Dans l’attente des résultats définitifs que va publier la Commission nationale de recensement des votes vendredi prochain, l’on s’achemine inéluctablement vers l’élection à la magistrature suprême de Bassirou Diomaye Faye, le candidat de l’antisystème. Ce qui sonne comme un séisme dans le camp de la Majorité.
Le sourire mi-figue, mi-raisin du candidat de Benno Amadou Bâ cache mal son amertume face à son poulain avec lequel il collaborait ensemble à la Direction générale des impôts et domaines (Dgid). 24 heures après la compilation des résultats, le verdict des urnes sonne comme un uppercut : Bassirou Diomaye Faye, le numéro 2 de Pastef a fini de déjouer tous les pronostics qui le voyaient comme un bon deuxième ou encore un des favoris d’un second tour inéluctable. Son élection à la magistrature suprême a entraîné un torrent de commentaires aussi vague que le tsunami qui a accompagné l’accession de Diomaye Faye à la tête de l’Etat, histoire de percer le secret de ce coup d’essai qui s’est révélé un Ko.
Celui qui, il n’y a guère longtemps, était presque un anonyme inspecteur des Impôts et Domaines, qui a fini par se retrouver en prison du fait de sa proximité avec Ousmane Sonko, récolte les dividendes d’une campagne électorale dont le véritable directeur de campagne n’est autre que le président sortant Macky Sall himself.
Acte 1 : «le harcèlement» contre «le parrain de Diomaye» qui a fini de voir en celui-ci un remplaçant pour échapper à son bourreau et de sauver in extremis son fameux projet, la dissolution «du plus sérieux parti rival» le 31 juillet 2023 suivi plus tard par l’embastillement des cadres de ce parti dont l’arrestation de celui qui préside à nos destinées depuis hier, et qui va prendre officiellement ses fonctions à partir de ce 2 avril courant, à la veille de l’indépendance.
«Les coups Ba entre camarades de la Majorité… »
L’autre coup de pouce de Macky Sall à son désormais successeur réside dans «le coup de poignard» asséné au processus électoral, à dix heures de l’ouverture de la campagne électorale. Par le truchement d’une supposée crise dont il a lui seul le secret, il a décidé, contre toute attente, de repousser sine die l’élection présidentielle qui ne s’est finalement tenue que ce dimanche passé. Cela, après plusieurs tumultes qui ont conduit à quatre morts. De quoi rallonger la série macabre «de la lutte pour les libertés individuelles et collectives» qui a escorté le Sénégal depuis mars 2021. Ce qui ne semble point émouvoir Macky Sall qui a asséné un autre coup assassin, à travers la loi d’amnistie «de tous les faits susceptibles de revêtir la qualification d’infraction criminelle ou correctionnelle commis entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024, tant au Sénégal qu’à l’étranger, se rapportant à des manifestations ou ayant des motivations politiques», votée le 6 mars. Fait curieux, la loi d’amnistie qui est largement favorable au Pastef parce qu’ayant conduit à la libération d’Ousmane Sonko et de Diomaye Faye s’est retournée contre son propre auteur.
L’élargissement d’Ousmane Sonko, le gourou et porte-voix d’une jeunesse sans emploi, le 15 mars, à huit jours de la présidentielle, a donné un autre coup de lifting à un scrutin ô combien crucial. Le capital de sympathie de Sonko aidant, combiné à une vie chère qui n’en finit pas de prendre l’ascenseur, en passant par «les coups Ba entre camarades de la Majorité», le bilan quelque peu désastreux de ces 12 dernières années du régime de Macky Sall avec les scandales à foison dont l’affaire Pétrotim, le détournement des 1 000 milliards de la Covid-19, ont fini de propulser l’ex numéro 2 du Pastef à la tête de l’Etat. Dites désormais, son excellence Bassirou Diomaye Diakhar Faye pour ces cinq prochaines années !
Ndèye Maguette SEYE