Après l’annulation de la Présidentielle du 25 février prochain, le régime et son nouvel allié qatari vont s’attaquer au candidat du système de Macky Sall, Amadou Bâ. Selon plusieurs sources dans cet état-major politique, l’angle d’attaque des conspirateurs sera de lui coller le tort d’avoir corrompu deux juges constitutionnels pour le saper avant de le faire poursuivre.
Cette fois-ci, les couteaux sont sortis. Il nous revient de plus en plus que le pouvoir va faire de son candidat l’agneau du sacrifice. Cela pour qu’on ne parle plus du coup de son chef, dénoncé par toutes les chancelleries du monde et la presse nationale et étrangère, à savoir l’annulation in extrémis de l’élection Présidentielle. En effet, sous peu, le régime et ses sbires vont dire que le Premier ministre Amadou Bâ est mêlé à l’achat de deux juges constitutionnels que Karim Wade a annoncé. Ce qui, d’ailleurs, n’a pas de sens puisqu’ils sont sept juges à voter. Et surtout que l’accusé n’est pas le candidat qui a introduit le recours ayant fait invalider la participation du fils d’Abdoulaye Wade, Karim, «exilé de force» au Qatar et qui est aujourd’hui dans une relation bâtarde avec son «frère ennemi». Lequel l’a emprisonné pendant trois ans et lui a collé une amende de 138 milliards de francs Cfa. Ainsi, aussi ubuesque que cela puisse paraitre, c’est celui qui s’est amusé avec notre grisbi à l’époque où son père était chef de l’Etat, qui nous doit cette lourde dette après des accusations sur plus de 700 milliards de francs Cfa, qui fait reporter la Présidentielle.
Après le message tambourinant de Macky Sall, samedi, cette tentative de diversion, qui arrive pile-poil, va ainsi commencer par saper Amadou Bâ. Et peut-être même le faire poursuivre. Une tragi comédie, aux allures des purges Trotskards, qui fait rire jusque dans les cimetières Saint Lazare, point de départ de la marche de l’opposition, hier.
Pourtant, les signes étaient à peine perceptibles. Deux ministres de l’équipe d’Amadou Bâ, en l’occurrence Mame Mbaye Niang et Thérèse Faye, se sont succédé sur les plateaux de télévision pour dénigrer leur patron et candidat de la majorité à la présidentielle. Et rien que l’absence de sanctions prouve que ces sorties intempestives ont été cautionnées en haut lieu, que cette ligne était la nouvelle orientation de leur leader et que c’est contre Bâ que Sall joue. Une partie qui semble aujourd’hui, avec ces accusations à venir, se trouver à un tournant où chacun des deux protagonistes sait à quoi s’en tenir.
Cependant, Amadou Bâ, de son côté, sans doute conscient des enjeux en cours, ne s’est pas encore cabré contre ce désaveu. Comme à son habitude, avec ses autres frères de parti qui l’attaquent, il n’a jamais manifesté de velléités ou fait preuve de résistance contre celui qui l’a fait candidat et tente curieusement de le défaire. Pis, il n’a pas enregistré de soutien de la part de quelconque de ses frères de Benno si ce ne sont Zahra Iyane Thiam et Aliou Sall, toujours à l’opposée de la «Reine mère» dans cette guerre de palais où elle semble gagner la première manche.
En tout cas, Bâ doit refuser de se faire conduire si facilement à la guillotine. Car, plus qu’un simple coup d’arrêt à sa fulgurante montée, ce serait une lourde hypothèque qui pèserait sur son avenir politique. Et, dans ce domaine, il y a des fortunes qui se répètent rarement. Donc, il devrait, faute de résister, leur vendre cher sa peau. Et avec toutes les positions stratégiques qu’il a occupées dans l’appareil d’Etat, il ne devrait pas manquer de munitions.
Seyni DIOP