L’équipe de Macky Sall est en train de désacraliser l’Etat que Senghor a légué. Rien que le communiqué de presse invitant les journalistes à la rencontre : «Le gouvernement face à la presse» mérite le détour. Entre fautes de français, vices de forme et méconnaissance des rôles, c’est la cacophonie totale. La grande administration sénégalaise nous avait habitué à mieux.
Quelle guigne ! C’est toujours la cacophonie dans la Com’ gouvernementale. Après les nombreuses fautes décelées à l’époque par le transfuge Mamadou Sy Tounkara, Ndèye Ticket Ndiaye Diop avait fini par montrer ses limites objectives dans cet exercice. Aujourd’hui qu’Oumar Guèye a pris le relais comme porte-parole du gouvernement, le mal persiste dans les communiqués du gouvernement. La dernière lettre d’invitation envoyée aux organes de presse pour les convier à cette nouvelle trouvaille illustre parfaitement l’endémique problème de Com’ du régime de Macky Sall. En effet, cette invitation à la rencontre «Le gouvernement face à la presse» est chaotique. Il est truffé de fautes et d’incorrections indignes d’un Etat sérieux. Qui, avec toute son armada de gourous, nous sert une si piteuse copie.
Eh ben, figurez-vous que ce régime qui semble vouloir ériger la Com’ en méthode de gouvernement patine grave dans ce domaine. Rien l’entame du document l’illustre parfaitement. «Dans sa stratégie de communication, le gouvernement du Sénégal compte organiser tous les 15 jours une conférence de presse appelé + le Gouvernement face à la presse+». Primo, en parlant de «stratégie», le gouvernement ( ?) crée des mécanismes automatiques de soupçons. Il fait comme s’il voulait vendre du vent aux journalistes. Parce que tous les connaisseurs savent que la meilleure communication est celle qu’on ne sent pas et celle qu’on ne présente pas comme telle. Et Oumar Guèye devrait savoir que la Com’ arrange alors que l’information dérange.
Secundo, le groupe de mots «Face à…» est une expression violente dans une communication. L’Exécutif n’était pas dans un match avec celui qu’il nomme le quatrième pouvoir mais dans une opération de charme pour expliquer son travail et rassurer les populations, assaillis par une multitude de problèmes.
Tertio, sans même s’indigner des redondances (gouvernement-presse) dans une même phrase, Oumar Guèye engage le pouvoir sur des rendez-vous qu’il pourra difficilement honorer. Car, ils ne peuvent avoir toujours de la matière, quand on sait surtout que dépêcher huit ministres tous les 15 jours devant les médias, c’est beaucoup de temps pour un gouvernement qui travaille, vraiment.
Pis, il y a quelques années, on nous avait annoncé que ce même gouvernement irait tous les mois devant la Représentation nationale pour s’expliquer. Que nenni. Pourtant, c’est cela qui aurait été la bonne stratégie : laisser les ministres s’expliquer devant le Parlement qui devait les interpeler sur divers sujets d’actualités, surtout qu’on est en pleine session budgétaire. Mais, Oumar Guèye semble vouloir faire trop de zèle en court-circuitant le responsable de la communication gouvernementale. Car, comme s’il ne comprenait pas sa mission, il se substitue très vite au ministre de la Communication et semble ignorer que le rôle d’un porte-parole est de restituer. Pas d’élaborer une stratégie de communication. Juste pour faire du bruit. Car, avec ce qu’on a vu hier, tout était tricoté à l’avance. Et l’exercice était au plus près de la mascarade. Ou, si l’on préfère, beaucoup de mousse avec peu de savon.
De plus, le style des gourous de Macky dans ce méli-mélo a rompu avec les valeurs de la République, les ministres s’étant embourbés dans des explications qui ne convainquent personne puisque préférant les généralités sur la transparence aux questions sur la vraie actualité. Le Sénégal de l’académicien Léopold Sédar Senghor mérite mieux que ça.
Cependant, le summum, ou la «der» de ces communicants du système, que d’aucuns surnomment des «paniers percés», est dans la fin de la lettre adressé à «Monsieur le Rédacteur en chef du site d’information LERAL (.net, .com, .sn ou .gueye ??? : Ndla») envoyée à presque toute la presse, avec une grossière faute: «Ampliation : Monsieur le Présidence de la République» (sic). En faisant au chef de l’Etat ampliation d’une simple invitation à la presse, Oumar Guèye confirme au pays tout entier ce que tout le système murmure: «Le Président contrôle tout».
Seyni DIOP