La démission du lieutenant-colonel Damiba a permis d’éviter des affrontements qui paraissaient inévitables au sein des forces armées burkinabè. Soutenu par une frange de la population, le nouveau régime est en train de prendre ses marques malgré les condamnations de l’Ua et de la Cedeao.
Le lieutenant-colonel Paul-Henri Damiba a démissionné hier, dimanche 2 octobre, en laissant ainsi le pouvoir au capitaine Ibrahim Traoré, 34 ans, chef de la mutinerie qui a bruyamment éclaté vendredi dernier à l’aube. La nouvelle a été annoncée en début d’après-midi dans une déclaration commune des représentants des communautés religieuses et coutumières qui ont joué les médiateurs entre les deux camps qui étaient sur le point de s’affronter pour le contrôle du pouvoir. L’issue de leur bras de fer qui a duré trois jours s’était dessinée dans la matinée avec l’apparition à la télévision nationale du nouvel homme fort du Burkina. «La situation est sous contrôle. Les choses sont en train de rentrer progressivement dans l’ordre», avait-il affirmé. De son côté, le porte-parole du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (Mpsr), le capitaine Sorgho, a invité la population à s’abstenir de tout acte de violence et de vandalisme, notamment contre l’ambassade de France et le camp militaire français de Ouagadougou, la capitale, et le lycée français.
La démission de lieutenant-colonel Damiba a été accueillie par des manifestations de joie dont certaines avaient spontanément commencé dans la matinée pour soutenir ceux qui n’étaient encore que des mutins. Les nouvelles autorités ont commencé à prendre leurs marques. Dans leur «communiqué No 5» lu à la télévision nationale, elles ont chargé les secrétaires généraux des ministères de l’expédition des affaires courantes «en attendant la nomination d’un nouveau gouvernement». Les personnes concernées étaient convoquées hier après-midi à la salle de conférence de Ouaga 2000, le quartier qui abrite le Palais de la République. Parmi les mesures déjà prises, figurent la levée du couvre-feu et la fermeture des frontières qui ne concerne pas les véhicules humanitaires et ceux transportant des produits et équipements destinés aux forces de défense et de sécurité.
Le coup d’Etat qui a mis fin au pouvoir du lieutenant-colonel Damiba a été condamné samedi par l’Union africaine (Ua) et la Communauté économique des Etat de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Dans un communiqué, le président de la Commission de l’Ua, le Tchadien Moussa Faki Mahamat, a appelé les militaires à arrêter «immédiatement et totalement» tout acte de violences ou menaces contre la population civile, les libertés publiques et les droits humains. Il a rappelé que l’organisation continentale tient à la restauration de l’ordre constitutionnel au plus tard en juillet 2023. La Cedeao qui veillait au processus de la transition pourrait se réunir d’urgence pour prendre des mesures contre la junte. Le dialogue ne devrait pas être difficile entre les deux parties du moment que les nouvelles autorités burkinabè ont exprimé leur volonté de respecter les engagements pris avec l’organisation régionale.
Mamadou CISSE