencier. La première raison invoquée par les sources de Wal Fadjri est d’ordre sécuritaire. «Les risques sont énormes. Leur maintien à Rebeuss expose cette prison à une insécurité à cause des nombreuses visites qui commençaient à s’y opérer. Cela allait créer une grande ruée vers la prison centrale de Dakar déjà forte de plus de deux mille détenus», confie une source. Mais la plus grosse crainte, c’est le contact avec les pensionnaires de Rebeuss déjà en colère symbolisée par une grève de la faim, pour protester contre les longues détentions.
Le deuxième motif invoqué, c’est pour éviter tout contact entre ces présumés Djihadistes récemment emprisonnés et les personnes déjà en détention, au même lieu, pour ces mêmes faits. Avec notamment l’imam Aboubacar Dianko détenu à la chambre 43 depuis trois ans maintenant. «C’est pour éviter tout contact entre personnes poursuivies pour les mêmes infractions que la décision de transfèrement a été prise par la hiérarchie», révèle une autre source jointe par Wal Fadjri.
Le choix de Saint-Louis n’est pas le fait du simple hasard en cela que cette prison offre des conditions de sécurité plus optimales. Cela, même si elle a dépassé sa capacité d’accueil, car elle est comprise dans le cercle des 20 établissements pénitentiaires surpeuplés. «La Mac de Saint-Louis est destinée à accueillir 250 détenus. A ce jour, son effectif carcéral s’élève à plus de 500 pensionnaires», révèle une source judiciaire.
Ce transfèrement n’est pas sans conséquences, car cela risque de porter préjudice à l’instruction du dossier. «A ce stade de l’information judiciaire, il doit y avoir un rapprochement entre les détenus et leur cabinet plutôt qu’un éloignement. Si le juge a besoin de les entendre, il va falloir déployer des moyens et de l’argent pour les acheminer sur Dakar avec une bonne escorte, avec tout ce que cela comporte comme risque», regrette Waly Mbodj, surveillant de prison principal de classe exceptionnelle à la retraite. C’est dans les prochains jours ou mois que l’imam Ndao et Cie seront entendus sur le fond par le juge d’instruction en charge de leur dossier. Une occasion, pour leurs avocats, de pouvoir introduire des «demandes de mise en liberté provisoire».
Contrairement au «transfèrement judiciaire» qui est ordonné par le juge, le «transfèrement administratif» est une prérogative de l’administration pénitentiaire qui peut concerner aussi bien des détenus provisoires que des détenus condamnés. C’est ainsi qu’«en cas de transfèrement administratif, la personne concernée par la mesure ne change pas de juridiction». C’était le cas notamment pour Cheikh Béthio Thioune. Il a été momentanément à Rebeuss lorsque le juge de Thiès a été dessaisi par la Cour suprême au profit du doyen des juges de Dakar. «On peut transférer les appelants dont leur présence physique devant la Cour d’appel n’est pas obligatoire et les détenus provisoires», confie Ibrahima Sy, directeur de prison à la retraite.
Ce n’est pas la première fois que des détenus soient transférés de Dakar vers une prison régionale. Le plus souvent, le lieu de destination est tenu secret, sauf pour la famille du concerné. C’était le cas pour le trafiquant de drogue (il a été déclaré coupable, Ndlr) John Oby qui a été transféré du Camp pénal de Liberté 6 à la Mac de Saint-Louis. Ce qui avait poussé son avocat, Me Ciré Clédor Ly, à dénoncer un «kidnapping».