La Compagnie Serigne Seck Sénégal (C3s) est secouée par un vol de 1 463 tuiles estimées à 78 millions de francs Cfa. L’affaire a été enrôlée, hier, devant le tribunal des flagrants délits de Dakar. Les mis en cause, Cheikh Diop, Pape Oumar Ly et Fallou Ngom, agents au dépôt principal de la Sodida, risquent deux ans de prison ferme.
Trois employés de la Compagnie Serigne Seck Sénégal (C3s) ont comparu, hier, devant la barre du tribunal des flagrants délits de Dakar. Placés sous mandat de dépôt depuis le 14 avril, Cheikh Diop, responsable du dépôt, Pape Oumar Ly, contrôleur et Fallou Ngom, responsable des stocks, sont poursuivis par Serigne Seck pour «abus de confiance, falsification ou suppression de données d’un système informatique». D’après les dépositions, ces prévenus sont accusés d’avoir profité de la défaillance du système informatique de l’entreprise pour dérober 1 463 tuiles d’une valeur totale de 78 millions de francs Cfa. Pour cela, ils risquent deux ans de prison ferme. Le procureur qui a requis cette peine à leur encontre déclare que c’est le nom d’utilisateur de Fallou Ngom qui a modifié les données informatiques. Selon lui, chacun y a joué sa partition. «Il y a eu co-action qui a duré dans le temps. On pouvait les poursuivre devant la chambre criminelle», fait savoir le maitre des poursuites.
Leurs actes découverts récemment, soutient-il, ont été commis entre le 20 mars 2020 et le 09 février 2021, au dépôt principal situé à la Sodida. «Des données de 2016 ont été transférées vers l’exercice comptable de 2019. Pour voler, ils font recours aux bons de 2016 auxquels ils ajoutent un surplus. Ce surplus, ils l’ajoutent à un bon daté en 2022», laisse entendre le maitre des poursuites.
Pour la responsable du département audit interne de C3s, Sokhna Ngoné Ndiaye, ce modus operandi des prévenus a été découvert le 05 janvier dernier. Par curiosité, elle avait tenté, ce jour-là, d’ouvrir un fichier de stock. A sa grande surprise, le document a été modifié au niveau du serveur par l’utilisateur Fallou Ngom.
Sa déclaration a été corroborée par Diogob Ndiaye, Daf, Ndiogou Mapathé Dieng, informaticien, et par la responsable juridique de l’entreprise. Selon la première nommée, toutes les dates et écritures des stocks ont été modifiées. «Des écarts physiques de tuiles non encore distribuées ont été constatés. Nous partageons le même serveur. Personne ne peut apporter des corrections sur le compte d’autrui. Quand on rajoute ou soustrait des données, tout le monde constate le mouvement à travers le serveur», fait-elle savoir. C’est ainsi que l’audit qui a abouti à un écart de 1 463 tuiles imputé aux prévenus a été mené.
A la barre, les prévenus ont nié les faits. Selon eux, les codes d’accès au serveur n’étaient pas restreints. «On descend, au plus tard, à 19 heures. Plusieurs caméras de surveillance sont installées dans le dépôt. J’ai passé 19 ans et 6 mois dans cette entreprise à l’entreprise. Je n’y ai jamais eu de problème», confesse Pape Oumar Ly. «Effectivement, des données ont été modifiées», avoue partiellement Cheikh Diop, responsable du dépôt. Son nom d’utilisateur cité comme étant le modificateur des fichiers, Fallou Ngom, responsable des stocks, révèle que quatre personnes ont accès à sa machine : l’administrateur, l’informaticien, le contrôleur et lui. «C’est mon identifiant qu’on a utilisé, mais je ne suis pas l’auteur», dit-il.
Les avocats de la défense ont plaidé la relaxe au bénéfice du doute. Parce que, soutiennent-ils, on ne peut pas imputer aux prévenus les écarts de tuiles constatés. Mes Ibrahima Mbengue, Ousmane Thiam et autres se sont accrochés sur la non exclusivité du code d’accès au serveur. Lequel code, estiment-ils, est partagé avec tous. «Le dossier est vide. La société est informelle. Les témoins devraient être traduits devant la barre parce qu’ils sont capables de ces falsifications», fait savoir Me Mbengue.
L’affaire est mise en délibéré au 03 mai 2022.
Salif KA