Le Doyen des juges du tribunal de Dakar a émis trois convocations dans le cadre de l’enquête relative au dossier Arcelor Mittal, selon Libération. Ces convocations concernent des personnalités de l’ancien régime, appelées à comparaître en qualité de témoins dans cette affaire qui avait suscité de vives dénonciations de la part d’Ousmane SONKO, alors opposant.
Cette affaire, longtemps mise en veille, connaît un nouveau rebondissement après plusieurs années d’accalmie. Une information judiciaire a été ouverte par le Parquet de Dakar pour une série d’infractions, notamment association de malfaiteurs, corruption, recel, blanchiment de capitaux, escroquerie et complicité. Cette procédure fait suite à une plainte déposée par l’État du Sénégal contre plusieurs entités du groupe Arcelor Mittal, dont Arcelor Mittal Holding AG, Arcelor Mittal Mining Sénégal SA et Arcelor Mittal Infrastructure Sénégal SA.
La cause de cette plainte se trouve dans l’accord conclu en 2014 entre l’État du Sénégal et la multinationale sidérurgique. Cependant, les précédentes tentatives d’audition des dirigeants d’Arcelor Mittal n’avaient pas abouti.
Comment le régime de Macky a fait perdre des centaines de milliards à l’Etat du Sénégal
Tout commence en avril 2011, lorsque l’État sénégalais décide d’attaquer Arcelor Mittal devant la Chambre de Commerce Internationale (CCI) pour non-respect des engagements pris dans le cadre du développement et de l’exploitation du gisement de fer de la Falémé. Le Sénégal réclame alors 3 300 milliards de FCFA, ou à défaut, 1 600 milliards de FCFA, en guise de réparation.
Le 3 septembre 2013, la CCI rend une sentence accablante pour Arcelor Mittal, constatant de graves manquements de la part de la multinationale et ordonnant la poursuite de la procédure vers une phase de réparation. Tout semblait indiquer que l’État du Sénégal allait obtenir gain de cause et récupérer une somme significative.
Un douteux accord transactionnel
Mais contre toute attente, le 4 juin 2014, le cabinet américain Cleary Gottlieb Steen Hamilton, représentant Arcelor Mittal, annonce au tribunal arbitral qu’un accord transactionnel a été signé avec l’État du Sénégal, mettant brutalement fin à la procédure. Montant du deal ? 150 millions de dollars (environ 90 milliards de FCFA), une somme bien inférieure aux montants initialement réclamés.
Ce qui intrigue encore plus, c’est la manière dont ces fonds ont été gérés. Selon Libération, les 150 millions de dollars ont été virés sur deux sous-comptes CARPA, domiciliés à la BNP Paribas et gérés par un avocat français, Me François Meyer. Or, ce dernier n’était pas impliqué dans la procédure initiale. Pire, les avocats de l’État, Mes Rasseck , Bourgi et Sébastien Bonnard, ont découvert avec stupéfaction cet accord le jour même de son officialisation. Dans un courriel versé au dossier, ils ont même pris leurs distances en précisant qu’ils n’avaient jamais été impliqués dans cette négociation.
Khadydja NDIAYE