Ibrahim Magu, le patron de la haute autorité chargée de la corruption a été démis de ses fonctions et est entendu par la police pour avoir détourné de l’argent. À moins que ces accusations n’aient pour but d’écarter cet homme qui dérange.
“Personne n’est à l’abri”, comme le rapporte le Premium Times, le renvoi d’Ibrahim Magu, le 6 juillet a valeur d’exemple. Et pour cause, cet homme était jusque-là un des plus puissants et des plus craints du pays : il était le patron de l’EFCC, l’instance chargée de la lutter contre la corruption, un fléau dans le pays. Le qualifiant de “cancer” le président nigérian Muhammadu Buhari en a fait l’un de ses combats majeurs depuis son élection en 2015.
Mais l’ironie de l’affaire réside dans la raison pour laquelle Ibrahim Magu a été démis de ses fonctions et convoqué par la police. L’homme est en effet accusé lui-même de détournement d’argent. “Le parti au pouvoir a déclaré que personne ne pouvait échapper aux poursuites sous ce pouvoir mené par un homme incorruptible, Muhammadu Buhari, rapporte le Premium Times, L’APC a rejeté toute suspicion de chasse aux sorcières”.
Un règlement de compte politique ?
C’est que cette affaire fait les gros titres tant elle intrigue. L’hebdomadaire sud-africain The Continent résume :
Le Nigeria est un pays de mystères. C’est un pays où des évènements qui semblent contraires peuvent malgré tout se produire. Donc cette arrestation est une grande surprise et en même temps pas une surprise du tout”.
Beaucoup soupçonnent que se cache en réalité un règlement de compte politique derrière cette affaire, tant Ibrahim Magu et ses enquêtes dérangeaient. Il était de notoriété publique depuis plusieurs semaines qu’il était à couteaux tirés avec le Procureur général nigérian. Une note confidentielle de ce dernier, regorgeant d’accusations, avait opportunément fuité dans la presse début juin. Abubakar Malami avait alors demandé la tête du Monsieur anti-corruption du pays.
Plusieurs ONG de lutte contre la corruption comme Global Witness et Corner House ont ainsi apporté leur soutien à Ibrahim Magu. Dans un communiqué cité par le Premium Times, ils affirment : “Il était à la hauteur de la tâche. Sa détermination à lutter contre la corruption était claire. Son renvoi interroge sur la volonté du Nigeria de combattre cette cause majeure de sous-développement”.
The Nation, autre journal nigérian souligne que depuis le renvoi d’Ibrahim Magu, personne n’a été nommé à la tête de l’EFCC, ce qui n’est pas sans arranger plusieurs personnalités de la classe politique nigériane.
Courrier International