C’est la cacophonie à Air Sénégal Sa. Avec l’immixtion des pouvoirs publics dans la gestion de cette filiale de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), l’Etat foule au pied l’orthodoxie de la gestion des entreprises privées. Des vices de forme qui risquent de sérieusement mettre du plomb dans l’aile de la jeune compagnie.
Air Sénégal Sa est loin d’avoir quitté sa zone de turbulence. Malgré ses changements de slots (créneaux horaires) sur la desserte parisienne et l’arrivée de son nouveau module A330 Neo, le pavillon national continue de lancer des messages de détresse. Et cette fois-ci, c’est l’immixtion de l’Etat dans la gestion de cette entreprise privée qui pose sérieusement problème. Filiale de la Caisse des Dépôts et Consignations (Cdc), le porte étendard sénégalais se voit toujours imposer son plan de vol par les autorités politiques.
Si le nouveau directeur de la compagnie a commencé à trouver des pistes d’amélioration des performances de sa flotte et de maîtrise des coûts d’exploitation, son management de la compagnie est parasité par l’intrusion des politiques. En effet, le propriétaire de la compagnie, à savoir la Cdc, a presque perdu le contrôle de sa filiale. Car, tout se décide entre la Présidence de la République et le ministère des Transports aériens. Le président Sall, qui certes, nomme aux emplois civil et militaire, pense qu’il peut, à tour de bras, tout se permettre. Il a fait nommer son ami de la Fac, par ailleurs ancien Premier ministre, Souleymane Ndéné Ndiaye, au poste de Président du Conseil d’administration (Pca) et le Directeur général de la boîte, Ibrahima Kane, ex-Dg du Fonds d’investissement stratégique (Fonsis), le ministre Alioune Sarr, nous dit-on, convoque des pré-conseils. Car, d’après nos sources, il se comporte parfois comme le Président du Conseil d’administration de la compagnie. Or, ce n’est pas son rôle. De plus, Pca d’une entreprise publique, ce n’est pas la même chose que celui d’une entreprise privée. Parce que pour cette dernière, on y voit déjà qu’une personne a mis ses sous et veut tout faire pour ne pas les perdre. Donc, son style de management est rigoureux. Et souvent, c’est une personne choisie par ses pairs. Mais, dans le cas d’espèce, il n’en est rien puisque ces politiciens n’ont rien à perdre en cas de «crash» de la compagnie. Même pas leur crédibilité de gestionnaire.
En tout état de cause, cette immixtion du public dans une entreprise privée est révélateur de la confusion totale qui règne dans le pays après la désarticulation du système. Ce, avec un président de la République qui se mêle trop des entreprises privées comme cela a été le cas à l’Institution de prévoyance retraite du Sénégal (Ipres) où il a été obligé de revenir sur le décret de nomination d’Amadou Lamine Dieng comme Directeur général en remplacement de Mamadou Sy Mbengue envoyée à la SnHlm. Une erreur monumentale qui montre qu’on semble fouler au pied les règle de l’orthodoxie. Et les agents de la Cdc, qui ont mis dans ce pavillon national 40 milliards de francs Cfa qui ne leur appartiennent pas puisqu’étant l’argent des déposants, n’ont pas de maîtrise sur le fonctionnement, les orientations et stratégies de leur filiale. Laquelle va commencer à connaître les vraies difficultés de l’industrie du transport aérien avec le début du remboursement de leurs prêts pour l’acquisition de nouveaux modules.
Rappelons que le Sénégal a eu de très hauts cadres dans le secteur du Transport aérien depuis Cheikh Fall, ancien patron d’Air Afrique. Aujourd’hui encore, de grands talents dans ce domaine, comme Ibra Wane ex-directeur de Corsair au Sénégal, Mayoro Racine ex-Dg de Sénégal Airlines ou encore le Commandant Malick Tall, entre autres, peuvent aider le pays à avoir une visibilité plus claire sur le plan de vol du pavillon national.
Seyni DIOP